Magazine Concerts & Festivals

Rencontre avec Grand Corps Malade pour la sortie de Troisième Temps.

Publié le 20 octobre 2010 par Notsoblonde @BlogDeLaBlonde

grand corps malade-1-12 copie

Jeudi 14 octobre 2010. Grand Corps Malade aka Fabien Marsaud s'apprête à sortir son troisième album, intitulé "troisième temps" (paru le 18 octobre). Ce soir, il a donné rendez vous à plusieurs blogueurs au Réservoir, "son fief" où il a l'habitude d'organiser des soirées "ça peut chémar", soirées slam en petit comité auxquelles il aime participer.


"CA PEUT CHEMAR" TEASER
envoyé par manifeste. - Films courts et animations.  

Après avoir accueilli son public d'un soir avec chaleur et simplicité, fidèle à l'image qu'il véhicule depuis le début de sa carrière, ce mélange de proximité et  de décontraction naturelle, il interprète trois titres de ce nouvel opus. Pour "Roméo kiffe Juliette" et "Définitivement" il est accompagné d'un clavériste mais c'est seul qu'il interprète a cappella, "A l'école de la vie".

grand corps malade-1-9 copie
 

Les échanges qui suivront avec les invités seront l'occasion d'évoquer sa vie personnelle, ses projets, sa façon d'envisager le métier avec toujours autant de sincérité et d'humilité. Retour sur ces échanges en quelques morceaux.

(Le point de départ :) Ca peut chémar.

Pour Grand Corps Malade, l'aventure débute en 2003.  Fabien à l'époque a déjà passé  la tête par l'entrebaillement de la porte de salles de slam mais rien ne l'y a retenu. Il a trop vite conclu que ce n'était pas pour lui. Et puis un ami l'invite à venir l'écouter :  Après avoir perdu un pari, il doit honorer un gage qui consiste à slammer dans une salle parisienne. Fabien le suit. Coup de foudre. Début d'une histoire d'amour qui n'a jamais cessé depuis.

A cette époque, le milieu du slam à Paris se limite encore à une cinquantaine de personnes. Parmi elles Souleymane  Diamanka, Luciole, Ami Karim et Rouda.  Pour Fabien qui découvre ce milieu, c'est le début d'une aventure musicale et humaine jalonnée de rencontres marquantes.

Rencontres.

Attention,  Grand Corps Malade ça n'est pas un homme seul, contrairement à ce que peut laisser penser son nom de scène. C'est une équipe. Celle dont Fabien s'est entouré dès les premiers moments et qu'il n'a jamais quittée. Quand on lui demande s'il pourrait travailler autrement qu'entouré de ses compagnons-de-toujours il répond simplement qu'il n'en voit pas la nécessité et qu'il n'en n'a tout simplement pas envie. Il dit aimer "l'ambiance colo des tournées", trouver que les échanges -même un peu musclés- sont plus faciles à gérer de cette façon.

Autour de Grand Corps malade il y a effectivement cette famille musicale, celle du coeur. Et puis bien sûr il y a aussi la famille, la "vraie", celle du sang.  Sur son dernier album le titre "Définitivement" évoque sa paternité à venir. Il explique que depuis qu'il a écrit ce morceau son fils est né (il y a cinq mois) et il  avoue que les émotions qui l'ont submergé sont au delà de ce qu'il avait imaginé et confié dans ce texte.

Underground

Alors qu'on lui demande si la naissance de ce premier enfant n'a pas été suffisante pour le contraindre à reporter la sortie de l'album et la tournée qui va avec, il rétorque que "pour être un bon père, il faut être épanoui" et explique qu'il n'a de toute façon jamais été du genre à enchainer les dates de tournée, se limitant toujours à 2-3 concerts d'affilée pour pouvoir "rentrer chez lui et garder les pieds sur terre, ne pas être déconnecté de la réalité".  De sorte à ce que ses projets professionnels n'interfèrent jamais avec sa vie personnelle.

