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Inception, de Christopher Nolan

Publié le 10 août 2010 par Onarretetout

inceptionAcception : la traduction du titre est « origine », comme on parle d’incipit pour désigner les premiers mots d’un texte. Aller à l’origine, modifier l’origine pour modifier le présent et l’avenir, tel est donc le projet de ce film. Mais on comprend aussi que l’acception de ce mot évoque ici l’intrusion et le fait d’insérer quelque chose.

Conception : telle est la conception du cinéma que l’histoire y a toujours commencé avant que le film commence, l’ellipse est une opération cinématographique courante. Le cinéma est fait de la même étoffe que les rêves,  Mais concevoir, c’est aussi enfanter (la contraception n'est qu'un moyen de différer ou d’empêcher la conception), et la question centrale de ce film sera celle de la paternité.

Déception : le réalisateur met en scène une magistrale tromperie, le héros n’utilisant les rêves des autres que pour se libérer de ses propres images subconscientes. Le spectateur n’a jamais la maîtrise de l’histoire puisqu’elle est construite à la manière d’un labyrinthe dont on ne peut sortir que par la volonté d’un autre. Même la dernière image garde son secret. Réaliser, est-ce faire du réel ?

Exception : le rêve est un exceptionnel moyen de modifier le réel. Les images des villes (et notamment celles de Paris) dans ce film m’éblouissent. Plier le monde sur lui-même, créer de l’apesanteur, passer d’un climat à un autre au seul moyen d’un sédatif, accéder à la création pure, voilà qui est extraordinaire et devrait perdre le spectateur. Mais s’il accepte, le voyage est hors norme.

Interceptions : Morphée, fils d’Hypnos, se déplace si vite qu’on le dit doué d’ubiquité ; il procure le rêve en effleurant le dormeur avec une fleur de pavot. // Dans l’expérience du rêve surréaliste, Desnos écrit : « Durant l'hiver 1918-1919 - Je suis couché et me vois tel que je suis en réalité. L'électricité est allumée. La porte de mon armoire à glace s'ouvre d'elle-même. Je vois les livres qu'elle renferme. Sur un rayon se trouve un coupe-papier de cuivre (il y est aussi dans la réalité) ayant la forme d'un yatagan. Il se dresse sur l'extrémité de la lame, reste en équilibre instable durant un instant puis se recouche lentement sur le rayon. La porte se referme. L'électricité s'éteint. » // Ariane, comme Phèdre, « fille de Minos et de Pasiphaé », est connue pour avoir aidé Thésée à sortir du labyrinthe où est enfermé le Minotaure. // Lewis Carroll fait passer Alice De l’autre côté du miroir, où elle sera amenée à jouer aux échecs. // Little Nemo est un petit garçon timide et rêveur, que Morphée, roi de Slumberland, invite officiellement dans son royaume par l'intermédiaire d'un serviteur pour le présenter à sa fille, la princesse ; chaque histoire de Little Nemo le fera entrer dans le monde des rêves (et dans les villes) pour rencontrer la princesse de Slumberland.
Tous ces éléments (et d’autres sans aucun doute) sont interceptés pour apparaître dans le film

Perception : c’est l’acte par lequel on prend connaissance des choses et des idées. Les sens y sont mis à contribution et notamment, au cinéma, la vision et l’ouïe. Leurs effets combinés ici me plongent dans un monde que, spectateur, j’admets pour réel, alors que le discours du réalisateur me dit en permanence qu’il n’est que le produit d’un rêveur, lui-même produit d’un rêveur… Ainsi, par exemple, ce n’est pas Paris que je vois, mais une image de Paris, qui évoque des représentations, des souvenirs, des émotions, et bien plus et bien moins.

Réception : après avoir été expulsé de la mer (il y a beaucoup d’eau dans ce film, j’y vois une symbolique maternelle), avoir aperçu jouant sur le sable deux enfants, Cobb (Leonardo DiCaprio) est accueilli par un vieillard dans une luxueuse salle de réception. Le film commence.


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