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Tribus et Linchpin : Plaidoyers pour le changement. Un article de Guillaume Lecollinet

Publié le 19 mai 2010 par Diateino

Lorsque les Editions Diateino m’ont proposé d’écrire sur Tribus, j’ignorais encore que nous étions exactement en train d’appliquer le principe de ce livre. Je fais partie d’une tribu, celle des lecteurs de Seth Godin. J’y suis entré presque par accident, ayant découvert cet auteur en regardant la vidéo d’une présentation qu’il avait donnée chez Google en 2007. Comme beaucoup d’autres membres de la tribu, je crois en l’idée que le changement est le fondement du progrès, qu’il n’y a qu’un pas entre conformisme et médiocrité. Seth Godin ne m’a pas demandé de relayer son message, c’est à cela qu’on reconnaît les tribus bien menées : leurs membres véhiculent les idées en lesquelles ils croient.

Nous sommes désormais dans un monde de tribus, une économie de personnes, de croyances et de connexions. Internet est le plus grand outil jamais inventé pour qu’émergent des tribus aux quatre coins du monde, quels que soient leurs objectifs et leur raison d’être. Pourtant, le phénomène des tribus n’est pas nouveau et n’a au fond rien à voir avec l’évolution de la technologie. Si Internet permet bel et bien de rassembler des gens autour d’une idée plus rapidement que jamais, il n’enseigne pas le secret pour les mener. C’est ce que Seth Godin tente de décrypter dans Tribus.

Croire pour croître

Tribus n’est ni une recette, ni un mode d’emploi à appliquer pour devenir un leader. C’est d’ailleurs de ce fondement crucial que le leadership tire toute sa valeur : personne ne peut vous dire comment mener. Il n’y a pas de modèle, pas d’archétype du leader. Ils sont tous différents, et n’ont qu’un seul point commun : ils mènent parce qu’ils croient en quelque chose, parce qu’ils le veulent et qu’ils l’ont choisi.

Le leadership serait donc, d’après Godin, avant tout une affaire de choix. Dans Tribus, Seth Godin ne nous parle pas d’autorité, de charisme ou de techniques de direction. Il y est question de foi et de croyances, d’ordre établi et d’hérétiques. Les meneurs sont ceux qui font preuve d’une foi inépuisable en une idée nouvelle, qui parviennent à trouver d’autres personnes ayant des croyances similaires et de les connecter entre-elles. Partout dans le monde, des idées rassemblent des tribus, et lorsqu’elles trouvent leur leader, elles deviennent des mouvements.

La notion de mouvement est d’ailleurs fondamentale dans Tribus. Le mouvement sous-entend que l’on quitte un état statique - le statu quo, dirait Godin - pour provoquer une situation nouvelle. Autrement dit, le mouvement repose sur le changement. La différence entre les leaders et les suiveurs serait cette capacité à provoquer le changement, à contester l’ordre établi. Ce serait également la raison pour laquelle les vrais meneurs sont si rares : affronter le statu quo est l’une des choses les plus effrayantes qui soit. Pourtant, Seth Godin le répète depuis La Vache Pourpre : dans un monde qui récompense ce qui est extraordinaire, remarquable et nouveau, rester prudent en jouant la carte du conformisme est désormais la stratégie la plus dangereuse.

Mener avec foi un mouvement qui brise l’ordre établi n’est donc pas seulement une expérience enrichissante, c’est également selon l’auteur la stratégie la moins risquée pour quiconque souhaite se lancer dans un projet, pour ne pas dire la seule qui soit viable.

Penser à contre-courant

Tout au long du livre, les exemples de personnes, qualifiées d’”hérétiques” par Godin, qui sont parvenues à mener une tribu par la rupture ne manquent pas. En voici un bien connu qui n’est pas tiré du livre :

Aux jeux olympiques de 1968 à Mexico, tous les athlètes de saut en hauteur pratiquaient ce qu’on appelle le “saut ventral”. Tous, sauf un. Cet homme s’appelait Dick Fosbury. Son secret, c’était de sauter à l’envers, ce qui a l’époque était une hérésie totale. Sa technique lui a pourtant permis de devenir champion du monde cette année là. Quarante ans plus tard, le saut ventral a disparu et la plupart des athlètes pratiquent le “Fosbury Flop” dans le monde entier. Dick Fosbury n’était pas le seul athlète à être capable de sauter à plus de 2 mètres de hauteur. C’était simplement le seul “hérétique” capable d’imaginer qu’il pouvait y avoir une meilleure façon de sauter que celle qui lui avait toujours été enseignée.

J’aime beaucoup cet exemple, car il mêle l’idée du changement avec la nécessité de l’effort requis pour l’imposer. Mener demande un effort considérable, car cela implique de combattre la résistance au changement (celles des autres et la sienne). D’après Godin, le leadership n’est pas une qualité innée : c’est une forme de volonté que l’on acquiert en refusant l’immobilisme ambiant, quelle que soit le domaine dans lequel notre foi se manifeste. Accepter l’idée que l’hérésie est la meilleure stratégie est le premier pas vers le choix de devenir un leader.

Plaidoyers pour le changement

Je crois d’ailleurs pouvoir dire sans me tromper que le statu quo est décidément l’ennemi juré de Seth Godin. Dans Linchpin, son nouveau livre qui paraît cette semaine en France, il y analyse avec une lucidité remarquable les peurs qui paralysent tout processus de changement. A posteriori, il est évident en lisant Tribus que l’auteur avait déjà en tête l’idée de son prochain livre, mais qu’il n’en avait peut-être pas encore tout à fait mesuré l’ampleur.

Si Tribus est une véritable invitation au changement, Linchpin est un manifeste pour la prise de contrôle de sa propre vie professionnelle et personnelle. Le principe de Linchpin est aussi simple que celui de Tribus : il est désormais plus opportun (et bien plus amusant) de créer ses propres règles que de suivre sagement les instructions. Les linchpins, nous dit Godin, sont des personnes capables d’imaginer de nouvelles façons de faire, de relier les gens, d’imaginer comment résoudre des problèmes que personne ne semble vouloir contester. Tout comme les hérétiques décrits dans Tribus, les linchpins sont animés, pas seulement par le désir de réussite ou l’appât du gain, mais par une véritable foi dans ce qu’ils font.

Dans ses deux derniers livres, Seth Godin nous propose une réflexion à la fois troublante et optimiste sur la façon dont nous concevons nos carrières et notre rôle professionnel. Ce sont deux livres qui s’adressent directement aux individus, qu’ils soient chefs d’entreprise, employés de bureau, étudiants…on y trouve des passages d’intérêt public et des messages d’espoir qui s’adressent, au fond, à quiconque aspire à progresser sur le plan personnel et professionnel.

La lecture de ces deux livres réunis n’est pas un guide, c’est une invitation à choisir. Choisir de ne pas succomber à la peur de l’échec, de travailler à quelque chose qui nous importe. C’est cela, au fond, que Seth Godin tente de nous inculquer : la réussite et le leadership nécessitent du courage, de la passion et de la créativité, trois choses qu’il est beaucoup plus facile de posséder si l’on s’attèle à une mission en laquelle on croît véritablement.

En bon membre de la tribu, je relaie une dernière fois le message : Les leaders, les linchpins, les représentants du changement, les artistes et les hérétiques sont tous la même personne. Ce pourrait être vous, si vous le choisissez.

Guillaume Lecollinet est l’auteur d’Ikôn, un blog qui traite du marketing, du rayonnement des marques et des personnes.


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