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Manuel Ayau, champion de la cause de la liberté

Publié le 23 septembre 2010 par Unmondelibre

Manuel Ayau, champion de la cause de la libertéMary Anastasia O’Grady – Le 23 septembre 2010. C’est en haut d’une colline surplombant le spectacle pittoresque du lac volcanique Amatitlán, que Manuel « Muso » Ayau, sans doute le champion de la cause de la liberté le plus influent de l'Amérique latine dans la seconde moitié du 20ème siècle, a été inhumé le mois dernier.

Je suis venue ici, 40 jours plus tard, pour assister à une cérémonie en sa mémoire. Tôt le matin j’ai voyagé une heure de Guatemala City au monastère Grec orthodoxe qui accueille désormais la crypte de la famille Ayau. De nombreux amis venus de toute la région et d'Espagne se saluent les uns les autres. La foule déborde de l'arrière de la petite église. Nous sommes jeunes et vieux, latino-américains, européens et nord-américains, croyants et non croyants, mais nous partageons tous la douleur commune d'avoir perdu un professeur, un mentor, un leader et un ami.

Plus tard, à la prestigieuse Université Francisco Marroquín, le coeur du legs d’Ayau, près de trois cent personnes remplissaient la place pour célébrer sa vie.

Les américains qui sont découragés par l'érosion des droits individuels aux États-Unis pourrait apprendre beaucoup de l’itinéraire courageux d’Ayau. Rarement une vie a-t-elle tant contribué à la cause de la lutte contre la tyrannie simplement par le fait d’avoir pris un engagement en faveur de la promotion de la pensée libre ; et Ayau l'a fait dans un environnement qui était très hostile à la liberté.

Ayau, né en 1925, reçut sa formation d’ingénieur aux États-Unis. Mais c’est son instinct d’entrepreneur ici, au Guatemala, qui a façonné son destin pour en faire une icône de la liberté. Il a commencé par mener plusieurs entreprises à succès, y compris une entreprise de gaz industriel et un fabrique de tuiles. Comme il travaillait, il est devenu de plus en plus perplexe quant à la contradiction entre le potentiel entrepreneurial du pays et le nombre élevé de défaillances d'entreprises. Cela a suscité chez lui le besoin de chercher des réponses à la pauvreté persistante du Guatemala et de son sous-développement.

Cela était une époque turbulente. Les communistes avaient jeté leur dévolu sur le Guatemala. En 1954, leur homme, le président Jacobo Arbenz, était renversé. Ce qui suivit fut un mélange toxique de gouvernements militaires et une insurrection de guérilla qui déchaîna la violence sur la nation.

Au milieu de cette tempête vint Ayau, accompagné de six guatémaltèques partageant ses idées, armés du seul désir de découvrir les idées qui pourraient transformer leur pays en une nation juste et prospère. Ils formèrent le centre d'études économiques et sociales, le CEES en espagnol, en novembre 1958. L'objectif, comme l’écrivit Muso dans une note de 1992 sur la fondation de l'Université Francisco Marroquín, « était d'étudier et de diffuser les principes éthiques, économiques et juridiques d'une société libre. »

Ayau et ses collègues dévoraient les livres et débattaient avec passion. Au cours du demi-siècle à venir, le CEES allait publier plus de 900 brochures en défense du marché. Les nombreuses contributions d’Ayau (98) s’intitulaient par exemple « De la moralité de l’État », « La planification: rationnelle ou absurde ? » et « Robinson et Vendredi inventent le marché commun ». En Octobre 1978, il écrivit un essai dans une brochure du CEES intitulée « Contrôle des prix », tandis que Milton Friedman rédigea « En défense du dumping » dans la même publication.

Ces brochures touchèrent toute la région. Le péruvien Enrique Ghersi, l'un des co-auteurs du best-seller de 1986 « L'autre chemin », rappelle que la brochure intitulée « Dix leçons pour le sous-développement » a été « essentielle à l'éveil en moi de la vocation et de l'engagement pour défendre la liberté. » Le CEES a invité au Guatemala des géants intellectuels comme Ludwig von Mises (1964), Friedrich Hayek (1965) et Ludwig Erhard (1968).

Dans la promotion de ces idées Ayau montait au créneau contre les communistes, les mercantilistes, les syndicats du secteur public et les planificateurs centraux dans les institutions puissantes comme la Banque mondiale et l'Inter-American Development Bank. Mais cela n’était qu’un tour de chauffe.

Dans les années 1960, il était clair que la gauche, avec toute son intolérance, avait capturé les universités du Guatemala. Alors en 1971 Ayau, et ses compagnons de route avocats de la liberté, fondèrent l’Université Francisco Marroquín dans une maison louée grâce à la contribution de quelques guatémaltèques s’élevant à 40 000 $. Il y eut huit élèves dans la première promotion. Il y en avait 509 l’année dernière.

Les diplômés de l’Université Francisco Marroquín sont parmi les plus convoités dans le pays en raison de leur compétence. Mais l’école explique que c’est autre chose qui les rend unique : « tous les étudiants, quelle que soit leur discipline, se voient enseigner les causes et les origines de la richesse des nations ».

Ayau n'a pas vécu pour voir tout ce dont il rêvait pour le Guatemala, mais il a pu être le témoin de grands changements dont il pouvait se sentir fier. Les diplômés de l’UFM ont joué un rôle dans la réforme constitutionnelle de 1993 pour interdire le prêt de la banque centrale à l’État, dans la loi de 1996 sur le marché libre des télécommunications, et dans la loi de 2001 qui a permis l'offre de devises concurrentes. Un voyageur du temps partant des années 1960, lorsque Ayau commençait à défier l'étatisme alors que Fidel Castro forgeait son ultime expression à Cuba, pourrait être surpris par les idées de qui ont le mieux résisté à l'épreuve du temps.

Sans doute M. Ghersi, qui a assisté à la célébration ici, traduit-il le mieux la contribution d’Ayau avec ces mots: « elle est décisive dans l'histoire de la liberté. L’université Francisco Marroquín est le Saint-Siège du libéralisme en Amérique latine, et Manuel Ayau est notre pape ». Reposez en paix, Muso.

Mary Anastasia O’Grady est éditorialiste au Wall Street Journal.Cette traduction d'un article du Wall Street Journal est exclusive pour www.UnMondeLibre.org.


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