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Grand Théâtre de Genève: un sauveur sans thunes

Publié le 29 novembre 2007 par Kalvin Whiteoak

On vient d'apprendre l'arrivée du messie et gentleman Tobias Richter qui devra reprendre depuis 2009 le Grand Théâtre en main. Beau profil, belles capacités, jolie trouvaille que cette nouvelle tête pensante et agissante. Mais que va donc pouvoir faire ce pauvre nouvel arrivant avec le départ de fait ou annoncé de tous les soutiens de poids comme la Fondation Wilsdorf ou de la Banque Safra et de leurs futurs collègues de fuite comme certaines grandes familles qui ont également suffisamment mis la main au porte-monnaie en abondant de largesses réitérées en faveur de cette institution misérablement mal gérée et furieusement élitaire.

Car finalement, hors la question de la qualité des spectacles donnés ou à venir et celle de la gestion du Grand Théâtre à Genève, c'est le problème du financement de la culture qui est en cause, en particulier cet horrible système d'arrosoir antédiluvien mal contrôlé par des fonctionnaires mous et sans culture, le tout sous la houlette d'un conseiller administratif triste, bien qu'accordéoniste, mais soupe au lait comme un pou. On se moque volontiers de ce côté du Jura de la marotte française des Etats généraux sur tout et rien. Il y aurait toutefois quelque chose de ce type à tenter à Genève, pour rendre aux différents acteurs une certaine liberté de création, voire pour certains la simple mais ô combien nécessaire possibilité de créer.

Nos admirables édiles n'ont pas leur pareil pour gérer le quotidien, c'est si simple, mais quand il s'agit de faire avancer des idées voire de les renouveler, alors on tombe dans le psychodrame politico-comique. Savez-vous que pendant que certains acteurs du monde culturel genevois ne voient jamais un centime d'aide, d'autres acteurs, comme certain choeur de très ancienne époque et qui ne chante plus qu'une fois tous les tremblements de terre sans aucun public continue de recevoir annuellement des dizaines de milliers de francs de subvention qu'il utilise on ne sait trop pour quoi. Ose-t-on parler vraiment chiffres concernant le Grand Théâtre ? sait-on que son maintien sous perfusion représente des paquets de millions par an ? est-il raisonnable de vouloir ainsi stratifier l'aide culturelle pour la réserver à une élite qui vit finalement en vase clos.

On se dirait un peu au temps des Romains et des loges dans le Colisée. Du pain et des jeux disaient leur empereurs, et la position des autorités fait un peu penser à celles des césars. La haute bourgeoisie genevoise vient payer des sommes folles pour applaudir à tout rompre des créations d'Olivier Py ou autres occultistes à la mode auxquelles personne ne comprend vraiment grand chose, l'essentiel étant d'en être, d'y être aperçu, d'y exhiber son immodeste personne aux entractes, le reste finalement n'étant qu'accessoire. Cette population qui paye cher reçoit ainsi en retour une sorte de possibilité élitaire de faire la fête entre elle, tout en payant simultanément aussi beaucoup d'impôts … drôle de cercle vicieux.

Pendant ce temps, de jeunes créateurs reçoivent péniblement un "cachet" de Fr. 100.– pour avoir pu se produire lors de la Fête de la musique (après examen officiel de la qualité de leur prestation …) alors que tout le reste de l'année, ils ne peuvent même pas répéter dans des locaux dignes de ce nom. On ne peut pas tout faire à la fois, et dans le domaine culturel genevois et celui de son financement, un profond aggiornamento est nécessaire, faute de quoi les plus belles têtes pensantes ne pourront redonner aucune couleur à certains organismes et la misère continuera de guetter toute une série de pans culturels, complètement oubliés par les édiles. Un jardin est beau s'il contient une grande variété d'espèces, toutes arrosées avec la juste mais nécessaire quantité d'eau. Redonnons de la place aux espèces disparues et tranchons dans celles qui végètent en terme de création voire qui s'évanouissent, ou ne sont là que comme de vulgaires alibis vitrines d'une Genève internationale qui ne saurait se passer d'un Opéra.


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