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Inondation: visage de la souffrance par Ibrahima Falilou

Publié le 07 septembre 2010 par Bababe

Inondation: visage de la souffrance  par  Ibrahima Falilou

Il y a dans notre rapport aux choses et aux événements, nous autres mauritaniens quelque chose de cyniquement simpliste .la vie ou ce qui en tient lieu se résume pour l’essentiel à quelques actes de survie quotidienne. Tout se joue sur du provisoire, du ‘en- tendant’ comme on aime dire ici. Et de provisoire  en provisoire ,notre vie se drape sous les couleurs de la précarité. 

La preuve ,un hivernage à la Socogim ps ,au 5eme ,6eme,à la capitale ….bref un hivernage à Nouakchott et vous aurez en images et en émotions toute l’expression du mal être  Nouakchottois ;ici plus que là bas ,  l’eau inonde la terre ; de partout ;d’en haut et d’en bas ;la pluie réveille la nappe qui sort de son lit comme tout le monde et inonde les maisons .Le reste est une question de seaux, de balais et  de biceps. Des hommes et des femmes, torses nus livrent dans la pénombre de  la nuit leur énième combat contre l’eau .L’eau d’en haut et d’en bas ; l’eau qui inonde mais refuse de passer par le robinet !

Les visages marqués par le sommeil et l’effort, ils tentent désespérément de sauver de la  noyade  quelques meubles déjà fortement éprouvés par l’humidité chronique .Partout la nuit résonne du bruit de l’eau ; l’eau qu’on vide des chambres et celle qu’on essaie de retenir par de petites diguettes improvisées  à la lumière de lampes torches .Tout le monde est à la tâche, sur les nerfs .Les voisins se hèlent, s’invectivent et s’interpellent. Des insultes fusent par moments mais finissent par se diluer dans  les odeurs infectes des marres verdâtres des fosses septiques .Ici se joue la survie d’un peuple face à l’ingratitude d’une époque ; l’histoire d’un échec grandeur nature .Celui  de Nouakchott qui étouffe  sous la chape d’une surpopulation malsaine et d’une précarité déconcertante. Le visage de la souffrance d’un peuple fêtant ses cinquante ans et qui n’a toujours pas la science de ‘ réveiller’ les nappes pour trouver une alternative au désolant spectacle  des bidons jaunes, vestiges d’une  huile douteuse destinée à la consommation des ‘petites gens’. L’Etat, pendant ce temps est resté en l’état, comme il a été au début, au premier commencement : attentiste, défaitiste, fataliste. Le même rituel : Il   constate les dégâts et envoie les camions  du commissariat à la sécurité alimentaire, à grands renforts de caméras apporter une « aide substantielle aux populations sinistrées » .Un état qui vit de ces /ses  catastrophes qui le nourrissent (au propre comme au figuré) en lui donnant sa justification et sa légitimité. Le peuple lui, se contentera de quelques gros plans à la télévision nationale et de la visite d’un haut responsable venu réconforter et promettre… des promesses !  « En – tendant »   mouches, moustiques et cafards continueront d’être les acteurs d’un drame qui se joue aux portes de la capitale d’un état qui s’apprête à fêter son cinquantenaire et se réjouir d’avoir manqué… l’essentiel.

En attendant cet ‘en – tendant’, la nappe attendra la pluie pour déborder, les fosses attendront que la nappe déborde pour se remplir et le peuple attendra qu’il pleuve pour déverser ses fosses. Personne n’attendra les pompiers ou les services de la mairie. L’état attendra que le choléra s’installe pour venir en aide aux « populations sinistrées » .Ceux qui y survivront attendront que la nappe se rendort de son sommeil majestueux faute d’avoir trouvé une âme pour la dompter et tout le monde, comme elle, comme l’état attendra l’année prochaine pour une nouvelle édition d’une tranche de vie à attendre….les pieds dans l’eau !!

   Ibrahima falilou


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