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Un genre d’agacement

Publié le 20 juillet 2010 par Luxyukiiste
Un genre d’agacement

En ce chaud mois de Juillet, les sexbloggeuses s’épanchent en commentaires francs et rigolards sur un duo de sites fraîchement mis en ligne, educationsensuelle.com et educationsexuelle.com. Où est le problème ? Selon Sexactu et Zone Zéro Gène (et d’après ce que j’en ai vu), ces sites, au lieu de proposer une véritable information sur la sexualité, abondent en bonne vieille psycho de genre sur le mode « les filles sont sensuelles et les hommes sont des brutes ». De plus, le bazar est payant (3€ par mois), parce qu’on ne va tout de même pas vous filer gratuitement de l’information sur un des sujets les plus sensibles de l’existence. Enfin, le site rassemble tout un groupe de spécialistes prêts à éclairer la jeunesse sur ces envies qui travaillent dans le pantalon, de quoi faire débander direct n’importe quel ado curieux. Et histoire d’enfoncer le clou, les citations et témoignages (dont on peut toujours douter de l’authenticité) nous cassent les noix avec la sensualité à opposer aux comportements brutaux du porno, parce qu’on ne va quand même pas baiser comme des bêtes, un peu de décence.
Bref : une normalisation qui s’oppose à une autre, des clichés idiots, et le tout même pas gratuit : le fantôme de la révolution sexuelle se retourne encore une fois dans sa tombe. Ce qu’on se dit peut-être moins, c’est qu’il n’y a pas que les filles qui souffrent de ces raccourcis…

Un genre d’agacement

Oui, car si on sait déjà que toutes les filles ne se pâment pas devant des wallpapers romantiques moches avec des couchers de soleil et des chevaux, il serait aussi bon d’expliquer que les hommes ne sont pas systématiquement avides et brutaux. C’est un commentaire à l’article de Gaelle-Marie qui m’a fait cogiter cette réaction : lisez-le, mais si vous avez la flemme de cliquer, il explique en gros que des tas de filles pensent encore que les mecs sont les seuls à avoir un sexe. Résultat(s), elles se bloquent, persuadées d’être pécheresses ; elles acceptent de subir et de ne rien contrôler ; et, surtout, elles se complaisent dans le cliché du connard de mec qui ne pense qu’à sa bite, hurlant leur grande souffrance sur qui veut l’entendre sans se dire que, peut-être, on en a plein les couilles d’être vus ainsi. Là-dessus, en une phrase, educationsexuelle.com fait fort pour maintenir l’idée de la fille en sucre à protéger du monde extérieur : Les filles doivent être mieux informées et protégées en terme de sexualité, afin de ne pas accepter n’importe quelle pratique et de s’épanouir dans une sexualité de respect et de complicité. « Accepter », « protéger », un vocabulaire de la passivité qui va certainement beaucoup faire avancer les choses grâce à nos spécialistes. De mon côté, je ne prétends être rien : juste un mec qui réfléchit et ça me paraît suffisant pour développer un peu mon avis.

En fait, ces derniers temps ont été riches pour moi en lectures et discussions sur le sujet. Il y a quelques semaines, je relayais ici et là un autre article de Zone Zéro Gène, que ceux de mes lecteurs qui squattent les Et à part ça ont certainement déjà lu (y’a mon trackback en bas de la page). Galle-Marie nous y contait la fabuleuse histoire des parents tout rouges face aux questions de leurs bambins, moment très très crucial qui décide pour des décennies de la vision du sexe de notre gosse. Et la petite de raconter qu’une de ses camarades de récré a été punie par sa mère qui l’a surprise en train de se tripoter : bonjour, c’est 1920 qui frappe à la porte, il voudrait récupérer son mode de pensée. Voilà comment on construit des filles frustrées, bloquées, culpabilisantes, peut-être pour la jeunesse, l’adolescence ou même pour la vie. Et des filles qui, ensuite, s’auto-persuadent qu’elles ont moins de désir que les hommes, qu’elles ont autre chose à penser, que nous ne sommes que des chasseurs (big up le site), ce qui fait qu’elles souffrent (et qu’on s’en prend aussi plein la gueule). La révolution sexuelle a eu lieu mais n’a concerné qu’un certain groupe de personnes, l’éducation de genre qui consacre l’homme comme chef de foyer et la femme comme pondeuse exécutante est toujours en vogue… le silence mère-filles aussi.

Bref : ça, c’était pour être honnête et reconnaître que, oui, les filles, vous n’avez pas de chance, même vos semblables vous prennent pour des connes et vous vous faites bourrer le crâne par la pub, les parents et les fictions. Je suis toujours le premier à dénoncer ce genre de choses ; sauf que maintenant, le garçon en moi a aussi envie de s’énerver, un peu.

