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Fatou Diome - Celles qui attendent

Par Clarac
Fatou Diome - Celles qui attendent
Editeur : Flammarion - Date de parution : août 2010- 334 pages magnifiques et puissantes...
Sur une île où le travail est absent, l’Europe est convoitée par des hommes prêts à l’affronter pour gagner un rivage, une terre qu’ils espèrent meilleurs. Les fils, les maris partent laissant des femmes derrière eux. Ces femme, ce sont Arame et Bougna, mères de Lamine et Issa qui vont partir sous la cape de la clandestinité. Arame est réticente à de départ de projet même si ses dettes chez Abdou le commerçant ne font que s’accroître. L’Océan lui a déjà pris son autre fils et ses petits enfants sont à sa charge. Autant de bouches à nourrir mais qui lui donnent de la joie et la force de vivre ou de survivre « La survie, justement. Partout elle demande un effort, mais il des contrées où l’on côtoie tellement la mort que la survie elle-même semble un pied de nez fait à la vie. Sur ce coin de la planète, où les maigres productions journalières sont destinées à une consommation immédiate, la sérénité du lendemain n’est jamais assurée ».
Bougna est en guerre permanente contre la coépouse de son mari, jalousies de femmes entretenues par la polygamie du mari. Arame supporte son mari Koromâk , cloué au lit par l’arthrose et déversant son fiel. Un mari qu’elle n’avait pas choisi mais avec qui elle doit faire. De toute façon, jamais on ne se plaint ou alors en silence « alors, au lieu de râler devant plus souffreteux que soi, on mord le mouchoir et on trime du matin au soir. Pour beaucoup, vivre se résume à essayer de vivre. »
Lamine et Issa laisseront leurs jeunes épouses Coumba et Daba derrière eux. Bercées de rêves et d’amour comme toute jeune fille, leur quotidien est autre. Les devoirs imposés aux belles-filles ne sont pas de tout repos. Cuisiner, laver, nettoyer pour toute la famille et sans jamais broncher. L’Europe est la femme rivale qui leur a prise leur mari.
Les mères trompent leur peur de ne pas voir revenir les fils, les jeunes épouses attendent la présence de leur mari... Un seul mot pour elles attendre qui se décline au fil des saisons.
Les années passent, Issa et Lamine ne sont toujours revenus. Mais la vie n’attend pas, le fils d’Issa grandit et Daba voudrait connaître l’amour. Issa et Lamine découvrent la condition d’être clandestin en Espagne : la quête aux papiers et au travail.
Derrière les émigrés, les amours varient, les secrets de famille affleurent ; les petites et grandes trahisons vont alimenter la chronique sociale du village et déterminer la nature des retrouvailles.
Le visage qu'on retrouve n'est pas forcément celui qu'on attendait .
De Fatou Diome, j’avais lu « Le ventre de l’Atlantique » et "La préférence nationale et autres nouvelles" . C’est une auteure que j’admire et que j’affectionne.
Avec « celles qui attendent», Fatou Diome nous fait partager l’intimité, le quotidien de ces femmes. Femmes courageuses, femmes de caractère et « parce qu’elles savent tout de l’attente, elles connaissent le prix de l’amour.» Un prix élevé fait de sacrifices.
Fatou Diome, c’est d’abord une écriture exceptionnelle. Chantante comme le fleuve Sénégal, véhiculant un phrasé riche comme une belle musique. Musique dont le tempo s’accorde, se modifie selon la vie des iles du Sénégal. Une écriture qui a la force de l’Atlantique en colère pour s’indigner ou dénoncer.
Pas de jérémiades ou de complaintes, Fatou Diomé décrit avec une verve ardente les travers des situations économiques de ce monde. Quand elle parle de son pays c’est toujours avec amour et avec le recul qui lui permet de pointer du doigt les failles. De son écriture coulent beaucoup de constats amers ou remplis de sagesse mais toujours très justes.
Ce livre est un hymne à ces femmes et on ne peut que se sentir humble et respectueux devant elle.
Un très gros coup de cœur pour ce livre qui fait partie de la rentrée littéraire !

Choisir un seul extrait est difficile car l’ensemble du livre est d’une beauté et d’une puissance incroyable !
« La vie, c’était simplement une barque où elles appréciaient le bonheur de ramer ensemble. Comme toutes les femmes de l’île, elles savaient qu’affronter la houle faisait partie de leur sort. »
Un grand merci à Dialogues croisés et son opération rentrée littéraire 2010 pour cette lecture.
Fatou Diome - Celles qui attendent

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