Magazine Culture

Les souvenirs métaphysiques de François Chenique

Par Contrelitterature

Couverchenic.jpg François Chenique Souvenirs métaphysiques d'Orient et d'Occident Entretiens avec Christian Rangdreul L'Harmattan, 2009, 236 pages

Ces Souvenirs métaphysiques d’Orient et d’Occident, en langage de tous les jours, en quatre chapitres seulement, et sous la forme vivante d’un dialogue permanent, offrent de découvrir une métaphysique approfondie durant toute une vie et acquise aux meilleures sources : chrétiennes, hindoues et bouddhiques. Pour autant, il ne s’agit en rien d’un « cocktail » car, si les « résonnances » entre ces « mondes » sont indéniables – et ici souvent soulignées –, c’est par chapitres distincts que l’on pénétrera dans le génie propre de chacune de ces traditions. De plus, grâce au récit des « jeunes années » de François Chenique (né en 1927), on bénéficie d’une découverte progressive de cette métaphysique, fruit d’un travail commencé à quinze ans – le 8 décembre 1942, fête de l’Immaculée Conception – et dont l’auteur présentera la synthèse, trente ans plus tard, sous forme d’une « métaphysique au féminin » [1]

Ainsi, le premier temps consacré à ces « jeunes années » pourra bien être critique de certains aspects de l’enseignement catholique d’une ville de province avant et pendant la guerre, surtout, il dévoilera les détails d’une rencontre déterminante, initiatrice, avec l’abbé Henri Stéphane, professeur d’instruction religieuse mais aussi, trop avant l’heure sans doute, fin connaisseur de la métaphysique orientale, et dont François Chenique publiera, quarante ans plus tard, les textes majeurs dans une Introduction à l’ésotérisme chrétien [2]

Le deuxième temps de ces entretiens porte sur sa rencontre de l’œuvre de René Guénon, des doctrines les plus importantes de la pensée guénonienne jusqu’aux limites du guénonisme, qu’il est resté nécessaire de souligner.

C’est un panorama saisissant du christianisme, des Pères de l’Église au Concile de Vatican II, qu’offre le troisième temps, éclairant, les uns par les autres, le Docteur angélique et le Docteur séraphique, les théologies d’Orient et d’Occident, la mystique et l’ésotérisme, et soulignant ce que François Chenique a appelé le yoga de saint François [3] ou le caractère de Bodhisattvâ de Sainte Thérèse de Lisieux [4].

Au quatrième temps de ce voyage vers l’essence des choses, on est invité à pénétrer dans le bouddhisme plus ou moins bien acclimaté à la France mais, dans un même mouvement, dans le bouddhisme tibétain le plus authentique et appris aux meilleures sources, tel le rGyud.bLama (Ratnagotravibhâga), texte de haute volée de la métaphysique tibétaine et que François Chenique aura mis vingt ans à traduire à partir à la fois du tibétain et du sanskrit [5]. Les questions les plus périlleuses n’y sont pas écartées : théisme et non-théisme, Soi et non-Soi, bouddhisme et subjectivisme, sens direct et sens intentionnel, etc.

Enfin, pour tous ceux qui voudront, au-delà de ces dialogues, approfondir davantage encore deux aspects-clef de toute métaphysique, deux annexes synthétiques proposent, l’une de comprendre comment « Soi et non-Soi, Vacuité et Qualités » se répondent, l’autre d’apercevoir le fondement métaphysique de toute logique : « Logique et ontologie ». On voit ici comment, seule, cette expérience originale et unique d’un penseur à la fois de l’Orient et de l’Occident, était à même de nous guider à travers les métaphysiques guénonienne, chrétienne et du bouddhisme tibétain, et de nous livrer, en mots simples mais précis, les moyens de « vivre » avec lui ce questionnement métaphysique, et de le faire nôtre, en tout ou partie, si nous le souhaitons..


[1] Le culte de la Vierge ou la Métaphysique au féminin, Dervy, 2000 (initialement : Le Buisson ardent, 1972).

[2] Abbé Henri Stéphane, Introduction à l’ésotérisme chrétien, textes rassemblés et annotés par François Chenique, Préface de Jean Borella, Dervy, rééd. 2006 (initialement, tome 1 : 1979, tome 2 : 1983).

[3] Le Cantique des créatures de Saint François d’Assise. Commentaire symbolique, Dervy, rééd. 1993 (initialement : Le yoga spirituel de S. François d’Assise. Symbolisme du Cantique des créatures, Dervy-Livres, 1978).

[4] Cf. Sagesse chrétienne et mystique orientale, Préface de Jean Borella, Postface de Jean-Pierre Schnetzler, Dervy, 1996.

[5] François Chenique, Le message du futur Bouddha ou la lignée spirituelle des Trois Joyaux, traductions et commentaires, Dervy, 2001.



Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Contrelitterature 1013 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines