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Etat chronique de poésie 842

Publié le 15 mars 2010 par Xavierlaine081

842

Les mots du matin se précipitent.

Ils ont tant cheminés avant d’apparaître au petit jour gelé d’une neige qui ne sait que faire…

Alors, elle fait comme nous, elle attend.

Un grand congrès d’oiseaux s’est réuni devant la fenêtre. Sans doute encore une de ces manifestations qu’ils organisent régulièrement, lorsque leur mangeoire est vide…

Ils nous rappellent à notre devoir.

Et comme nous ne sommes pas sourds, nous ne tarderons pas à obtempérer.

Les oiseaux sont, avec la beauté le dernier rempart contre l’absurdité…

Et, dans absurdité, il y «surdité »…

Or ce qui alimente les conflits relève de notre incapacité à entendre…

Nous sommes sourds. Et plus on s’élève dans l’échelle sociale, plus ce handicap se fait pesant…

Je suis en mesure d’entendre ce que les oiseaux me disent. Mais, lorsque je me retourne vers quelque édile avide de pouvoir, et fier de le détenir, j’ai bien l’impression d’être seulement écouté, gentiment…

La porte refermée, il ne restera rien de ma requête…

Les priorités sont toujours ailleurs, et cet ailleurs passe par la défense, et la défense par des bombes, de plus en plus nombreuses, de plus en plus chères…

*

De partout le conflit fait rage. Il mine ceux qui s’aiment. Il étripe des enfants. Il se montre en plein midi et au mitan d’un boulevard. Il erre en bandes haineuses. Il se décline en prise de becs, en prises de têtes, en prises de mains…

Titubant, assommé, l’œil noir et la voix furibarde, le conflit s’immisce dans la trame du quotidien.

Il s’en trouve toujours pour en attiser la flamme. Leurs menaces se font rudes dès lors que la confusion s’installe entre bourreau et victime.

Si souvent on demande à cette dernière d’avaler son chapeau en couvrant l’exaction du premier d’un voile pudique…

Pris dans la nasse grouillante et venimeuse, on fonce tête baissée dans le tas.

C’est être aveugle…

*

Il faut savoir calmer le jeu. Non qu'il faille accepter tout, mais on ne peut pas grand-chose lorsque l'autre se dévoile, apparaît sous son vrai visage…

Nous ne pouvons agir que sur et pour nous-mêmes… Et si nous voulons préserver encore un peu de ce qui nous reste d'humanité, nous devons demeurer sur ce fil du rasoir entre notre préservation et notre ouverture.

Certains se contentent de sauver leur propre peau. Ils fuient dans une célébrité fugace…

Mais qu'est-ce que la célébrité, sinon feu de paille?

Le pire est de se croire arrivé quelque part…

La seule gare que je connaisse est définitive. Tout le reste n'est que chemin, laborieux, qui se nourrit de discrétion et d'infinies recherches…

Ecrire est très présomptueux en soi. Et nous n'écrivons pas pour que nos mots demeurent sous le manteau…

Mais qu'est-ce que la publication sinon une étape dans un long parcours où nous attendent tant de faux pas, de faux fuyants, de raisons raisonnables…

Que le siècle nous invite à nous mirer sans cesse en nous prenant pour les meilleurs, c'est un fait: nous ne sommes pas obligés d'accepter ce diktat.

Mais lorsque la fracture arrive, il faut la panser, non jeter du sel sur les plaies…

Je comprends l’amertume, la colère. Mais il ne faudrait pas que ces deux états aveuglent.

Ceux contre lesquels nous butons ne sont pas si importants, sinon qu'ils savent se préserver…

Nous n’avons pas besoin de guide pour être qui nous sommes.

Nous ne pouvons que regretter de mal placer notre confiance, parfois. Nous donnons des responsabilités sans voir avec qui nous faisons affaire.

Les dauphins, parfois, creusent la tombe de l'œuvre commune, en niant les collaborations qui en furent à l'origine…

Mais c'est ainsi: ce monde ne connaît qu'ingratitude et suffisance…

Ne nous brisons pas contre ce mur. Cherchons, sur ce chemin d'amertume, ce qu'il convient d'apprendre pour sortir grandis de l'épreuve… 

*

J’aborde le mythe de Sisyphe. Je lis avec attention…

Si n'était que la vie a un sens, celui qu'on cherche sans vraiment jamais le trouver, celui de l'amour partagé ou non, celui de l'amitié et de la beauté d'un paysage saupoudré de neige, qu'importerait de vivre et d'écrire?

Camus a raison: la question du suicide, et encore plus pour celui qui l'a vécu et en est revenu, est la principale question philosophique…

La conscience du mouvement comme la conscience tout court ne sont que moyens de parvenir à découvrir du sens, là où les potentats s'attachent à le voiler, à le nier.

Il est tellement plus facile de gouverner des êtres désespérés, vidés de leur sens, vidés de leur sang et de leur substance…

Manosque, 13 février 2010

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