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Cosmico-sceptique

Publié le 20 avril 2010 par Cieletespace

Récemment, un physicien de nos amis racontait qu’à la sortie du cours de physique qu’il délivre dans une grande école de la République, une étudiante l’a interpellé en ces termes : “Vous savez monsieur, cette théorie d’Einstein, la relativité générale, moi, je ne la sens pas…”    

Cosmico-sceptique

crédit photo : #Justin

À l’image de cette anecdote, le triste spectacle du Tartarin des climatosceptiques français a confirmé dans les foyers nationaux que l’on pouvait “sentir”, ou ne “pas sentir” les conclusions d’un consensus scientifique. Et ce, évidemment, sans passer par la case obligatoire du débat entre pairs et par la “démonstration probante” nécessaire à tout changement de vision. À première vue, l’affaire n’est pas nouvelle puisque des groupes, aux États-Unis, ne croient pas que l’homme ait marché sur la Lune, ou qu’il descende du singe. Mais c’est outre-Atlantique ; un continent lointain, séparé par un océan, où — si l’on en “croit” la tectonique des plaques — ces bêtises s’éloignent de nous chaque année, centimètre par centimètre. Cela ne doit pas être assez et depuis quelques mois, dans les réunions de famille, le sujet du réchauffement climatique s’est inscrit au menu des discussions et des facteurs de division. Le géochimiste Allègre n’est pas Galilée et les dégâts sont impressionnants.  

En s’affranchissant des règles séculaires du débat scientifique, en truquant les courbes et les données, en menaçant ses contradicteurs par des arguments d’autorité, puis en prenant à témoin les spectateurs de joutes audiovisuelles complaisantes, l’ex-patron de la recherche publique a perdu raison et tout crédit. Traités de “mafieux”, de “totalitaires” et accusés “d’imposture”, 600 scientifiques français travaillant dans le domaine climatique ont décidé d’en appeler à leur ministre en signant un appel dans lequel ils soulignent que “la publication de ces affirmations témoigne d’un sentiment d’impunité totale de la part de leurs auteurs, qui oublient les principes de base de l’éthique scientifique, rompant le pacte moral qui lie chaque scientifique avec la société”. C’est finalement l’Académie des sciences qui a été chargée de l’organisation d’un “débat scientifique serein, arbitré par les pairs” sur la question climatique…  

Cette triste affaire, qui vise aujourd’hui les sciences du climat, devrait avoir toutes les raisons d’inquiéter les astronomes et les cosmologistes. Tous ceux dont les travaux s’appuient sur la construction de modèles et les simulations numériques. Ils en connaissent la puissance et la fragilité. Savent que, pour les nourrir, des données d’observations sont indispensables. Même si elles risquent de mettre à bas de belles théories. S’il n’y a plus grand monde pour croire que la Terre est plate et que le Soleil tourne autour — contrairement aux apparences —, gageons qu’il y aurait facilement de nombreux “sceptiques” au big bang, à la matière noire, à l’énergie sombre et à tous ces fantômes dominants l’Univers moderne, si ce “consensus” était attaqué. Cela arrivera et c’est logique, puisque le doute est à la base de la science. Mais le danger n’est pas là : c’est que quelqu’un ne “le sente pas” et que les autres “y croient”.  

Alain Cirou


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