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Coup de Coeur: Black Death de Christopher Smith

Par Geouf

Coup de Coeur: Black Death de Christopher Smith

Résumé: 1348. L’Angleterre est ravagée par une épidémie de peste mettant à l’épreuve la foi du peuple. Osmund (Eddie Redmayne), jeune moine novice, est chargé de guider un groupe de guerriers envoyé par l’Eglise  jusqu’à un village isolé mystérieusement préservé. En effet, des rumeurs affirment qu’un nécromancien habite ce village, et qu’il serait responsable de l’épidémie qui frappe le pays…

Après son compatriote Neil Marshall il y a quelques semaines, c’est au tour du réalisateur britannique Christopher Smith de revenir sur les écrans. Et à l’instar de Marshall avec son très moyen Doomsday, Smith se devait de redresser la barre après un Triangle raté, qui se prenait les pieds dans son intrigue à base de paradoxes temporels. Pour son nouveau film, Christopher Smith revient donc au pays et s’attaque cette fois au genre de la fresque médiévale, qui semble faire un retour en force en ce moment, après Robin des Bois de Ridley Scott et avant Season of the Witch de Dominique Sena (au sujet étrangement similaire).

Dès les premières minutes du film, Smith impose à l’écran un Moyen-âge barbare et sale, comme on n’en n’avait pas vu depuis l’excellent La Chair et le Sang de Paul Verhoeven. Impossible en effet de ne pas penser au film du hollandais à la vision de ces rues où s’entassent les cadavres, de ces guerriers sales et sans merci formant une troupe patibulaire. Mais fort heureusement, bien qu’il emprunte aussi à Verhoeven une de ses actrices (la magnifique Carice Van Houten), Christopher Smith trace son propre chemin. Prenant soin d’installer une atmosphère déliquescente de danger perpétuel (tous les personnages peuvent succomber, que ce soit à cause de la peste omniprésente ou des attaques de bandits), il emmène le spectateur dans un voyage au bout de l’enfer. Dans Black Death, la mort est omniprésente (les héros traversent nombre de champs jonchés de cadavres pestiférés et de villes brûlées) et le fanatisme l’emporte sur la raison, faisant presque autant de ravages (n’importe quelle femme peut être accusée de sorcellerie et brûlée vive).

Car Black Death est finalement très loin du simple affrontement barbare entre des guerriers chevronnés et un terrible nécromancien, comme le laissait penser la bande-annonce, et joue en fait sur un tout autre terrain. Grâce à un scénario machiavélique et parfaitement huilé (on n’en attendait pas autant du scénariste du très moyen Wilderness), le réalisateur de Creep cultive tout le long du film une ambiguïté de bon aloi.  Le spectateur se retrouve du coup dans une position très inconfortable, comme le jeune héros du film, et peine à distinguer le Bien du Mal. Les « héros » du film, d’abord présentés comme de valeureux guerriers en mission sacrée, se révèleront bientôt n’être que des fanatiques obtus en quête d’un bouc émissaire (dont un Sean Bean monstrueux), le village étrange pratiquant des cultes païens que les personnages atteignent dans le dernier tiers évoque le fameux The Wicker Man, et nombre de questions surgissent. La prêtresse du village est-elle vraiment une nécromancienne ressuscitant les morts, ou bien n’est-elle qu’un leader charismatique ? Les villageois pratiquent-ils les sacrifices humains ou ne font-ils que défendre leur village contre les assauts des fanatiques chrétiens ? Autant de questions qui trouveront réponse dans un final d’une cruauté et d’une noirceur peu commune, venant enfoncer le clou de cette charge ultra-virulente contre le christianisme. Un revirement culotté amené de main de maître par un réalisateur en pleine possession de ses moyens, et qui emmène le film à un niveau bien supérieur à celui de la « simple » série B bourrine.

Black Death est tout simplement un très grand film, qu’il est difficile de quitter une fois la projection terminée. Avec ce nouvel opus d’une force peu commune, Christopher Smith démontre qu’il n’a plus rien à prouver, et rentre définitivement dans la cour des grands.

Note: 9/10


Royaume-Uni, 2010
Réalisation : Christopher Smith
Scénario : Dario Poloni
Avec : Eddie Redmayne, Sean Bean, Carice Van Houten


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