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Quand Will Ferrell pénètre Michael Youn

Publié le 01 juillet 2010 par Exnight
Quand Will Ferrell pénètre Michael YounQuand vous rencontrez quelqu'un qui partage avec vous l'amour de la comédie américaine, et en particulier sa version contemporaine, celle de Will Ferrell, Judd Apatow, Adam Sandler ou Tina Fey, il y a une question qui pointe inévitablement le bout de son nez dans la conversation. Cette "nouvelle" comédie, cet humour américain est-il transposable en France ? Et si oui, y-a-t'il des films français qui correspondent aux critères de cet humour ?
Des années 80 au début des années 90, l'humour à la mode était celui d'auteurs comme les ZAZ (Zucker/Abrahams/Zucker) qui reposait essentiellement sur un humour parodique, absurde et pipi-caca. C'était par exemple des films comme TOP SECRET, HAMBURGER FILM SANDWICH ou la trilogie des "Y A-T-IL UN FLIC". Et avec quelques années de décalage, cet humour s'est exporté dans nos contrées... avec Les Nuls. De leur émission, directement inspirée du Saturday Night Live à leur "unique" film (LA CITE DE LA PEUR en 1992), Chabat, Farrugia et Lauby se sont imposés - sans trop de mal - comme les héritiers français de Dan Akroyd, Bill Murray et John Belushi. Dans leur façon de faire rire, tout respirait l'humour de leurs collègues (et inspirations) américaines. Ils ne s'en sont jamais cachés.
Ce dont ne se cache pas non plus une certaine "nouvelle génération" de comiques français. Ils le répètent à longueur d'interviews. Ils aiment et aspirent à écrire/réaliser EN FRANCE des comédies "à la Apatow" ou "à la Ferrell". Ils le veulent leur 40 ANS TOUJOURS PUCEAU. Leur RON BURGUNDY. Ils le veulent. A une différence prêt avec leurs aînés des Nuls. Là où les parodies "à la ZAZ" comme Y A-T-IL UN FLIC POUR SAUVER LE PRESIDENT? ont toujours plutôt bien marché en France, ça n'a jamais été le cas des films de Will Ferrell. Jamais. Pour plein de raisons dont j'ai déjà parlé ici.
Il y a d'abord cette façon de parler de sujets purement américains. Les présentateurs télé des années 70 avec RON BURGUNDY. Les championnats de Nascar avec RICKY BOBBY. Les confréries universitaires avec OLD SCHOOL. Le Basket des années 70 avec SEMI-PRO. Autant de sujets qui, blindés à ras bord de références pop souvent incompréhensibles pour la vaste majorité, laissent de marbres la plupart de mes chers compatriotes (mais heureusement pas mes chers lecteurs et lectrices d'amour). Il y a également cette débilité assumée au second (voire au troisième) degré qui passe mal au pays de René Descartes - alors que celle assumée au premier degré passe plutôt bien (voir le succès de VERY BAD TRIP).
Bref, la comédie française, quand elle n'est pas aussi fade, sans imagination et bien pensante qu'une sous-comédie romantique/familiale hollywoodienne (voir les films de Dany Boon et Gad Elmaleh), continue le plus souvent d'emprunter à l'héritage des Nuls avec un humour très parodique et absurde. Ce sont les inégaux mais parfois très réussis films de Kad & Olivier (UN TICKET POUR L'ESPACE) ou de Eric & Ramzy (SEULS TWO). Les deux OSS117 relèvent aussi de cet héritage. C'est ça qui fait rire les Français (de bon goût) au cinéma.
Et il y a Michael Youn. Dire qu'il est mal-aimé est presque un euphémisme - symbole qu'il serait d'un nivellement par le bas de la comédie. Bah oui, chez Michael Youn, ça pète, ça pue, ça vomit et ça fait mal. Quand il débarque dans le PAF en septembre 2000, ça ne ressemble d'ailleurs à rien. C'est du grand n'importe quoi qui emprunte à plein de choses : l'esprit "sale gosse pipi-caca" des Nuls et de DeCaunes/Garcia est transposé dans la réalité crue (le fameux mégaphone et les fesses à l'air) et la provocation gratuite est élevée au rang de mode de vie (Les 10 COMMANDEMENTS et tout ça). Et puis il y a les quelques films "de fiction" (quatre en dix ans) jamais vraiment réussis voire carrément mauvais qui, même s'ils ne sont pas écrits ou réalisés par Youn, portent son empreinte - même si elle n'est que médiatique.
