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Danny Godinez : "L'avantage d'être un autodidacte"

Publié le 04 décembre 2007 par Titus @TitusFR
Nous avons déjà beaucoup parlé sur ce blog du passage remarqué de Pura Fé et Danny Godinez sur la petite scène de Cast, le 23 novembre, dans le cadre des soirées Vaches Folks. Nous étions invités, le lendemain, à rencontrer les artistes chez l'un des organisateurs, Roger Mauguen. Une opportunité en or de poser quelques questions au guitariste virtuose Danny Godinez, qui accompagne Pura Fé depuis un an et demi et qui a, au nombre de ses projets, le désir d'enregistrer un premier album solo.
Titus - Peut-on évoquer rapidement tes origines ?
Mon père, bien qu'étant né au Texas, était Mexicain d'origine; c'était un militaire. Ma mère, quant à elle, est née en Corée. Mes parents ont eu trois fils; je suis le cadet. Je suis né en Virginie, mais j'ai aussi vécu en Corée et en Allemagne avant de revenir aux Etats-Unis, dans le Maryland, d'abord, puis à nouveau en Virginie à partir de 1966. J'ai fini par m'établir à Seattle, dans l'état de Washington. C'est là que je vis depuis 1996.
Titus - Te souviens-tu de la première fois qu'une guitare, ton instrument de prédilection, t'est tombée entre les mains ?
Autant que je m'en souvienne, je n'avais que neuf ans et mon frère aîné voulait m'acheter une guitare. C'était en Corée, en 1979. Dans un magasin, il y avait cette guitare acoustique blanche, une Yamaha, sur laquelle j'ai immédiatement flashé. De retour à la maison, mon frère, qui avait 16 ans à l'époque, a commencé à m'enseigner quelques accords. Malgré son départ à l'armée deux ou trois ans plus tard, je n'ai jamais arrêté la guitare... En fait, il a continué à m'encourager en m'envoyant des disques parce qu'il voulait que je persévère.
Titus - Tu te souviens de certains de ces disques ?
Ah oui ! Il y avait Jeff Beck ou encore le groupe canadien Rush. Je m'asseyais pendant des heures pour essayer de reproduire les plages de guitares. Bien qu'ayant un père mexicain et une mère coréenne, je dois dire que mes influences musicales sont avant tout américaines !
Titus - Tu es donc un vrai autodidacte ?
On peut dire ça. Je ne comprends pas trop comment cela s'est fait... Il m'a fallu beaucoup écouter dans un premier temps avant que je ne parvienne à dupliquer ce que j'entendais. C'est très vite devenu une véritable obsession ! Il y a des avantages d'être autodidacte : plus de liberté notamment. Mais il ne faut surtout pas prendre exemple sur moi ou étudier mon jeu, tellement alambiqué ! Je ne peux toutefois pas m'empêcher de regretter, parfois, de n'avoir jamais suivi un seul véritable cours de musique de ma vie. D'autant que j'ai aussi à présent des élèves à Seattle. Le plus jeune n'a que onze ans.
Titus - A quel âge as-tu pensé que le métier de guitariste était fait pour toi ?
Je ne suis devenu musicien professionnel qu'à partir de 2001. Avant ça, je travaillais dans l'informatique. Ca a donc été un cheminement assez intéressant...
Titus - Tes connaissances en informatique ont dû être précieuses pour développer ton style de prestation scénique. Avec toute l'électronique qui t'entoure sur scène, tu es un véritable homme orchestre...
En fait, j'ai commencé assez jeune à expérimenter les "loopers", ces pédales d'effets qui permettent de reprendre en boucle certaines plages que l'on joue. J'ai essayé ça pour la première fois en 1977. Je trouvais ça fascinant de pouvoir ainsi créer un fond musical sur lequel il m'était possible d'improviser d'autres solo. A l'époque, je ne savais pas trop ce que j'en ferais. En 2004-2005, le groupe au sein duquel j'évoluais s'est séparé. Comme j'ai commencé à jouer en solo, c'est là que j'ai réalisé tout l'intérêt des "loopers".
Titus - Peux-tu nous parler du groupe que tu pilotais ?
C'était mon propre groupe, le Danny Godinez Band. Nous avons publié deux albums. Nous étions basés à Seattle mais nous donnions des concerts à l'échelle des Etats-Unis. En quatre ans, nous nous sommes représentés environ un millier de fois. Quand j'ai décidé de mettre un terme à cette expérience, j'ai joué pendant quatre ans avec Michael Shrieve, le batteur de Carlos Santana. Ce fut une expérience assez incroyable. J'avais encore en mémoire les fabuleux solos de batterie de Michael à Woodstock, au côté de Santana. Il était l'une de mes idoles depuis fort longtemps ! Partager la scène avec lui, c'était donc quelque chose de très spécial ! Il m'a donné un sacré coup de pouce, en tant que musicien... Aussi bien du point de vue de l'écriture que de l'enregistrement en studio.
Titus - Quelle était ton intention, en te lançant en solo ? Tu voulais faire carrière en tant que chanteur et guitariste ?
Au début, je n'étais pas vraiment sûr. J'expérimentais pas mal. Les choses suivent tranquillement leur cours. S'il fallait me ranger dans une catégorie, je dirais que ce que je fais aujourd'hui est de la folk expérimentale. On y trouve beaucoup d'influences, latine, jazz, bluegrass, voire psychédélique... J'ai récemment joué en Allemagne et quelqu'un m'a dit que certains de mes solos avaient même un petit côté techno...
Titus - Quand as-tu commencé à accompagner la chanteuse amérindienne Pura Fé ?
Je l'ai rencontrée en février 2006 et nous n'avons cessé, tout depuis, de jouer, écrire et enregistrer ensemble.
Titus - J'imagine que tu la connaissais avant votre rencontre ?
Absolument. J'étais un grand fan de sa musique depuis fort longtemps. Je m'étais dit que ça pourrait être intéressant d'essayer de travailler avec elle, pour voir où ça nous mènerait. Je n'avais pas d'attente particulière. J'étais arrivé à un point de mon parcours où il me semblait important de collaborer avec un maximum d'artistes. Très vite, la magie a opéré avec Pura Fé. Nous nous complétons bien. Durant cette tournée européenne, nous avons continué à travailler sur de nouvelles pièces. Nous verrons ce qui en sortira.
Titus - Tu as écrit la musique de plusieurs morceaux sur le second opus de Pura Fé, "Hold the rain", notamment le très beau "Let heaven show"...
Oui, j'ai écrit la musique de deux morceaux sur cet album, qui est très acoustique dans l'ensemble. Pour le premier album de Pura Fé, "Tuscarora Nation Blues", l'enregistrement s'était déroulé dans des conditions proches du direct. Ici, il y a eu beaucoup de travail en studio : beaucoup d'overdubs. L'enregistrement de la chanson "Summertime" a nécessité à lui seul plus d'une centaine d'heures. Nous n'étions pas satisfaits des deux premières versions, alors on ne les a pas gardées. Pura Fé est extraordinaire en studio; j'ai beaucoup appris à ses côtés. C'est quelqu'un qui est perpétuellement en mouvement : elle se réinvente sans arrêt ! C'est génial de pouvoir évoluer au côté de quelqu'un de son calibre. (Pura Fé nous a rejoints à la table il y a quelques minutes; les propos élogieux de Danny la mettent dans l'embarras : "I need to walk away" (Il vaut mieux que je m'éloigne), lance-t-elle, dans un grand éclat de rire, ndr) Nous avons enregistré l'album dans le sous-sol aménagé d'une maison à Seattle. Comme il pleut souvent là-bas, nous avons été inondés à deux reprises... Ca nous a un peu retardé, mais en dehors de ces petites déconvenues, tout s'est bien passé. On s'est pas du tout chamaillé !
Let heaven show, musique de Danny Godinez et voix de Pura Fé :
Let Heaven Show
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Titus - La symbiose semble aussi très nette entre vous deux lorsque vous êtes sur scène...
C'est vrai, et heureusement, car une tournée n'est jamais de tout repos. On voyage sans arrêt, avec un agenda toujours très serré, mais en même temps, c'est très gratifiant ! Pura Fé travaille avec une très bonne équipe en France. Et nous avons été formidablement accueillis un peu partout. Les gens semblent vraiment adorer sa musique, ce qui ne me surprend pas ! Je suis content pour elle. Maintenant, nous avons hâte de passer à l'enregistrement d'un nouvel album.
Titus - En marge des chansons de Pura Fé que vous interprétez en duo, tu joues aussi, à chaque spectacle, tes propres morceaux...
Oui, c'est Pura Fé qui me l'a proposé et c'est tout à son image. C'est quelqu'un de très généreux. Elle me donne ainsi carte blanche, chaque soir, durant l'intermède. Je joue mes propres compos, mais aussi quelques reprises. Pour la première fois en France, hier soir (le 23 novembre à Cast, ndr), j'ai même joué un morceau des Pink Floyd. J'ai beaucoup apprécié l'accueil que m'a réservé le public. J'ai trouvé ça cool !
L'hommage de Danny Godinez à Pink Floyd (pas la version castoise cependant, mais allez jusqu'au bout, ça vaut le coup !) :
Danny Godinez
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Titus - Comment entrevois-tu l'avenir à présent ?
Je veux continuer à écrire des chansons et à m'améliorer en tant qu'instrumentiste. En plus de mon travail que j'entends bien poursuivre avec Pura Fé, j'aimerais aussi continuer mon bout de chemin avec Michael Shrieve. Parallèlement, je travaille sur mon projet d'album en solo. On y retrouvera beaucoup de choses assez différentes. Il y aura pas mal de guitare, naturellement, mais aussi des chansons; j'y inviterai probablement Pura Fé... J'aimerais bien qu'il sorte l'an prochain. Ca fait assez longtemps que j'attends ce moment...
Des démos de Danny Godinez, matériel susceptible d'apparaître sur son premier album solo, sont en ligne à son adresse MySpace.
Propos recueillis par Titus et traduits de l'américain (Tous droits réservés).


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