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Liban : quand la vendetta fait la loi

Publié le 02 mai 2010 par Delphineminoui1974

ketermaya.jpgLa violence du crime commis, cette semaine, est insoutenable. Celle des moyens utilisés pour le venger encore plus. Tout s'est passé vite, si vite que les Libanais peinent à trouver les mots pour exprimer leur émotion. Il y a quelques jours, un grand-père, une grand-mère et leurs deux petits enfants sont sauvagement tués dans leur demeure du village de Ketermaya, au Sud Est de Beyrouth.

Jeudi, le présumé meurtrier, Mohammad Moslem, de nationalité égyptienne, est alors reconduit par les policiers libanais sur les lieux du crime.

Mais les villageois décident de s'emparer aussitôt de l'affaire. Ils encerclent les voitures des forces de l'ordre, en extraient l'homme et se mettent à le tabasser. Moslem est alors poignardé, déshabillé et traîné dans la poussière avant d'être pendu à l'aide d'un croc de boucher et d'une corde. Les vidéos de la scène, filmée par téléphone portable, se mettent à inonder l'Internet. Le soir même, de nombreuses télévisions libanaises diffusent les images de l'horreur... Outrée, une mère de famille me confiait, hier, qu'elles auraient pu s'en passer.

Un voile d'émotion et d'incompréhension, provoquée par le double crime, recouvre aujourd'hui le Liban. La population est indignée. Les uns après les autres, les responsables politiques expriment, eux aussi, leur désolation. Car cette tragédie soulève de nombreuses questions : Ce deuxième crime aurait-il pu être évité ? Est-il normal que des citoyens puissent si facilement décider de faire justice eux-même, en recourant à des pratiques aussi barbares ? N'est-ce pas le signe de la fragilité - voir de l'absence, osent dire certains - de la notion d'Etat au Liban ?

« Au-delà de la colère et de la mortification engendrées par la quadruple horreur signée Mohammad Moslem, les habitants de Ketermaya ont commis l'indicible et l'impardonnable parce qu'il devaient sans doute être intimement persuadés qu'au Liban, l'Etat ne rend justice qu'une fois sur dix, ou alors bien trop tard, et que cela fait des décennies qu'ils sont nourris, gavés à la louche, comme tous les autres citoyens, de logique d'impunité », souligne Ziyad Makhoul dans les pages du quotidien libanais francophone L'Orient Le jour.

Outrés, des internautes ont même créé une page spéciale « Liban, qui es-tu ? Ketermeya ! », en demandant que les personnes suspectées d'être impliquées dans le second crime soient interdites d'entrer l'espace Shengen.

(Crédit photo : AFP)

 


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