Magazine Journal intime

Bracelet d'argent...suite et fin

Par Ghizlane

Donc, pour faire suite à l'histoire du bracelet d'argent hérité de Mamy Solange....

l'arborant fièrement à mon bras, me voici dans une famille du Sahara, à Golaa, nomades sédentarisés depuis une génération et dont les ancêtres ont migré du Moyen-Orient à la Tunisie, en vagues successives depuis l'époque de l'Hégire. La petite dernière de la famille, une ravissante gamine de dix ans, attirée vers le bijou, m'attrape le bras et avec son doigt dessine le mouvement des lettres et me dit : "Allah" !

Les autres femmes se penchent vers moi et commentent avec des murmures surpris...je ne comprends rien et elles ne parlent pas français. Puis elles m'adressent de grands sourires...

Ce jour là, j'ai au moins appris ce qui était inscrit dans le losange, le nom d'Allah.

 

Berber_tunisie_1910.jpg
Trois jours plus tard, je me suis rendue à Djerba sur le site du magnifique musée du patrimoine et de la ferme des crocodiles. Mon ami n'avait jamais vu de crocodiles, donc nous avons commencé par l'espace réservé à ces étranges survivants de l'époque où le désert était une savane, qui baillaient sous le soleil en faisant la planche, puis nous avons pénétré à l'intérieur de cet extraordinaire bâtiment plein de trésors...et dans la première pièce....j'ai vu MON bracelet !

Il y avait quatre bracelets d'argent martelé fermé avec des charnières et une explication qui me donnaient enfin toutes les réponses que j'attendais ! Le clin d'oeil du mektoub !

J'appris donc qu'il s'agissait d'un bijou porté par les femmes nomades au 18e et 19e siècle, fabriqué en Algérie, qu'il comportait un losange talismanique dans lequel on inscrivait le nom de Dieu ou une formule sacrée visant à protéger celle qui le portait.

Ainsi, Mamy Solange, m'a léguée, lorsque j'avais quinze ans, le fil d'Ariane qui me reliait à mon futur. Elle fut la passeuse de destin, elle qui n'avait aucun lien avec le désert, simplement dépositaire d'un secret concernant sa petite fille.

Elle est morte à 59 ans, la tête broyée sous un camion, ses rêves de chateau et son amour pour les belles choses envolés avec le vent d'hiver qui balayait la nuit. Portait-elle ce bracelet le jour où elle est morte ?

Chaque fois que je ferme ce bijou autour de mon poignet gauche c'est elle qui revit en moi et encore bien d'autres murmures que je ne peux déchiffrer. Peut-être celui de ces femmes du passé, pieds nus dans le sable chaud, leurs longs voiles flottant au rythme de leur marche, tatouages au visage, les grands yeux fardés de khol...et moi dans leur sillage, je marche, je marche...vers un horizon inconnu qui ressemble à la mort.


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