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John Burdett, Bangkok Tattoo

Publié le 20 mai 2010 par Argoul

Nous retrouvons l’inspecteur thaï Sonchaï, de la police de Bangkok, accessoirement partenaire d’un claque tenu par sa mère le soir. Ni le bien, ni le mal ne sont clairs en Asie où tout est nuances. Ainsi le sexe est-il joyeux, tout au rebours du puritanisme yankee. L’histoire commence rituellement par le meurtre d’un grand Américain – évidemment espion – dans une chambre d’hôtel avec une fille – évidemment prostituée.

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Mais le schéma simpliste qu’on imagine ne saurait être selon nos habitudes. Il est bien sûr que le colonel de police, parrain de la prostituée, veut étouffer l’affaire. Il est clair que l’ennemi militaire de la police cherche à le faire tomber. Il est inévitable que la CIA soupçonne Al-Quaida puisque la Thaïlande a des marges musulmanes. Mais tout est illusion. Bangkok se déploie dans son chatoiement asiatique. Tout est nuances et porté par le karma, cette accumulation de bienfaits permettant d’accéder à la fin des réincarnations.

L’auteur joue avec ses personnages aux caractères attachants bien dessinés. Vous avez Chanya, paysanne futée qui sait se faire aimer des hommes sans compromettre son esprit, tout en calculant combien financer un hôpital pour soigner des malheureux peut lui faire gagner de bienfaits pour contrer ses turpitudes sexuelles. Apparaît Lek, le doux adjoint de 18 ans tout frais sorti de l’école de police, qui se demande s’il est garçon ou fille et adore danser. Le colonel Vikorn joue tous les rôles, avec une subtilité politique inégalée. Un imam musulman et son fils, sont contrastés comme le noir et le blanc, mais transcendés par l’amour filial et la sagesse infinie d’Allah. Un otaku japonais, autiste informatique depuis tout petit, dessine divinement des tatouages sur la peau avec des aiguilles de bambou traditionnelles. Sonchaï l’inspecteur né de pute et de Yankee tombe amoureux et va peut-être enfin rencontrer son vrai père, avocat américain qui l’a conçu lors d’une permission du Vietnam. Et qui diable est Don Buri ?

L’intrigue et bien amenée, embrouillée à l’asiatique et contée d’un ton léger. L’humour entrelace la tragédie et offre de savoureux aperçus des contradictions thaïs comme des blocages yankees. Les chapitres sont ainsi égrenés par des intermèdes édifiants où Pisit, la vedette de la radio Rod Tit FM, invite des personnalités à débattre des questions sociales de Thaïlande. Le journal de Chanya ouvre des abîmes de réflexion sur l’aspect chevalin des executive women américaines qui – en oubliant d’être femmes - incitent les mâles à aller voir ailleurs ou à sombrer dans la psychose. Bouddha reste omniprésent, indulgent et sage, orientant la spiritualité de tous les actes, même ceux en apparence les plus sordides.

A savourer comme une soupe Tom Yam après une mise en appétit de sauterelles grillées ! Et qui vous changera de l’actualité sanglante de la Thaïlande en guerre civile partisane de ces jours derniers.

John Burdett, Bangkok Tattoo, 2005, 10-18 juin 2009, 381 pages, 7.51€


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