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"Les Orientales" à la maison de Victor Hugo

Publié le 04 juin 2010 par Louvre-Passion

O sultan Nourredin, calife aimé de Dieu !

Tu gouvernes, seigneur, l’empire du milieu, (…)

Ton front porte une aiqrette et ceint le turban vert.

Tu peux voir fôlatrer dans leur bain, entre’ouvert

Sous Ia fenêtre où tu te penches,

Les femmes de Madras plus douces qu'un parfum,

Et les filles d'Alep qui sur leur beau sein brun

Ont des colliers de perles blanches.

Victor Hugo - Le poète au Calife – Les Orientales

affiche orientales

Dans le cadre de mes escapades périodiques hors du Louvre, je vous emmène à la maison de Victor Hugo située place des Vosges dans le 4e arrondissement. Le poète y vécut de 1832 à 1848 dans un appartement situé au second étage d’un hôtel particulier transformé en musée en 1902. On peut y visiter en ce moment une exposition autour des « Orientales » un recueil de poèmes publié par Victor Hugo en 1829.

Le début de la visite nous montre que le thème de ce recueil n’est pas tout à fait un hasard, en ce début du XIXe siècle l’Orient est « tendance ». Le souvenir de l’expédition en Egypte de Bonaparte est encore très présent dans les esprits grâce au succès de l’ouvrage « Voyage dans la Basse et Haute-Égypte » (1802) de Vivant Denon. En 1811 Chateaubriand raconte son périple en Grèce, en Turquie et à Jérusalem dans son « Itinéraire de Paris à Jérusalem », dans le même temps l’écrivain anglais Lord Byron établit sa réputation en publiant, en 1812, les deux premiers chants du « Chevalier Harold », inspirés de son voyage en Méditerranée et en Orient. Qu’il s’agisse des écrivains, des peintres ou des dessinateurs, leur vision de « l’Orient » est encore confuse et marquée par des clichés : les pyramides, le désert, les harems…

Mais surtout c’est l’insurrection de la Grèce, alors province de l’empire Ottoman, qui occupe les esprits. Commencée en 1822, elle suscite aussitôt un courant de sympathie dans l’opinion européenne alors que les gouvernements se gardent bien d’intervenir. Tout change à l’avènement du nouveau Tsar de Russie, Nicolas Ier, bien décidé à utiliser à son profit la révolte Grecque. L’Angleterre qui ne veut pas d’une Russie trop influente dans cette région juge habile de s’associer au Tsar et d’entraîner le gouvernement français. En 1827 les trois puissances envoient des vaisseaux de guerre qui détruisent la flotte turco-égyptienne dans la rade de Navarin au sud ouest de la Grèce et les Russes s’emparent de la grande ville d’Andrinople. Le sultan ottoman est contraint de signer un traité en 1829 qui, entre autres choses, reconnait la création d’un état Grec indépendant. Ces épisodes sont abondamment traités par les artistes à l’exemple du « Jeune Grec défendant son père » d’Ary Scheffer ou de l’ « Episode de la guerre d’indépendance de la Grèce en 1827 » de Friedrich Bouterwerk, (où l’explosion d’un bateau Turc lors de la bataille navale de Navarin semble causée par une charge nucléaire !). On passe ensuite à l’Orient des voyageurs, notion toute relative puisque à l’époque on est encore très loin du « tourisme de masse », Hugo lui-même n’a fait que lire des récits.

La dernière partie de l’exposition « Captives, baigneuses, sultanes… » montre qu’à l'époque l’Orient a une forte connotation érotique chez les artistes européens. L’affiche de l’exposition joue d’ailleurs sur ce thème puisqu’il s’agit de « Intérieur de harem, Femme de Constantine sortant du bain » de Théodore Chassériau. La vogue des nudités sensuelles à laquelle s’est adonné sous les prétextes les plus divers l’art du XIXe siècle est abondamment décliné dans les peintures où les poèmes de Hugo : La captive, La sultane favorite, Sara la baigneuse, Nourmahal la Rousse.

Les Orientales, jusqu’au 4 juillet à la Maison de Victor Hugo Hôtel de Rohan-Guéménée - 6, place des Vosges - 75004 Paris – Entrée 7 €.

Avant ou après la visite je vous engage à profiter du charme de la place des Vosges et du quartier du Marais.


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