Oui, parce que y’en a marre, quand même. Reprenons le commentaire de notre ami, plus haut : J’ai honte d’être un homme. Partout on me fait honte d’avoir une bite et des couilles, d’avoir des envies de sexe. On m’explique que les femmes ne veulent pas de ça. Bien sûr, c’est très bien que les filles parlent et se révoltent contre les clichés, mais c’est plus rare que les mecs gueulent aussi. Et donc, à cette citation, je dois répondre : c’est la pure vérité. C’est possible de se demander, un jour, si on ne serait pas anormal, nous et nos envies envahissantes, face à des filles qui à force de gêne se replient sur elles-mêmes façon escargot alors que, jusqu’à preuve du contraire, elles sont physiologiquement autant ouvertes au plaisir que nous, voire plus ? A force d’attendre parce que pas maintenant mais plus tard peut-être un jour, on en arrive à se demander si la rumeur populaire n’aurait pas raison, et si par hasard on ne serait pas vraiment des brutes ? Alors, certes, on ne réagit pas tous comme notre commentateur, qui en est arrivé à une solution plutôt extrême. Mais, finalement, on se pose autant de questions que les filles dans d’autres situations, parce que oui, les affreux connards que nous sommes trouvent toujours un moment pour réfléchir. Parfois, un miracle arrive et on rencontre, au lit ou amicalement, des filles qui n’ont pas froid aux yeux, ce qui rassure un peu sur l’état de l’humanité. Cependant, ça n’a rien de si évident que ça.

Un genre d’agacement

Et puis, c’est bien facile de parler de connards, si on aime sortir avec n’importe quel abruti, car oui, chez les hommes, il y a des abrutis, mais je reste persuadé que la connerie est équitablement présente chez chacun des sexes, donc ça me fait bien rire. Même si les choses ont évoluées et qu’il est plus facile de nos jours d’être un homme qui n’est ni une brute ni un guerrier (ce qui terrorise l’extrême-droite qui parle de féminisation, les cons), le déterminisme de genre n’a pas totalement disparu et a peu à envier à son équivalent féminin. Oui, on peut en avoir rien à branler d’être un meneur, un tueur ou un chef de famille, qui va faire jouir xxx filles dans sa vie et défoncer tout le monde sur son passage. Je n’en veux pas aux filles d’avoir fait leur révolution, elle était bien sûr absolument nécessaire, mais parfois, on croirait comprendre que tout va bien pour les hommes. Si les magazines féminins sont à chier, les magazines masculins n’ont rien à leur envier (comme une amie me le faisait remarquer récemment, on cherche encore les mecs à poil dans la presse féminine) : voitures, costumes, sport et jolies filles, encore une panoplie segmentante pour mieux orienter les consommateurs vers les produits genrés (mot qui n’existe probablement pas). Dieu merci, ma famille me tient à l’écart de ce genre de pression, mais ce n’en est pas moins une que celle que les filles subissent.

Bref, même en 2010, il est encore important de tout envoyer balader, pour dire que : oui, un garçon peut être sensible, oui, une fille peut aimer se faire baiser sauvagement, oui, les hommes se posent des questions, oui, les gens savent réfléchir face au porno, oui, les parents devraient apprendre à répondre à ces questions, oui à plein de choses, évidentes pour certains, scandaleuses pour d’autres. Envoyons balader les spécialistes qui ne font que décrédibiliser d’autres personnes qui sont réellement de bonnes oreilles pour les questions et problèmes de la jeunesse, qui leurs parlent sans tabou de sujets en vogue, en appelant un chat un chat, et sans chercher ni à imposer une sexualité plan-plan, ni le contraire. Et défendons ces blogs et auteurs, dont les constats sont peut-être déprimants, mais plus qu’utiles de nos jours où la sexualité est un immense bordel qu’on croit libéré mais qui ne l’est pas tellement. Et, entre garçons et filles, cessons deux minutes d’entretenir ces clichés idiots, et pour une fois, un garçon vous dit d’arrêter de nous mettre dans le même sac et de penser que le sexe n’est que notre affaire. Même avec toutes les justifications et arguments du monde, même les plus vrais, l’homme n’en reste pas moins blessé par certaines paroles et comportements.
Changer les comportements est l’affaire de tous, autant de ceux qui peuvent diffuser largement un message que de nous tous, dans notre vie de tous les jours, nos actes, nos paroles. Il fait chaud, libérons-nous et mélangeons-nos les uns les autres comme on veut, avec qui on veut, quels que soient nos fantasmes, avec ou sans plastique, c’est ça finalement, la seule et unique vérité.

Un genre d’agacement

Et à part ça ? J’ai terminé le livre sur Actuel, qui était très intéressant, et j’ai entamé Oh Hippie Days d’Alain Dister, bouquin dans lequel le journaliste raconte son voyage aux Etats-Unis durant les années psychédéliques. Pendant ce temps, Arte diffuse des documentaires sur les communautés alternatives 60es. Un peu plus et je vais partir élever des chèvres et casser mon ordinateur.


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