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De la nudité dans le football

Publié le 07 mai 2010 par Atango

Toute cette matinée, ma voisine de bureau n'a pas quitté des yeux cette page du journal Vanity Fair qui montre une brochette de footballeurs au torse dénudé. La même voisine de bureau n'avait pourtant pas beaucoup réagi à la photo de Ngando Picket, que j'ai faite l'autre jour à la station Chatelet-Les-Halles. Pourtant, Eto'o et Ngando portent les mêmes couleurs non ?

En tout cas, pendant qu'elle se rinçait l'œil, moi je réfléchissais sur le thème de la nudité en général, en particulier celle des "people" que sont devenus les joueurs de football. D'abord un petit rappel historique, avant de parler art, philosophie et sociologie du sport.

Au commencement, la Grèce

Grâce à l'extrême compétence des dirigeants de ce monde, les Grecs auront bientôt perdu jusqu'à leur dernière chemise. Mais il faut savoir que, dès l'Antiquité, ce peuple a pris l'habitude de montrer et de célébrer sa nudité. La statuaire grecque antique révèle d'ailleurs ce fait social qui était tout à fait banal : les hommes allaient nus. Aristophane, dans l'un de ses textes, conseille ainsi à un jeune éphèbe d'avoir toujours "le teint bien vermeil, les épaules larges, le torse musclé, la fesse dodue, la verge menue." En effet, si les Grecs allaient nus, ils trouvaient indécent que l'on exhibât un sexe turgescent. Le curseur de la morale était simplement placé plus bas, si j'ose dire…

 

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S'habiller pourquoi ?

Pour le reste, il semble évident que les premiers hommes vivaient nus, et qu'ils ont dû ensuite se vêtir au fur et à mesure que l'évolution leur faisait perdre le système pileux qui les protégeait du froid. Vint ensuite "la civilisation" et "la morale", qui sont le propre de l'Homme, et qui ont fait du vêtement une exigence sociale, refoulant la nudité dans le domaine de l'interdit. La nudité est donc devenue rare, donc extraordinaire, au sens premier du mot. Or, ce qui est extraordinaire attire l'attention, CQFD.

Se déshabiller, qui en a le droit ?

Les enfants, certains "people" et certains fous ont ceci en commun : ils sont hors du cadre de la normalité. Ils peuvent donc se dénuder, avec la garantie d'attirer l'attention à tous les coups. Que l'on m'entende bien : je n'ai pas dit que les artistes et les grands sportifs étaient des enfants ou des fous, même si parfois l'on s'interroge... Mon propos est de tracer la limite entre le vulgum pecus qui est soumis à la censure morale et ceux qui ont le privilège de sortir de ce carcan normé.

En ce qui concerne les footballeurs, ils ont de toute façon tendance à se déshabiller à la moindre occasion (un but marqué, par exemple). A tel point que la FIFA, cette grande prude, s'est crue obligée de légiférer : tout buteur qui s'oublie à exhiber sa poitrine aux (télé)spectateurs(trices) sous prétexte qu'il vient de scorer est désormais puni d'un carton jaune… Au grand dam de ma voisine de bureau.

Mais Sepp Blatter n'a rien pu faire cette fois-ci, les torses se sont dénudés dans le secret feutré des studios. Et de toute façon, c'était gratuit et bénévole : les deux mots qu'il faut prononcer pour faire fuir n'importe quel représentant de "l'instance faîtière du football mondial."

 

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Publicité et lubricité

Or, certains de ces joueurs se sont déjà déshabillés pour mettre au chaud leur compte en banque. On pense notamment à une publicité restée célèbre de Puma avec Samuel Eto'o. En passant, Sammy va devoir indiquer à Ngando Picket comment on fait respecter son droit à l'image.

Des nos jours, les métiers de la publicité ne sont pas une sinécure : il est de plus en plus difficile de capter l'attention de terriens gavés d'images et saturés d'informations. Chaque publicitaire de cette planète est ainsi à la recherche du Graal : l'image choc, celle qui va créer le buzz. Le nu apparaît ainsi comme un filon intéressant : qu'il scandalise ou qu'il séduise, il fait toujours jaser dans les chaumières et dans les palaces. C'est tout ce dont les agences de publicité ont besoin.

Pour finir, je vous demande pour une fois de me croire sur parole. J'avais prévu d'illustrer cet article d'une photo de moi-même, nu et livré à l'attention des passants dans la rue. Mais la chose s'est révélée impossible à réaliser : il fait trop froid à Paris aujourd'hui. Et de toute façon, je ne suis ni un fou ni un "people". Du moins pas encore.


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