Magazine Cinéma

Article du mois : Gainsbourg entre « vie héroïque » et légende...

Par Sheumas

Le lecteur de ce blog savait que j’attendais ce moment depuis longtemps... La sortie du film sur Gainsbourg ! et je me suis retenu pour ne pas y aller dès la sortie. Enfin, c’était hier soir et j’en sors très déçu... Je vais essayer d’expliquer pourquoi au fil de ces trois articles à venir, trois articles qui n’en font qu’un mais qui, pour des raisons de brièveté, seront répartis en trois temps.

La musique lancinante et troublante de « Valse à Mélody » et le film commence. Le petit Lucien, qu’on dirait échappé du film « Au revoir les enfants », le bruit des vagues et le bleu de l’eau...

« Je sais moi des sorciers indigènes qui invoquent les jets dans la jungle de Nouvelle Guinée, ils scrutent le zénith convoquant les guinées que leur rapporterait le pillage du fret (...) » *

Des frissons sur la peau à ces premières notes qui me renvoient à mon opus favori : « Histoire de Mélody Nelson ». Tout semble bien commencer... Et puis le film ralentit. Série d’images convenues. Livres d’images qu’on tourne et qui laissent un goût de pas assez.

A vrai dire, chaque épisode, chaque texte mériterait une exploitation plus vaste, plus vigoureuse, un scénario, un film... L’enfance du petit Lucien, ses leçons de piano, ses ébauches, les dessins, les relations aux modèles qui viennent poser dans les ateliers d’art. Les débuts dans les bars, la rencontre de Boris Vian, la complicité entre l’auteur de « L’Ecume des jours » et le pianiste de bar, la liaison avec Gréco, la liaison avec Bardot, la liaison avec Birkin, la liaison avec Bambou, la confrontation avec les paras... Et les bandes sons qui se succèdent dans le jube-box... De petits joyaux mal chantés par les acteurs... on aimerait les vrais timbres.

Les personnages du film enfilent à la hâte le costume des chansons, incarnent des mots, des rythmes, des poèmes... vacillent sur le fond de musiques inaccessibles, devenues les échelons de ce « mode mineur » que le grand Serge daignait à la chanson. Même la gracieuse Laetitia Casta ne parvient pas à rattraper la légendaire et fulgurante Initials BB, surgie d’une « vision, dans l’eau de Selz ».

Le double méphistophélique de Gainsbourg, préfiguration de Gainsbarre, espèce d’impressario cynique ne me convainc pas ! Pas plus la figure de la «tête de chou » (artificiellement planté sur la figure de Serge comme une « tarte à la crème » servie dans la seconde partie du film) ! Pas plus la « Silver Ghost de 1920 » ensablée inexplicablement pendant un tournage de Jane avec Delon ! Pas plus « la Vénus d’argent du radiateur » dans la poche d’un Serge vieillissant, ramassé au coin de la rue de Verneuil par la police ! Le film ne rattrape pas les pages de la légende qui, pendant toute la projection, se réécrit lentement dans le fond des entrailles.

« Où es-tu Mélody et ton corps disloqué hante-t-il l’archipel... »

Peut-être est-il vain de vouloir mêler dans un film la biographie d’un auteur et son œuvre ? Peut-être l’orchestre de la mémoire joue-t-il des morceaux devenus, au fil des années, trop complexes pour tolérer d’autres visages que ceux de l’imaginaire ? Difficile en effet de remplacer Marilou quand « elle s’endort sous la neige », Mélody qui a déjà « touché ces lumineux coraux des côtes guinéennes où s’agitent en vain ces sorciers indigènes qui espèrent en vain en des avions brisés », Jane, « tombée du ciel » du haut de ses « amours des feintes »...

Serge--R-solution-de-l--cran-.jpg


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Sheumas 243 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines