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Test de Braid sur PSS

Publié le 08 septembre 2010 par Axime
Test de Braid sur PSS

Malgré le poncif, nous pouvons le dire : ça y est. Le jeu vidéo est entré de plein fouet dans une nouvelle dimension, celle d’un médium complet disposant de son propre langage, capable de ne pas être que du divertissement lorsqu’il le souhaite. Non pas qu’amuser la galerie soit honteux, bien au contraire, mais la diversité des idées, des sensibilités, des êtres, ne peut que passer par une diversité des langages. Depuis toujours le jeu vidéo s’invente sa propre linguistique. Picorant (beaucoup) dans le cinéma, s’inspirant (un peu) de la littérature, essayant de suivre (parfois) le chemin qu’emprunte avec succès la bande dessinée vers une reconnaissance culturelle. Mais restait l’écueil difficile du langage par le gameplay, par les mécanismes de jeu. On trouvera probablement quelques exemples de réussites de ce type dans la ludothèque des vingt dernières années, mais ce n’est que récemment que le big bang de la narration par la manette s’est produit. Braid n’est toutefois pas un précurseur. Braid est un des premiers symptômes de cette évolution. Une déclaration d’amour murie de longue date par un passionné épaulé par d’autres âmes en peine. Une poussée de fièvre artistique qui, sainement, bouscule totalement la vision critique habituelle des "milieux autorisés". Il va falloir s’y faire : comme il est difficile de juger un film, un livre, une peinture, il sera désormais souvent ardu de trancher dans le vif de ces narrations totalement interactives. Le doute est parmi nous, le loup est entré dans la bergerie, plus rien ne sera évident, plus rien ne sera facile, plus rien ne sera unanime et c’est tant mieux. Après une enfance pleine de surprise, le jeu vidéo connait son adolescence et Braid est un des événements qui forgeront le futur adulte. Entamons donc la chronologie d’un Objet Virtuel Non Identifié…

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Approuvé par Einstein
Avant de continuer à faire fuir tous les lecteurs rationnels et sains d’esprit, prenons le temps d’expliquer le concept de départ de Braid : le temps, justement. Sous ses airs de jeu de plateforme en deux dimensions, sous ses airs de Mario-like, pourrait-on dire (l’exemple n’est pas choisi au hasard, les références étant nombreuses), Braid est avant tout un jeu de réflexion. Et à plusieurs niveaux, madame. Le but de chaque tableau est de récolter des morceaux de puzzle en grimpant sur des échelles ou des plateformes, en évitant ou utilisant quelques ennemis jamais là au hasard et surtout en jouant avec le temps. Tout au long de l’aventure, il est en effet possible de revenir en arrière (puis vers l’avant si souhaité), à différentes vitesses, et de reprendre les commandes au moment voulu. Au-delà de réduire considérablement une frustration qui aurait pourtant pu être rédhibitoire, le challenge proposé étant non négligeable malgré ce mécanisme, tout le design des niveaux, l’agencement des objets et la course des ennemis tournent autour de ce concept du temps. Si les premiers instants restent très légers, la progression, bien dosée par ailleurs, amène minute après minute son lot de nouveautés de plus en plus réjouissantes jusqu’au paroxysme final. Car en sus de ce rembobinage express, chaque monde recèle une nouvelle particularité notable (déformation locale du temps ou enregistrement d’une séquence, pour rester vague et ne pas gâcher le plaisir de la découverte), particularité complétée d’éléments contenus dans des certains niveaux et variant encore le gameplay, son apprentissage étant lui aussi simple et discret. L’ensemble est donc très diversifié. Aucun des mécanismes de jeu ne paie de mine mais tous conduisent à un plaisir, une joie de la découverte et de l’expérimentation sans cesse renouvelées : l’excellence semble tellement naturelle qu’elle confine à la perfection. On sent clairement le travail de fourmi derrière chaque centimètre carré, chaque seconde de Braid, et cela fait toute la différence entre un bon jeu et une pépite.

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Ce travail colossal, dirigé par un seul homme, se ressent en permanence et dans chaque recoin du jeu. On applaudit ainsi des deux mains (oui, difficile de faire autrement) la programmation qui permet de changer le cours du temps, de récupérer n’importe quelle action sans accroc à n’importe quel moment, de créer des dégradés temporels, de revenir en arrière de plusieurs dizaines de minutes… Pour nuancer tant de bonnes paroles, on peut tout de même noter une rejouabilité sans doute limitée, sauf adoration, même si les cinq heures environs passées en première lecture sont loin d’être négligeables ou vides. Rejouer certains niveaux et relire certains passages du scénario semblent même nécessaires à une compréhension complète de l’œuvre, si c’est seulement possible. Après cela, en sus de secrets bien cachés, il reste quelques courses contre-la-montre, peu originales et surtout manquant d’une mise en abîme, ne serait-ce que d’un traitement particulier : après une telle utilisation du temps dans le jeu, il est difficile de revenir à de bêtes courses contre celui-ci sans justification intelligente ou originale.

Difficile en revanche de faire la fine bouche devant la réalisation. De bonnes fées se sont penchées sur l’esthétique, les animations, la bande-son et les bruitages sans être avares sur les coups de baguette. En un mot ou presque : c’est splendide. Les décors, du premier ou second plan, sont aussi détaillés que stylisés, colorés mais non criards dans un premier temps, plus sombres mais tout aussi précis dans un second. Les quelques ennemis et Tim, notre avatar, respirent une simplicité qui ne confine jamais au simplisme et leurs animations (peu nombreuses mais toutes bien choisies et réalisées) leur confèrent une vie et un caractère naturels. Les bruitages des divers éléments, organiques ou non, sont du même acabit : pas un son n’est de trop, chacun est d’une intelligente discrétion, d’une humilité pourrait-on presque dire si nous n’étions pas à jeun, et accompagnent à merveille l’ambiance légèrement mélancolique de l’ensemble de l’œuvre. Quant aux musiques… "Incroyables" les qualifie le mieux. Rarement insistantes (ce qui peut tout de même arriver lors de niveaux un peu longs), toujours en adéquation avec la séquence qu’ils accompagnent, parfois au millimètre près, elles savent aussi se taire et jouer du silence pour accompagner à bon escient la course du temps. Enfin, on ne résiste en général pas à l’appel d’un scratch improvisé en jouant avec la vitesse et le sens de défilement de l’action, pour découvrir les musiques ou les bruitages sous de nouveaux angles.

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Les synonymes de « ouah, c’est super ! » commençant à manquer, il est temps de reprendre son souffle. Chose d’ailleurs courante dans Braid tant on se surprend à s’amuser avec le temps, sans raison, si ce n’est celle des plaisirs simples. Sauter sur le même ennemi à l’infini grâce au rembobinage, accélérer, à l’envers ou à l’endroit, la vie d’un niveau, déformer les bruitages et les musiques… On se croirait retourner en enfance, on se croirait retrouver des plaisirs que l’on croyait parfois perdus. Et c’est là que la plus grande qualité de Braid apparait. Par son utilisation de la quatrième dimension, par la simplicité enfantine des plaisirs qu’il distille, vêtue d’une parure pourtant bien consistante, par son mélange d’essais et d’erreurs, de hasard parfois, d’imagination souvent, enfin par son ambiance, Braid propose une réelle adéquation entre son gameplay et l’histoire qu’il conte, elle aussi emmêlée dans les méandres du temps. On peut très aisément ne pas être touché par un scénario flou qui ne se dévoile que dans la progression, et seulement en partie ; on peut trouver les sujets de la vie, du temps ou de l’amour futiles, leur développement n’étant volontairement pas des plus prononcés, on peut facilement passer à côté d’une seconde lecture pas évidente mais finalement semblant logique (à lire par ici une fois le jeu terminé en entier de chez entier). Impossible également de nier que certains ne verront là qu’un jeu de réflexion. On peut en clair ne pas accrocher à Braid car la sensibilité de chacun dépend de bien trop de facteurs pour être résumée en une équation et transformée en un algorithme de jeu. Mais au final, quelque soient nos impressions, il reste un jeu complet, ficelé à merveille, à la finition qui ne peut être qualifiée que d'excellente, à l’ambiance presque mélancolique unique, à la patte artistique prononcée, tant sur le plan visuel qu'auditif, et à l’émotion palpable. Il appartient à chacun de s’approprier ou non ce mélange. Mais au final, quelles que soient nos impressions… il reste un jeu original. Peut-être même originel.

Gameplay
9 / 10
Malgré une maniabilité qui pourra être jugée lourde mais qui donne en réalité un poids naturel à nos actions, on ne peut ignorer le soin immense apporté à chaque mécanisme. La difficulté, pourtant bien présente, en devient naturelle. Progresser dans les niveaux, jouer avec le temps et expérimenter diverses solutions, tout semble simple, évident et plaisant. Plus encore, ressentir une histoire par ce gameplay procure un sentiment de cohérence narrative rarement vécu par ailleurs. Si la perfection existait, Braid l'incarnerait. Graphismes
9 / 10
C’est beau et aucune de mes phrases ne pourra mieux le faire comprendre. L’art est subjectif, mais dieu que c’est bon. Bande-Son
9 / 10
Seuls quelques rares moments où la musique se fait trop insistante ternissent un tableau autrement idéal : accompagnant à la perfection les différents niveaux, jusque dans des silences assourdissants, bruitages et orchestrations flattent tympans et osselets. Durée de vie
8 / 10
Quelques heures d’une grande qualité permettront d’entrevoir les secrets de Braid, mais de nombreuses autres seront nécessaires pour en apprécier la plupart des subtilités. Difficile à juger de la rejouabilité tant ce jeu est personnel, facile en revanche à critiquer le manque d’originalité des quelques challenges proposés en guise de dessert. Note finale
9 / 10
Soyons clair : Braid n’est finalement "que" de la réflexion saupoudrée de plateforme. Impossible de le conseiller aux nerveux de la manette, bien qu’ils y trouveront défis à relever. Mais Braid est une perle d’inventivité à la finition plus qu’impeccable et à la cohérence exemplaire. Tout est mesuré, rien n’est de trop et aucun facteur limitant ne pointe à l’horizon. Braid est une œuvre d’artiste qui ne néglige ni le propos, ni la technique. Braid offre le temps. Et un peu plus. Par Yaka Aujourd'hui à 12h26 Vous devez posséder un compte Livegen et être connecté pour pouvoir poster un commentaire. Connexion Inscription Braid

Braid

  • PSS
  • Genres : Plateforme / Reflexion
  • Sortie FR : 17 décembre 2009
Note
(2 votes)
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