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Pieter ASPE et « les enquêtes du commissaire Van In »

Par Leojl53
(article paru dans la revue "Septentrion", arts, lettres et culture de Flandre et des Pays-bas, magazine flamando-néerlandais, n° 3, 2010
Pierre Aspeslag de son vrai nom, né en 1953, a été surnommé le « Simenon flamand » par d'aucuns. Comme l'auteur d'origine liégeoise, Aspe est belge et les enquêtes de son « Maigret » flamand, le commissaire Pieter Van In, se déroulent, elles, dans le vieux Bruges et ses environs. En 1993, après avoir pratiqué un certain nombre de petits boulots, Aspe est concierge à la chapelle du Saint-Sang à Bruges et c'est là qu'il jette sur le papier les premiers mots du « Carré de la vengeance » - première enquête du Commissaire Van In - qui sera éditée en 1995 aux Editions Manteau à Anvers. En 2001, il reçoit enfin le « Prix Hercule Poirot » pour « Zoenoffer » (« Victime expiatoire »). Aspe en est maintenant à sa 24ème enquête et s'il connaît un succès et une notoriété certaine chez les néer­landophones, il se fait aussi un nom chez les francophones depuis 2008 grâce aux Editions Albin Michel et à ses traductrices Emmanuèle Sandron et Marie Belina Podgaetsky. Gageons que sa carrière francophone n'en est qu'à ses débuts...
A l'heure actuelle, l'éditeur parisien a fait paraître les cinq premières enquêtes du commissaire Van In dans sa collection « Carré Jaune » : « Le carré de la vengeance » (2008); « Chaos sur Bruges » (2008); « Les masques de la nuit » (2009); « La quatrième forme de Satan » (2009) « Le collec­tionneur d'armes » (2009) "De sang royal (2010). L'effet « série » et la parution, depuis quelques mois, des premiers tomes en livre de poche garantissent une présence constante de Pieter Aspe en librairie, pour le plus grand bonheur de ses lecteurs, de plus en plus nombreux, tant en Belgique qu'en France.
Le personnage principal, le commissaire Van in, est un flic un peu bourru, brouillon, buté, caustique et sarcastique, atypique, désabusé, invétéré fumeur et buveur de Duvel pour rincer ses déceptions professionnelles et privées, étranglé par les dettes mais capable d'amitié, d'humour et de tendresse... bref, un personnage haut en couleur et pas toujours politiquement correct qui peut parfois exaspérer le lecteur quand il lance à tout bout de champ son juron favori « Benson im Himmel » (explication donnée dans « Chaos sur Bruges », p.225) - heureusement ce satané juron se fera de plus en plus rare au fil des enquêtes. Mais Van In n'est pas seul : il peut compter sur son fidèle collaborateur, ami et complice Versavel, un flic gay rusé et cultivé qui sait lui remonter le moral et surtout sur « madame le sub­stitut » du procureur du Roi Hannelore Martens, le cerveau d'Einstein dans un corps de mannequin. Hannelore sera d'ailleurs l'amie, l'amante, la compagne de Pieter et la mère de ses jumeaux. Au fil des récits, Van In devient de plus en plus sympathique et humain au point que l'on finit par s'attacher réellement au personnage.
A travers les enquêtes de Van In pas toujours faciles à comprendre – nous sommes en Belgique – on rencontre l'embrouillamini des rouages de l'administration, les magouilles politiques et financières, les collusions dans la « haute », la corruption... mais aussi la drogue, les ballets roses, la prostitu­tion, les bordels pour VIP, le satanisme, les politiciens ripoux et véreux, le trafic d'armes, le blanchi­ment d'argent, la mafia russe, le vandalisme... tant d'ingrédients qui font monter la sauce.
Pas vraiment novateur dans le style polar, Aspe nous permet néanmoins d'entrer dans son monde grâce à son art du dialogue, à ses personnages bien typés, à son humour décalé et à ce subtil mélange de vie professionnelle et privée, dans une Bruges où les francophones retrouvent leur belgitude et les Français un exotisme si proche... Van In est à Aspe ce que Brunetti est à Donna Leon, Adamsberg à Vargas, Wallander à Mankell, John Rebus à Rankin, Flea Marley à Hayder... ce que Maigret est à Simenon... bref, des flics qui gagnent notre sympathie parce qu'ils restent humains!
Pour conclure, je ne peux m'empêcher de citer ce bonheur de lecteur. Dans le 3ème tome de l'Arcamonde : "Le coeur-de-gloire" d'Hervé Picart (Ed. Le castor astral), l'antiquaire Frans Bogaert, personnage principal des enquêtes, rencontre comme par hasard ... le commissaire Van In à la terrasse du Keizer Karel en train de boire sa Duvel tandis que Frans sirote une Westmaele en compagnie d'une jolie femme. On a même droit au "Benson in Himmel !". (p.97, 98) La consécration !
JL Léonard

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Par Philippe Baudelet
posté le 24 juin à 19:11

aspe : le meilleur auteur de polar du XXIème siècle !

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