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Exercice de démocratie théorique

Publié le 16 mars 2010 par Mtislav
 
Il y a quelques années, quelques idéalistes d'un pays tropical découvrant la démocratie prétendaient introduire dans leur constitution une disposition amusante : tout scrutin à l'occasion duquel le nombre de votes blancs serait supérieur au score du candidat le mieux placé serait annulé, un nouveau vote étant organisé pour lequel les candidats du premier scrutin ne sont pas autorisés à se présenter. 
Le but de la mesure était de moraliser la vie politique, d'en finir avec des élections où le personnel politique est unanimement rejeté par l'électorat.
Bien évidemment, une telle proposition est plutôt risquée. Organiser une élection en laissant ouverte la possibilité de ne pas produire un résultat peut s'avérer risqué. La démocratie elle-même est un système politique risqué. D'où l'idée d'en proposer des versions édulcorées.
Certains pensent qu'en France les votes blancs ne sont pas décomptés. Ils se trompent. Cela est très facile à vérifier en se rendant sur le site du ministère de l'intérieur. Dans mon département, il y a eu 13 412 votes blancs ou nuls au premier tour des élections régionales. En réalité, ces commentateurs veulent dire que les votes blancs n'ont pas d'influence sur le déroulement du scrutin. Imaginons une disposition modifiant la donne. Quelque soit le choix opéré, le résultat sera de paralyser le scrutin. L'élection, momentanément, ne désigne pas de candidat. Finalement, un choix supplémentaire est offert aux électeurs : celui de ne désigner personne ! On pourrait même imaginer de retourner au vieux système du tirage au sort pour désigner les représentants du peuple dans un tel cas de figure.
Pour donner une idée de l'importance de ce vote blanc ou nul, dans les Pyrénées-Atlantiques, il a numériquement la même importance que le score réalisé par le candidat du FN (13 701). Forcément, à vouloir compter les blancs et les nuls, on ne pouvait échapper à un total de la même importance.
La liste "Euskal Herri Bai" (conduite par un dénommé Xavier-Philippe Larralde) a totalisé 187 votes : le nationalisme est dans une mauvaise passe... 
Notons plus sérieusement que six listes sur onze regroupent un nombre de votants inférieur à celui des blancs ou nuls. Pour qui se donne la peine de consulter les résultats, on peut mettre en balance les 13 412 citoyens qui sont venus déposer un vote blanc ou nul avec les 242 436 qui sont allés à la pêche (dont c'était d'ailleurs l'ouverture). Observons que le décompte des abstentionnistes s'affiche avec une finesse exceptionnelle alors que le vote blanc est fondu avec le vote nul. Reconnaissons que c'est assez démoralisant de confondre les myopes et les plaisantins avec quelques citoyens scrupuleux. Sans parler de l'idée de proposer aux Basques et aux Béarnais de cohabiter. 
Imaginons que la loi électorale change, qu'une proportion donnée d'abstentionnistes soit reconvertie en vote nul, la première conséquence concernerait la protection de la flore aquatique : quelques truites échapperaient à la capture. Il faudrait revoter. Il n'est pas certain que davantage d'électeurs modifient leur emploi du temps si les candidatures sont identiques...
Heureusement, la démocratie ne se résume à quelques parties de pêches. Il y a les associations, les manifestations, les révolutions. Dans ce dernier cas, on passe à la pêche au gros, le décompte est plus douloureux.  

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