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Catch 22

Publié le 25 juillet 2010 par Jlaberge
Un texte paru dans LE DEVOIR du 23 juillet dernier, signé par Lise Boivin au nom de la Coalition laïcité Québec, réclame le retrait d'ECR. L'argumentation est bien connue: la laïcité absolue dans la sphère publique est la seule solution viable aux conflits interminables en matière d'enseignement religieux. Un libéral, comme l'auteure et le groupe qu'elle représente, a d'énormes difficultés à reconnaître la légitimité du droit à la liberté de conscience et de religion dans la sphère publique. Au nom de la liberté, affirme-t-elle, certains devront renoncer à ce droit. C'est la «solution» libérale: reconnaître un droit pour ensuite le refuser. La pensée libérale, avec ses concepts de laïcité ouverte ou fermée, peu importe, constitue un éloquent exemple de «catch 22».Un Internaute, du nom d'Éric Folot, réplique au texte du Devoir en en appelant à Ghandi et Jean-Jacques Rousseau. Il cite ces deux auteurs:
«Gandhi affirme : « Les religions représentent des routes différentes qui convergent au même point. Peu importe si nos chemins ne sont pas les mêmes, pourvu que nous atteignions le même but. À vrai dire, il y a autant de religions que d’individus. Si un homme parvient au cœur de sa propre religion, il se trouve, de ce fait, au cœur même des autres religions (…) Dieu a créé différentes religions, tout comme il a créé leurs adeptes. Comment donc pourrais-je concevoir que la foi de mon voisin soit inférieure, et souhaiter qu’il se convertisse à ma religion ? Si je suis vraiment un ami loyal, je ne peux que prier pour lui souhaiter de vivre en parfait accord avec sa propre foi. Il y a plusieurs demeures dans le royaume de Dieu et elles sont toutes aussi saintes. QUE PERSONNE NE REDOUTE DE VOIR S'AFFAIBLIR SA PROPRE FOI EN SE LIVRANT À UNE ÉTUDE RESPECTUEUSE DES AUTRES RELIGIONS. La philosophie hindoue voit des fragments de vérité dans toutes les religions et nous enjoint d’avoir du respect pour chacune (...) La tolérance est aussi éloignée du fanatisme que le Pôle Nord du Pôle Sud. Une connaissance approfondie des religions permet d’abattre les barrières qui les séparent » (Gandhi, Tous les hommes sont frères : vie et pensées du Mahatma Gandhi d’après ses œuvres, Éditions Gallimard, Commission Française pour l’UNESCO, 1969).
Et Jean-Jacques Rousseau d’ajouter : « Émile qu’il ne pût apprendre de lui-même par tout pays, dans quelle religion l’élèverons-nous ? À quelle secte agrégerons-nous l’homme de la nature ? La réponse est fort simple, ce me semble ; nous ne l’agrégerons ni à celle-ci ni à celle-là, MAIS NOUS LE METTRONS EN ÉTAT DE CHOISIR CELLE OÙ LE MEILLEUR USAGE DE SA RAISON DOIT LE CONDUIRE » (Jean-Jacques Rousseau, Émile ou de l’éducation, Garnier-Flammarion, Paris, 1966)»
La citation de Ghandi ne conforte pas ECR puisque ECR ne propose aucune religion alors que Ghandi parle à partir de sa propre religion, l'Hindouisme: un hindou ne devrait pas avoir peur de connaître les autres religions, au contraire; en étudiant les autres religions, il gagnera en intelligence de sa propre religion. C'est l'argument du collège Loyola disant vouloir adapter ECR en étudiant les autres religions dans une perspective catholique, car on ne peut connaître les autres religions qu'à partir d'une perspective religieuse préalable.
Quant à la citation de Rousseau, il s'agit d'un argument libéral: le but de l'éducation religieuse concerne strictement la fameuse LIBERTÉ DE CHOIX, pas l'adoption d'une conviction religieuse particulière. Eric Folot prend pour acquis que le but de l'éducation religieuse vise la liberté de choix. Or, le but de l'enseignement religieux pourrait être tout autre; par exemple, l'acquisition d'une mémoire religieuse historique. Personnellement, comme chacun sait en lisant ce blogue, je privilégie l'acquisition d'excellences (vertus), et la foi chrétienne constitue une telle excellence. Sans la foi, dit saint Paul, je n'ai rien. J'aurais beau tout connaître, si je n'ai pas cette vertu, je ne connais rien.Ma thèse, en somme, est la suivante: la connaissance en matière de religion est impossible sans la foi. Celle-ci est donc une sorte de connaissance. En affirmant cela, je suis conscient que je vais à l'encontre d'un DOGME qui prend racine au siècle des Lumières: la foi n'est pas une connaissance, mais une simple croyance. Toute l'éducation libérale (dont ECR) est construite sur ce mythe.

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