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Somewhere there’s a Sunday.

Publié le 14 juillet 2010 par Routedenuit

Tu te souviens, toi aussi, de ce dimanche d’automne. Tu t’en souviens parce que c’est un des rares moment pendant lequel tu pourras dire que tout allait bien. Tu t’en souviens comme d’un moment où tes épaules étaient tellement légères que le reste du monde ne ressemblait qu’à une vaste fête foraine où l’insouciance n’était rien d’autre qu’un code de conduite.

Tu t’en souviens comme d’un ancrage, comme d’une pensée rassurante au moment où le doute t’assaille. Le moment où l’angoisse se fait tellement forte que toutes tes certitudes sont soudainement aussi chancelantes que tes jambes après le dixième verre. Tu t’en sers pour t’extraire deux minutes de cette réalité qui semble s’appliquer à ronger ce qui te reste de naïveté.

Tu t’en souviens, mais pas trop quand même, parce qu’il a fallu faire le deuil et que finalement, être un adulte, c’est peut-être un compromis nécessaire.

Tu te souviens de ce dimanche d’automne, comme d’un moment à sauvegarder pour pouvoir un jour dire aux enfants, qu’il faut prendre le temps de devenir grand.

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Somewhere there’s a Sunday.

« Chère C.,

Il commence à être un peu tard et je me demande s’il est raisonnable de vous écrire alors que vous êtes sans doute en train de dîner avec quelques comédiens, d’applaudir une pièce d’un auteur qui m’agace, ou peut être même en tête-à-tête amoureux… Ce que je vous souhaite finalement.

Même si je veille toujours avec un peu de jalousie sur mes amies. Au point parfois d’être un peu emmerdant… Ne protestez pas, je sais que je le suis… Et plus encore lorsqu’il ne s’est rien passé entre elles et moi… Que faire ?

Je finis par accepter (mais quelle difficulté!) mes défauts, mes imperfections et mes bêtises. Je cours sans cesse derrière une image de moi que je voudrais parfaite, ou du moins satisfaisante à mes yeux. Et je découvre chaque jour l’étendue de mes lâchetés, de mes mesquineries, de mes petitesses. Je ne dis pas tout cela pour vous entendre protester, ou vanter mes qualités. Je m’interroge aujourd’hui avec beaucoup d’énergie – c’est l’autre mot pour signifier l’angoisse -, sur ce visage que je croise tous les matins. Je le scrute, non pas, par je ne sais quelle vanité d’acteur ou satisfaction de moi-même, mais plutôt pour y voir apparaître chaque jour un peu plus de vérité. Dans ce qu’il devient, dans ses rides qui commencent à apparaître, dans ces changements que moi seul je perçois et qui annoncent des périodes nouvelles, je crois deviner que s’éloigne celui que je croyais être et se préciser, sans toutefois le révéler tout à fait, celui que finalement je suis. Je n’aime pas cette découverte. Même si je sais qu’elle est nécessaire, et sans doute une des conditions du bonheur. Mais ce moi profond qui sort de son enfouissement comme ces momies que l’on découvre dans le sable et la terre, et qu’un lent travail au pinceau révèle et ramène à la vue des vivants, je me demande parfois si je vais l’aimer.

La question est secondaire, mais, dans cette interrogation, il faut bien sûr entendre la voix du petit garçon (que j’essaie pourtant de raisonner, chère C., j’essaie) qui se demande si on l’aimera encore ? Lorsque tout sera à nu. Lorsque tout sera révélé. Lorsque toutes mes contradictions se seront rejointes et mes derniers secrets dévoilés… M’aimera-t-on encore? Oui c’est la grande question. En tout cas pour moi. Et vous? M’aimerez-vous encore chère C., lorsque vous saurez réellement qui je suis? M’aimerez-vous encore si je vous montre le fond de mon âme ?

J’ai toujours peur que la réalité ne soit moins belle que la fiction, alors que la vie ne cesse de me prouver l’inverse. Mais à cet âge où j’arrive et où il faut (sous peine de rester l’enfant mal vieilli…) se rassembler et ne faire plus qu’un, je regarde avec un peu de nostalgie ce jeune garçon, ce jeune homme que je crois reconnaître, et je retarde un peu le moment de lui faire un signe d’adieu, et j’ai un peu peur de tourner la tête, parce que je sais qu’une fois le signe fait et la tête tournée, il n’y aura plus de retour en arrière. Et même si je sais que tout commence maintenant, je me sens au moment où, comme dans les voyages, la peur de ce que l’on quitte devient plus forte que l’excitation de ce que l’on va trouver, ce moment qui arrête la course un bref instant, et qui vous plonge dans une vertigineuse nostalgie.

Mais ces doutes, ces peurs, ces interrogations. Cette légèreté qui s’échappe. Ces questions qui se pressentent. Cette énergie qui laisse place à la réflexion. Ce souci de veiller sur les autres plus que sur soi-même. Je crains, chère C., que cela n’ait un nom. Et il faudra bien se résoudre à le prononcer. Ou plutôt à le vivre. Et accepter le mot « adulte ». Bientôt. Très vite.

Hier…
Bien à vous
N. »

…Somewhere there’s a Sunday

In the Fall

Where everything you love

Is safe and warm

Where everything was right

But I’m never going home…

Relire la première lettre: C’est ici.

Somewhere there’s a Sunday.

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