Car ces mauvais films, de LA BEUZE à IZNOGOUD en passant par INCONTRÔLABLE et COURSIER, ne sont ni écrits, ni produits, ni réalisés par Youn. Il en est juste l'acteur. La seule chose qu'on peut donc lui reprocher, c'est d'avoir accepter de jouer dedans. Ce n'est pas rien mais je vous rappelle juste que Gad Elmaleh a co-écrit CHOUCHOU et a co-écrit et réalisé COCO ! Ça, c'est vraiment grave... Mais assez de haine comme ça.
Conscient de cette faiblesse et sûrement lassé d'être assimilé à un bouffon à la solde du grand capital cinématographique français, Michael Youn s'est donc lancé dans l'écriture et la réalisation de son premier film : FATAL. Pression. En tous les cas, moi, j'en aurais eu. Beaucoup. Car en reprenant un de ses personnages fétiches pour son premier film, il s'exposait énormément. D'abord de faire du "Michael Youn", les blagues habituelles, déjà vues, entendues milles fois à longueur de clips et d'émissions de télé. Ensuite de faire un long sketch laborieux d'1H30. Après tout, c'est arrivé au meilleur d'entre tous, de Mike Myers (WAYNE'S WORLD) à Dan Akroyd (CONEHEAD) qui se sont plus ou moins plantés en reprenant leurs personnages fétiches du SNL. Enfin de ne pas faire rire. C'est con à dire mais une comédie réussie reste le truc le plus dur à faire au cinéma. Ça ne s'improvise pas.
Il est devenu assez évident depuis quelques années que Youn était énormément influencé par le "nouvel humour américain" et en particulier celui de Will Ferrell. Si les deux ne se ressemblent pas du tout physiquement, tous les deux ont depuis longtemps fait de leur corps des machines humoristiques. Michael Youn en se mettant à poil dans la rue avec son mégaphone ou en se transformant régulièrement en bite géante. Will Ferrell en jouant sur son look de géant ahuri et exposant à longueur de sketchs ses bourrelets et son torse poilu. Et tous les deux, grâce à ce corps, se sont créés des personnages emblématiques en élevant leurs bêtises au rang d'art. Ron Burgundy ou Ricky Bobby pour Ferrell. Alphonse Brown ou Fatal Bazooka pour Youn. Et bien, cette influence se confirme avec FATAL.
Pour la première fois dans l'histoire récente de notre comédie nationale, quelqu'un a en effet réussi à faire un film qui peut légitimement se réclamer de Will Ferrell. Je sais d'avance que beaucoup ne seront pas d'accord mais j'assume. A fond. Je les ai tous vus les films de Will Ferrell. Ce mec, je le connais par coeur. Des étoiles dans les yeux, je l'ai fait découvrir à des dizaines de personnes il y a presque 10 ans, à l'époque où il explosait dans le SNL avec les Roxbury Brothers et jouait des seconds rôles comme Mustafa dans AUSTIN POWERS 2, Mugatu dans ZOOLANDER ou Willenholly dans JAY & BOB CONTRE-ATTAQUENT. Ce mec, je l'aime comme on aime un vieux pote qui vous tire des larmes de rire à chaque fois que vous le voyez.
Alors en pleurant aux larmes devant certaines scènes de FATAL, j'ai compris que la France avait peut-être enfin trouvé son Will Ferrell à elle.
D'abord parce que FATAL est une PURE comédie. J'entends par là que le film ne s'embarrasse pas de moral ou d'éléments dramatiques typiques de la comédie familiale hollywoodienne et d'une certaine comédie française soucieuse de plaire à toute la famille (le plus souvent avec Dubosc, Elmaleh et Boon dans les rôles principaux). Comme les films du duo McKay/Ferrell, d'un bout à l'autre, FATAL n'est que déconne, gags et vannes, ne laissant aucune place au sérieux.
