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Soirée donzelles. Avec réajustement des règles d’accord en...

Publié le 01 août 2010 par Fabrice @poirpom
Soirée donzelles. Avec réajustement des règles d’accord en...

Soirée donzelles. Avec réajustement des règles d’accord en vigueur dans la langue française. Se-Ra y tient. Mordicus.

Ce soir, pas de mec ou de frère. Ce soir, c’est ma soeur. Pas de les gars. Ce soir, c’est les filles. Hein, les filles?

Hochements de tête et borborygmes de la fratrie. Tout ce qui est féminin leur sied définitivement mieux. 

Une belle brochette de stars cramponnées au comptoir d’un bar à vins de l’avenue Parmentier, conseillé par Va-Ness. Il est vingt heures à peine, et les soeurs ont déjà sifflé une bouteille de rouge. Pour cause de dépressurisation de leurs caboches après la semaine à retenir les câbles qui auraient pu péter et contenir l’hystérie en crise par paquets de douze. Le début de la campagne parisienne approche gentiment, la patronne est en vacances, les checklists de chacune sont multipliées par deux chaque jour. D’où la propale du Girly apéro formulée par Va-Ness et Se-Ra. Par la première parce qu’elle a toujours soif, par la seconde parce qu’elle a fini sa mission dans la semaine. Pour éviter tout désistement de dernière minute, elle s’est pointée au bureau en fin de journée, a plié tout le monde dans sa besace puis traîné la fratrie jusqu’au zinc du comptoir. En trente minutes, un premier cadavre. Alors Mandeen, planquée derrière ledit cadavre et son verre vide, s’excuse de sourire. Une carrure de crevette rose, une voix de chaton aphone après un concert des Beastie Boys, elle tente une offensive de quarter-back le soir du Super Bowl.

On pourrait prendre un magnum, non? On est super nombreuses…

La crevette remporte un franc succès. La foule est en délire. Le beau bébé déposé par le tenancier se fait méchamment essorer.

B-Ka déboule entre temps. Sa semaine de vacances l’a violemment requinqué. Elle pète les mâchoires et déboîte les épaules de toutes les donzelles en présence en claquant la bise. Elle pose un cul, siffle un godet et raconte sa semaine.

J’ai acheté un scooter. Ça fait deux jours que j’essaye de le démarrer. J’ai compris il y a deux heures à peine que le gros bouton rouge, c’est un coupe-circuit. Depuis, ça va mieux.

Elle claque de rire et le tenancier manque de faire dans son froc.

Du calme, ce n’est pas Skeletor qui menace. C’est B-Ka qui se détend.

Va-Ness, coiffée à l’explosif, en jupette blanche et haut noir, sandalettes de spartiate enlaçant ses petits petons, trottine entre le zinc et le trottoir.

Légalement, si t’es à moins de soixante centimètres du bâtiment, tu peux sortir avec ton verre.

Ventousée au mur, jaja dans une main, Va-Ness fume comme une centrale nucléaire en sur-régime.

Une clope équivaut à dix minutes d’espérance de vie en moins.

Avec le Girly apéro de ce soir, Va-Ness a amputé son espérance de deux bonnes semaines.

La fratrie commande un second bébé. Et lui met la misère.

Choupette est binaire ce soir. Sourire si verre plein, gueule si verre vide. Déhanchements de brésilienne, hochements de tête L’Oréal, vague à l’âme qui trouble ses piscines oculaires.

Se-Ra est un lapin Duracell survolté. Pour ses cheveux, elle a préféré une prise électrique aux explosifs.

J’me suis mise deux races, hier et avant hier. Jusqu’au matin. Ça flingue, le chômage estival. Aujourd’hui, j’ai deux sandwichs de supermarché et du coca éventé dans le bide. Mais avec le jaja, je revis.

Elle rebondit surtout. Elle sautille, prend des poses de Bioman, raconte des bastons imaginaires, rit à toutes les conneries et en balance le double pour faire marrer la fratrie. Sapée comme un surfeur qui trouvé la vague dans la journée, bermuda XXL, débardeur blanc juste au corps, tatanes de chômeuse estivale, elle s’approprie le comptoir comme si c’était sa piaule.

J’ai parcouru l’Indonésie avec ses pompes. J’ai marché des heures, des jours entiers. Des plumards pour panards, ces tatanes.

À vingt-deux heures, le bar ferme ses portes. La fine équipe se retrouve à la rue.

J’ai une tip-top party avec des copines. Je file.

Paire de Converse Flower Power, mèche rebelle qui lui fend le visage, pull souple et léger avec col en V, Sam-Ya câline les soeurs et s’éloigne, guillerette. Punky Brewster à la John Galliano, sa silhouette s’amenuise jusqu’à disparaître dans la bouche de métro. Pour réapparaître deux minutes plus tard, après le coup de fil de Choupette.

J’ai oublié mon ordi? Quelle quiche… C’était pas une bonne idée les magnums. J’tiendrai jamais jusqu’au p’tit matin.

Elle file pour de bon. Chargée comme une mule.

La fratrie hésite, minaude, bavasse. Perd du temps.

Ne pas s’enflammer. Faire preuve de courtoisie. Les inviter à la boucler gentiment. Et les mener à bon port.

Mandeen, sonnée par les beaux bébés qu’elle a judicieusement suggérés, s’éclipse.

Choupette se fait prier, Se-Ra est convaincante, Va-Ness pouffe, B-Ka est déterminée, sans pour autant savoir où mène la barque.

Ancrage au Baron Samedi, après quelques mois d’absence. Configuration d’été. Portes grandes ouvertes, clients saupoudrés sur le trottoir. Tat-Ya et Pier-O en maîtres de cérémonie derrière le comptoir. 

Et là, c’est le drame.

Tournée de dés à coudre aromatisés. Sur un plateau en bois, Pier-O fait couler ses larmes ravageuses dans des godets miniatures.

Les dés à coudre pètent les caboches des soeurs. 

Choupette, ses grands yeux troublés par les tremblements de son âme, minaude et taille la route.

Se-Ra s’inquiète.

Je crois qu’on a oublié de dîner.

Les tournées s’enchaînent, les donzelles délirent. Entre deux larmes de Pier-O, un  plateau de charcuterie et de fromage se fait brutalement molester par les hyènes rieuses.

Se-Ra est un cartoon sur pattes. Du Tex Avery en 3D, en chair et en os. Son et lumière. Foxy Lady en bande son, mirettes qui pétillent, déhanchement à 8.2 sur l’échelle de Richter, Se-Ra devient BioMan Force Funk. Déçue par le volume sonore, elle beugle comme un putois fan de Sex Pistols. Rien que pour tester le sonomètre du bar. 

Il fonctionne.

Tout se brouille. B-Ka parle à beaucoup de gens. Des hommes, des femmes, des hommes des femmes. Elle sympathise puis s’enfuit. Tout se brouille peut-être à cause de la fatigue. Ou du débit de conneries depuis vingt heures. Va-Ness fait des aller-retour entre les canapés indécemment confortables, le comptoir à larmes et le trottoir. À moins de soixante centimètres du bâtiment. Approximativement. Elle s’évapore. La douceur ambiante n’arrange rien. La surfeuse punk en tatanes ondule, vacille, oscille. Rit, râle, chante. Rit encore. Claque des bises électriques et s’enfuit dans un souffle. 

Dépressurisation des caboches terminée.

Bonne nuit.

Le lendemain matin, Se-Ra conclue l’histoire d’un rapide message.

Mon foie implore la clémence. Ce soir, bouillon de poule.

Tout ce qui est féminin leur sied définitivement mieux.

Foxy Ladies.


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