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DURAS, ô désespoir…

Publié le 08 juillet 2010 par Philippe Thomas

Festival du film à La Rochelle, 1

Un film de Marguerite Duras est toujours une épreuve. J’ai voulu m’y confronter encore avec Nathalie Granger, c’est le titre de ce film de 1973, montré en projection unique. La première chose admirable est que pour un film plutôt petit format (une heure 23), on est saisi d’emblée par une impression durative et de vaine éternisation des instants qui confine vite à l’ennui. Curieusement, cette attente d’un événement qui ne vient pas n’est pas parvenue à m’endormir (alors qu’il m’arrive couramment de fermer les paupières sur des images autrement plus dynamiques), du moins durant les quelque 30 à 40 minutes où nous avons tenu bon. Parce que oui, nous sommes partis avant la fin…

C’est que le cinéma de Duras est sans doute un cinéma pour cinéphiles avertis, un cinéma en tout cas très littéraire. J’ai pourtant fait mes humanités, mais cette littérature là est décidément une potion qui ne passe pas. J’étais aussi parti avant la fin pour des Journées entières dans les arbres mais j’avais aimé la moiteur touffue qui émanait d’India song, comme si la mousson indienne avait pénétré la salle. Mais cette Nathalie Granger, une petite fille parait-il violente et musicienne, traversele film silencieuse tandis que les dialogues passent pour la plupart en voix off. Le meilleur est sans doute l’intrusion du voyageur de commerce dans ce monde clos et féminin…

Il s’agit du sketch de Depardieu avec sa vedette à tambour n° 8 qui se heurte à Jeanne Moreau lui rétorquant impitoyablement « Vous n’êtes pas voyageur de commerce ». Malgré le peu d’aménitéperceptible dans la voix de Jeanne, le jeune Gérard (le film est de 1973) continue tant bien que mal son boniment absurde avant de s’apercevoir que la maison est déjà pourvue précisément du modèle de machine à laver qu’il essaie de fourguer… Depardieu n’est pas encore Depardieu, il a alors aussi bien la tête d’un représentant que d’un acteur un peu gauche ou de n’importe quoi d’autre. Il n’est même pas encore le branlou décontracté du gland des Valseuses. Il est étonnant.

Pour le reste, on notera l’intéressant aperçu du parc automobile de l’époque entrevues par les fenêtres de cette demeure d’une petite ville de l’Eure. Les deux femmes débarrassent la table, font la vaisselle, se préoccupent surtout de l’avenir de Nathalie Granger, la petite fille au comportement violent mais qui apprend le piano et dont l’école ne saitplus que faire, bulletins scolaires à l’appui. Le chat de la maison circule sans souci du film qui s’y tourne, la petite fille le portera dans ses bras mais ne lui fera subir aucun sévice, ne lui tirera ni la queue ni les moustaches. Le transistor posé sur la table de la cuisine rompt périodiquement le pesant silence de ce huis-clos pour diffuser des communiqués sur la cavale de deux jeunes tueurs non loin de là… On étouffe, on s’en va. Si quelqu’un veut bien nous raconter la fin…


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