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Crime et châtiment

Par Anne Onyme

crimeetchatimentFédor Dostoïevski
Folio
720 pages

CoupdeCoeur

Résumé:

«Raskolnikov se mit à trembler de tout son corps comme un homme frappé d'un coup terrible.
- Mais... alors... qui... est l'assassin ? balbutia-t-il d'une voix entrecoupée.
Porphyre Petrovitch se renversa sur sa chaise, de l'air d'un homme stupéfait par une question abracadabrante.
- Comment, qui est l'assassin ? répéta-t-il comme s'il n'en pouvait croire ses oreilles, mais c'est vous.»

Mon commentaire:

Paru pour la première fois en 1866, Crime et châtiment est le roman d'un homme, Rodion Raskolnikov, et de son crime: le meurtre d'une usurière et de sa soeur. Le roman est un pavé et pourtant il sait soutenir l'intérêt du lecteur. Nous apprenons tout d'abord à connaître Raskolnikov: ses relations, sa famille, son statut d'étudiant déchu qui n'a plus un sou et a perdu l'envie de se battre contre la vie pour réussir ses débuts. Jusqu'à ce qu'il commence à fonder une sorte de théorie sur les riches et les pauvres, la misère humaine, le droit à la vie ou à la mort. Un homme (ou une femme) qui est profondément détestable, qui profite du malheur des autres pour s'enrichir, mérite-t-il la mort? Est-ce une bonne action que de s'en débarrasser puisqu'on libère ceux qui sont sous son emprise?  Et si par cette action on favorise une cascade de bonnes actions, est-ce donc permis de passer à l'acte? C'est un peu le questionnement de Raskolnikov. Finalement, il décide que la vieille usurière doit mourir et s'en occupe, mais les choses ne se déroulent pas du tout comme il l'avait prévu...

Le personnage de Raskolnikov est très intéressant. On le suit avec intérêt dans son parcours entre son crime et son châtiment. Après son crime, il tombe dans un état fiévreux mi-conscient où il délire. C'est d'ailleurs en se basant sur son comportement après le crime que l'on tentera d'alléger sa peine. Raskolnikov divague, laisse derrière lui une foule d'indices menant à son crime et a des réactions bizarres et difficiles qui éveillent le soupçon dans son entourage.

Le roman est savamment construit car il analyse dans le détail toutes les étapes du crime. L'état du criminel avant le crime, la façon dont il planifie son acte, ce qui arrive réellement sur place et ce qui suit l'après-crime. Raskolnikov rentre chez lui, cache l'arme du crime et croit que la vie reprendra là où il l'a laissée. Erreur. Il doit vivre avec le regard des autres, la honte, la culpabilité, son propre questionnement incessant sur ce qu'il a fait, la vie, la mort et sa position dans la société: il est maintenant un criminel, mais personne, encore, ne le sait.

Raskolnikov se livre en quelque sorte à un grand combat intérieur. C'est la rencontre du bien et du mal, l'affrontement entre certaines convictions et les conséquences de l'acte qu'il a commit. On le voit évoluer au sein de la société, sous l'emprise de sa conscience et des tourments qui l'empêche de vivre. La façon dont Dostoïevski décrit l'incertitude, la crainte, la peur et les tourments psychologiques de son personnage est fascinante. La notion de temps m'apparaît importante dans ce roman, le temps qui s'épare Raskolnikov de son crime, le temps qui passe après son crime et le temps qui lui reste avant la fin. Raskolnikov en est bien conscient. Fait intéressant, Dostoïevski a été déjà été arrêté et condamné dans l'affaire d'un complot. Il devait mourir. Sa peine a été commuée en travaux forcés. On retrouve les tourments d'un homme qui croit à sa fin proche dans ce roman et d'après ce que j'ai lu, c'est une scène récurrente de l'oeuvre de Dostoïevski.

Le véritable châtiment de Raskolnikov n'est pas la sentence de la cour mais plutôt sa propre conscience qui le tourmente sans cesse. C'est un roman qui se lit très bien et qui est étonnament très lucide. Crime et châtiment est un excellent roman psychologique qui porte à réfléchir. Il est d'autant plus très bien construit et analyse à la perfection le crime, le criminel et sa conscience. À lire.

Quelque extraits:

"Les socialistes ont commencé par exposer leur théorie. Elle est connue: le crime est une protestation contre une organisation sociale anormale." p.272

"L'homme est-il une vermine? C'est qu'il n'en est pas une pour moi. Il ne l'est que pour celui à l'esprit duquel ne viennent pas de telles questions, celui qui suit son chemin tout droit sans s'interroger..." p.442

"Il se serait estimé heureux, s'il avait pu, à ce moment, se retirer dans la solitude, même pour l'éternité; mais le malheur était que tous ces derniers temps, bien qu'il fût presque toujours seul, il n'éprouvait jamais le sentiment de l'être entièrement." p.463


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