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La fin des discriminations... les anciens combattants

Publié le 25 septembre 2010 par Amroune Layachi

Le 23 juillet, dans la plus grande indifférence, le Conseil constitutionnel a rendu une deuxième décision historique (après celle du 28 mai relative à la décristallisation des pensions) qui clôt véritablement le chapitre des discriminations frappant les anciens combattants des ex-colonies.

Les Sages, saisis par le biais de la nouvelle procédure de la question prioritaire de constitutionnalité, sont en effet intervenus sur une question jusqu'alors totalement ignorée des débats publics : les conditions d'attribution de la carte des anciens combattants, criantes d'injustice pour les anciens supplétifs algériens de l'armée française, qu'ils ont déclarées contraires à la Constitution.

De quoi s'agit-il ? La loi 9 décembre 1974 déclare solennellement que "la République française reconnaît, dans des conditions de stricte égalité avec les combattants des conflits antérieurs, les services rendus par les personnes qui ont participé sous son autorité aux opérations effectuées en Afrique du Nord entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962. Elle leur accorde vocation à la qualité de combattant et au bénéfice des dispositions du code des pensions militaires".

La loi concerne donc en particulier l'Algérie, même si elle s'étend à l'ensemble du Maghreb. Les membres des forces supplétives auraient pu ainsi se voir décerner, de par cette législation, la carte du combattant et les droits qui s'y rattachent (notamment la pension militaire) si n'était son article L.253 bis, repris par le code des pensions militaires qui stipule : "Ont vocation à la qualité de combattant et à l'attribution de la carte de combattant... les membres des forces supplétives françaises possédant la nationalité française à la date de la présentation de leur demande ou domiciliés en France à la même date".

L'exigence de la domiciliation en France ou de la nationalité française exclut donc implicitement les anciens supplétifs, en particulier harkis, restés en Algérie après l'indépendance en 1962.

Alors qu'ils ont accompli les mêmes services que leurs compagnons de nationalité française, alors

que leurs services sont dûment reconnus par l'autorité militaire française, l'Office national des anciens combattants (ONAC) qui traite cette question (au sein de l'Ambassade de France à Alger), oppose une fin de non-recevoir systématique à leur demande légitime.

EGALITE PARFAITE

Cette disposition législative rompt de façon flagrante le principe d'égalité en instituant une différence de traitement injustifiée entre les anciens combattants qui ont accompli les mêmes services. La "stricte égalité" reconnue par la République se retrouve alors totalement vidée de son sens.

Le juge administratif et notamment sa plus haute autorité, le Conseil d'Etat, ne s'y est pas trompé en déclarant à maintes reprises cette disposition incompatible avec l' article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme qui prohibe toute discrimination fondée notamment sur "le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation".

En décidant que l' article L. 253 bis du code des pensions militaires et les mots : "possédant la nationalité française à la date de la présentation de leur demande ou domiciliés en France à la même date sont contraires à la Constitution", le Conseil constitutionnel est resté cohérent dans son rôle de gardien de la Constitution.

L' "égalité parfaite " entre anciens combattants qu'a appelé de ses vœux, à juste titre, le chef de l'Etat, le 13 juillet lors de la célébration du cinquantenaire des indépendances, ne peut aboutir que si le législateur fait suite à la décision du Conseil constitutionnel et supprime ces conditions d'attribution de la carte d'ancien combattant injustement restrictives.

Le moment n'est-il pas venu de "décristalliser", enfin, la reconnaissance de la Nation à tous ses anciens combattants, dans une stricte égalité ?



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