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QUI? QUI? QUI? Gary Victor écrivain haitien Par Gary Vic...

Publié le 11 mai 2010 par 509
QUI? QUI? QUI?

QUI? QUI? QUI?

Gary Victor écrivain haitien
Par Gary Vic...

Gary Victor écrivain haitien

Par Gary Victor
De nouvelles répliques ont été ressenties lundi après-midi à Port-au-Prince, comme pour nous rappeler qu'on aurait tort déjà de tout oublier pour que nous nous acharnions encore dans nos attitudes et nos comportements suicidaires. On a beaucoup parlé, après le séisme du 12 janvier, d'année zéro, d'une possibilité maintenant de repartir sur de nouvelles bases. Mais on ne repart pas sur de nouvelles bases, quelle que soit l'ampleur de la catastrophe, si on n'identifie pas sereinement les causes de cette fragilité qui a permis la destruction.
Quelques semaines après le 12 janvier, il est malheureux de constater que beaucoup persistent encore dans des pratiques qui ont à voir avec nos longues habitudes de survie individuelles toujours préjudiciables à l'intérêt collectif. Des élans apparemment patriotiques sont motivés, au fond, par des intérêts purement égoïstes. Dans l'incapacité de notre société de produire des hommes d'État avec une conscience aiguë de notre devenir, la communauté internationale ne peut que proposer des plans suspendus dans les airs, dont une grande partie restera voeux pieux sous prétexte qu'aucun projet concret n'aura été présenté par nos dirigeants. Car, il faut bien l'admettre, rien ne risque de marcher du côté national si les traditionnels ripoux ne perçoivent pas des avantages immédiats et tangibles, puisque là est leur seul intérêt, la population haïtienne n'ayant toujours été pour eux qu'une variable insignifiante, pour ne pas dire inexistante.
Aussi les nationalistes aujourd'hui se retrouvent pris dans un cercle vicieux où ils ne peuvent s'agiter qu'en s'enfermant dans le cadre étroit d'une rhétorique de toujours. On admet que le pouvoir en Haïti est corrompu, incapable de gérer ladite reconstruction, mais en même temps on ne doit pas donner à l'étranger l'autorité de gérer cette reconstruction. Il faudrait alors penser un autre cadre pour le pilotage de cette reconstruction. Mais à chaque fois qu'on a pourfendu un pouvoir en Haïti, c'était pour permettre à d'autres ripoux de venir s'asseoir à la table. Serait-ce une malédiction ou quelque part, dans nos pensées, dans nos pratiques, se trouverait ouverte une quelconque trappe pour évacuer constamment les tentatives de sortir des rails de la sclérose ?
Il faut admettre en premier lieu que nos gouvernements ne sont que l'expression du malaise de tout notre corps social, l'expression de cette corruption que toute notre société accepte comme normale, comme une pratique qui, refusée par quelqu'un, fait de lui un renégat, un imbécile aux yeux de ses pairs et de sa famille. La ségrégation cultivée au haut de l'échelle sociale est vécue et intériorisée même dans les couches les plus basses de la population. Le mépris de nous-mêmes, le mépris de l'autre, le mépris de la vie est devenue la norme, que ce soit chez lesdits ignorants que chez les dits instruits, même en terre étrangère.
D'où la nécessité du renouvellement du matériel humain haïtien tout simplement. D'où la nécessité de faire de l'éducation la priorité pour qu'on puisse bâtir un autre pays, et non pas rebâtir, ce qui sous-entend que le sphinx crasseux que nous connaissions renaisse de ses cendres. Mais là encore, nous sommes dans le cercle vicieux. Qui va concevoir cette nouvelle politique pour l'éducation ? Qui aura intérêt à ce que nous ayons un autre matériel humain qui n'ira pas prendre des bains de piscine ou nous choisir ces horreurs que nous avons toujours connues comme dirigeants depuis que cette nation existe ? Qui ! Qui ?
Gary Victor, écrivain haitien 

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