Magazine Photos

Patricia Laranco : texte.

Par Ananda

Et un beau jour, voilà, ça vint. Cela vint enfin : je savais !

Je ne savais pas ce que je savais ; mais je savais que je savais.

Un murmure s’était glissé en moi, qui me disait que je savais savoir. Mais ce murmure était aussi nébuleux qu’une brume sur un lac. Sa belle irisation chatoyante avait le don de me mettre en joie.

J’étais en haut de la colline, et j’avais la poitrine qui se dilatait.

Je ressentais une immense, une indescriptible impression de soulagement.

Finis, les couloirs sombres et sans fin, les lumières crépusculaires, bilieuses ! Finis, les ciels bas et les routes plates qui n’en finissaient pas !

Oubliées, les routes en lacets qui ne semblaient jamais mener nulle part, et jouaient aux montagnes russes à travers les bois au sol et aux feuillages de mosaïque ambrée !

Oubliées, les campagnes trompeuses, trop vertes, où l’on tournait en rond dans l’odeur troublante de la chlorophylle ou de l’eau piquante des petites rivières !

Plus d’errances interminables et parallèles à la teinte rouillée des ballasts !

Plus de labyrinthes tortueux de béton et plus de successions de caves ! Plus d’étranges pièces rances, éclairées par une lueur compacte, huileuse ! Plus de greniers glauques où marinait la senteur de la poussière ni d’appartements désormais vidés de leurs meubles et semblables à des coques désertées !

Plus d’escaliers de bois qui se perdaient sur des loggias branlantes !

Plus de placettes où se rassemblaient, serrés les uns contre les autres et bombés, aussi gluants que des batraciens, les pavés puants !

Encore moins de vent mauvais, secouant l’air contre les parapets juste au-dessus de la trouée grondante du Périphérique, au beau milieu d’un paysage d’une nudité tranchante, abrupte où rien n’accrochait le regard, si ce n’était les bancs de nuages allongés si près de l’horizon qui venaient si volontiers se refléter dans les innombrables surfaces glaciales, toutes en parois vitrées, lisses des hautes tours hautaines !

«  Au fond, savoir, me dis-je, c’est comme se trouver devant une porte fermée dont on aurait les clés en main, mais que tout vous dissuaderait d’ouvrir ».


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Ananda 2760 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Dossier Paperblog

Magazines