Ensuite parce que FATAL retient les leçons du duo américain quand il s'agit de dresser le portrait de personnages "bigger than life" : mieux vaut trop que pas assez. Quand vous traitez quelqu'un d'aussi fou que Fatal Bazooka, un rappeur de Haute-Savoie milliardaire (!), il s'agit justement d'être "plus grand que la vie", d'aller aussi loin que votre imagination vous amène, de pousser les scènes à leur paroxysme comique, sans jamais avoir peur d'en faire trop. C'est la méthode Ferrell avec ses personnages d'Elfe géant et bêta (ELFE), de présentateur télé ultra-machiste (RON BURGUNDY), de pilote de NASCAR égocentrique (RICKY BOBBY) ou de quadragénaire bloqué en enfance (STEP BROTHERS). Il va au bout. Il n'y a pas de limite. Et c'est ce que fait Michael Youn avec FATAL. Il a beau se défendre dans les interviews d'avoir fait un film "tous publics", ce n'est pas le cas. Certes il a du clairement se limiter sur certaines choses mais le fait est là : les quelques parents venus avec leurs jeunes enfants n'ont pas passés la première demi-heure et des hordes de marmos pré-pubères ont été sortis illico de la salle après une scène de sex-tape matée sur écran géant ! Et je n'insiste pas sur la scène de léchage de moule et de sucage de saucisse...
Aussi parce que FATAL n'oublie jamais ses seconds rôles. Comme dans toute bonne production Apatow, ils sont presque plus importants et développés que le rôle principal, notamment le garde du corps incarné par Jérôme Le Banner ou le chanteur electro-pop bio de Stéphane Rousseau. Parfaitement écrits et joués, ils sont absolument jubilatoires dès qu'ils ouvrent la bouche. Voir de tels personnages dans la comédie française d'aujourd'hui, c'est donc réjouissant...et rassurant.
Egalement parce que FATAL est, tout en étant trash, sale gosse et tape-à-l'oeil, d'une tendresse infinie pour ses personnages. Tous ses personnages. Même ceux censés représentés les méchants. Ça peut sembler con à dire mais, en France, on a du mal à "aimer" ses personnages, à rendre ses personnages vraiment attachants. C'est la maladie du drame "à la Française", celui de Desplechin en particulier, qui a tendance à contaminer la comédie. Par peur d'apparaître faible ou neuneu, les auteurs nationaux ont le plus souvent tendance à rendre, à un moment ou à un autre, leurs personnages antipathiques. Les sales cons ont toujours eu un peu de notre faveur. Aussi drôle soit-il, voyez OSS117 par exemple ! Et cette tendresse, c'est le coeur de l'oeuvre de Judd Apatow, Will Ferrell et les autres : ils créent des personnages repoussants, misogynes, grossiers, insupportables mais les regardent avec affection et bienveillance. C'est la BASE même de l'humour américain de ces dix dernières années. C'est ce qui permet de ne jamais tomber dans la vulgarité crasse malgré les blagues sur le vomi et la pédophilie. Et c'est ce que fait Michael Youn avec FATAL...
Enfin parce que FATAL est drôle ce qui, malgré tout ce que j'ai écrit précédemment, n'était pas nécessairement évident. Je concède ici que c'est très subjectif. Après tout, compte tenu du box-office français des films de Ferrell, beaucoup ne trouve pas Will Ferrell drôle. Je ne le comprends pas mais je veux bien l'entendre. Alors je veux bien entendre également que les vannes et gags de la bande-annonce de FATAL en laissent beaucoup sur le côté de la route. A tous ceux-là, je n'aurais qu'un seul conseil : allez vous faire votre propre opinion !
Quant aux autres, à ceux qui connaissent et apprécient l'humour de Ferrell et des autres, qui comprennent que la régression d'une vanne bête et méchante sur le vomi n'est pas réservée uniquement aux QI zéro et qu'elle peut s'avérer aussi fine qu'une réplique d'un Woody Allen inspiré, à ceux-là, je les invite à aller voir FATAL si ce n'est pas déjà faits. Vous pourriez enfin découvrir (par vous-mêmes) que la France, par l'intermédiaire de Michael Youn, s'est enfin faite pénétrer bien profond par Will Ferrell. Et, contrairement à ce qu'en dit la pseudo intelligentsia française (qui préfère clairement enfiler que le contraire), c'est plutôt très agréable ! A bon entendeur...

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LES COMMENTAIRES (1)

Par polo59
posté le 17 janvier à 15:06
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j'ai juste lu rapidos ton post (je vais le relire mieux) mais juste comme ça en passant as-tu trouvé que Chouchou était nul??? (car moi je fais une grosse distinction entre Chouchou: touchant drôle donc qui a un intérêt et COCO, nul a chier j'ai regardé 10 min...) Bonne continuation j'ai lu ton article sur Kick Ass tu n'as pas tord sur certains points, en tout cas il m'a donné envie de lire tout les autres.... cordialement PK