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Jeu en ligne : moratoire sur l'implantation réclamé

Publié le 17 avril 2010 par Alain Dubois

Joignant leurs voix à celles des nombreux autres organismes et groupes de soutien aux joueurs compulsifs, l’Association pour la santé publique du Québec et l’Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec ont demandé ce matin au gouvernement québécois de reporter d’un an le projet d’implantation du jeu en ligne par Loto-Québec.

Valérie Dufour
«L’offre de jeu au Québec est déjà grande avec les casinos, les appareils de loterie-vidéo et il y a aussi énormément de billets (de loterie instantanée) en circulation. (…) On demande au gouvernement de retarder l’implantation. Ce n’est pas le bon moment. (…) Dans le meilleur des mondes, on pense que cela ne devrait pas se développer», a indiqué Lucie Thibodeau, la présidente de l’ASPQ, un organisme sans but lucratif créé en 1946 dans but de promouvoir la santé publique.

«L’implantation se fera sans avoir analysé au préalable les impacts psychosociaux sur les clientèles à risque, notamment pour les adolescents et les jeunes adultes », a souligné le président de l’OTSTCFQ, Claude Leblond.

Dépendance, stress, alcool...

Il souligne que le jeu peut entraîner des problèmes tels la dépendance, du stress, de la violence conjugale, de la négligence, des suicides. « Il faudrait que les décideurs apprennent de l’expérience des ALV. Il n’y a pas eu d’analyse des impacts avant qu’on installe ces machines et on a vu plus tard qu’elles ont été fortement dommageables. (…) Les problèmes prévisibles sont bien réels », ajoute M. Leblond.

Au début du mois de février, le ministre des Finances du Québec a annoncé que le gouvernement avait décidé de légaliser le jeu en ligne. Flanqué du PDG de Loto-Québec, Raymond Bachand avait précisé que ce site serait lancé officiellement cet automne et qu’il serait «sécuritaire» pour la clientèle.

«Les jeux en ligne existent. On estime que les Québécois ont accès à plus de 2 000 sites de jeux de hasard et d’argent en ligne. Ces sites sont disponibles à n’importe qui, peu importe son âge et peu importe l’intégrité des gens qui opèrent ces sites. C’est le devoir du gouvernement d’intervenir. (…) C’est une industrie en croissance, une croissance illégale qui se fait sans encadrement», avait laissé tomber le ministre des Finances pour justifier le geste du gouvernement.

Quelques jours plus tard, les 18 directeurs de la santé publique du Québec ont réagi à cette annonce en demandant au gouvernement Charest un moratoire d’un an avant d’implanter le jeu en ligne. Selon ces hauts fonctionnaires, l’État va augmenter la notoriété et la légitimité du jeu en plus d’offrir un accès aux jeux de hasard 24 heures sur 24, 7 jours sur sept.

Mémoire

Leur sortie publique a été validée au début du mois d’avril par la publication d’une analyse de l’Institut national de la santé publique du Québec. Dans son mémoire soumis au gouvernement, l’organisme faisait valoir que l’augmentation de l’accessibilité du jeu via un site légal risque d’engendrer des conséquences sur la santé publique découlant de l’augmentation du nombre de joueurs. L’INSQ recommandait, elle aussi, d’imposer un moratoire d’un an, le temps de mener des recherches poussées.

«Il faut que le gouvernement soit cohérent dans ses politiques, reprend Lucie Thibodeau. Pour le tabac, parce que c’est un produit dangereux, la stratégie est d’en restreindre l’accès et de cacher les produits, de mettre des mises en garde sur les paquets de cigarettes... Le jeu en ligne, c’est aussi un produit dangereux et on ne devrait pas le déployer avec si peu d’information en main.»

En plus du moratoire, les deux organismes suggèrent au gouvernement de mettre sur pied un comité d’éthique sociale pour étudier la nouvelle de jeu en ligne de Loto-Québec. Ils ont d’ailleurs envoyé des lettres pour demander une rencontre au ministre des Finances, au sous-ministre de la Santé et au PDG de Loto-Québec, Alain Cousineau.

«On dirait que l’État, dans la mise en place de ce dossier, minimise la question des impacts psychosociaux et de santé mentale. Ce n’est pourtant pas ce qu’il fait avec les problèmes liés à la santé physique», indique Claude Leblond.

Lucie Thibodeau rejette également la défense de Loto-Québec, qui fait valoir que de nombreux sites illégaux existent déjà et que la société offrira au moins un environnement sécuritaire et légal pour les joueurs. « Est-ce que l’État doit aller partout où c’est payant? En Suède, ils ont étatisé le jeu en ligne et il y a eu beaucoup de nouveaux joueurs. Quand l’État se lance dans le jeu, le jeu a l’air plus moral et acceptable.»

Au bureau du ministre des Finances, on confirme avoir reçu la lettre, mais on ajoute que Raymond Bachand a bel et bien l'intention d'aller de l'avant dès septembre. «Il comprend les préoccupations. Il entend, mais il ne faut pas se mettre la tête dans le sable: le jeu en ligne est en pleine expansion», a indiqué son attachée de presse, Catherine Poulin. Elle a ajouté que le ministre était en contact avec un comité d'experts qui s'assureraient que les mécanismes de contrôle sont suffisants.

Signer la pétition sur le site de l'Assemblée Nationale: PÉTITION CASINO INTERNET DE LOTO-QUÉBEC


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