Il continue aussi à participer à des soirées slam et en organise régulièrement. "Je resterai à ma place et ma seule vraie place est sur scène" chante t'il sur 1er janvier 2010 (titre de troisième temps.2010).

Il dit aimer aussi discuter avec son public après les concerts pour avoir des retours sur ce qu'il fait, de la part de ceux qui le suivent.  Pour rester en prise directe avec la réalité. Alors bien sûr depuis ses débuts, "tout est allé très vite", il le reconnait mais "ça ne m'a jamais donné le tournis" souligne t'il. Il avoue que l'aventure l'a mené au delà de ses espérances  et qu'aller à l'étranger pour se produire à Bamako, Beyrout, ...c'était inespéré ce qui ne l'empêche pas de souhaiter  au fond que "la vie est encore longue" et lui réserve encore de belles surprises comme celles là.

Je viens de là. Saint Denis.

Grand corps malade c'est un artiste, un parcours, mais c'est aussi une ville. Saint Denis. (Cf le titre éponyme de son premier album Midi 20 (2006)  et  Je viens de là (Enfant de la ville.2009)). Quand on lui demande si son fils grandira comme lui, à Saint Denis, il répond  un peu surpris qu'évidemment, pour l'instant, il y vit. Qu'il est inscrit à la crèche de Saint Denis, "normal, quoi" avec un sourire qui souligne l'évidence de la réponse.

Comprenez que ce n'est pas parce qu'il a rencontré le succès que Grand Corps Malade a changé (cf Underground, sur le second album "Enfant de la ville" 2008). Il précise aussi que, si elle n'apparait pas encore sur la liste provisoire des dates de la tournée, il se produira bien sûr dans le 93 et idéalement à Saint Denis parce c'est "chez lui".

  

A la recherche. Toucher l'instant.

Concernant son travail, il dit ne pas être capable de composer les arrangements qui accompagnent ses mots. Alors que, dans le public, on s'en étonne, constatant la parfaite harmonie entre les mélodies, sa voix et ses textes, il l'explique par le talent des musiciens qui l'accompagnent sur ses différents projets. En toute humilité.

Pour ce qui est de ses sources d'inspiration, il reconnait puiser ses idées de départ dans la vie de tous les jours, les rencontres surtout. Il précise ne pas écrire sous l'impulsion d'une idée mais laisse son sujet mûrir quelques jours et ne s'attelle à l'écriture que lorsqu'il sent qu'il est prêt. Les mots viennent alors avec fluidité.

Alors qu'on lui demande s'il se considère comme un "extrasensible" il avoue qu'il est plutôt dans sa nature "d'intérioriser les évènements", qu'il n'est "pas un impulsif " et que ses textes sont sans doute une façon d'extérioriser ce qui le touche mais qu'il ne se considère pas non plus comme un être particulier.

J'écris à l'oral.

Il écrit d'accord mais pour lui le slam c'est de "la poésie à l'oral qui ne se concoit que sur scène" (cf 1er janvier 2010. Troisième temps.2010). "J'écris des textes pour les faire vivre dans une bouche". Ce qui l'anime dans son travail c'est de partager des scènes, de faire des rencontres ce qui lui semble impossible à travers un album.  Cette dimension de partage est ce qui lui manque dans cette partie là de son art.

Quand on lui demande quels sont les poètes qui l'inspirent il répond, sourire malicieux à l'appui, en citant les noms de scène de ses amis : Luciole, Souleymane Diamanka..."Et parmi les poètes plus "classiques" comme Rimbaud, Mallarmé...?"  lance celui qui n'en démord pas. " Georges Brassens, Jacques Brel, Barbara, Renaud... Je revendique une culture de l'oral. Avec les poètes "classiques" j'ai un problème : Il me manque leur regard et leur voix."

Le retour de Joe

On se souvient de ses collaborations. J'ai en tête son duo avec Oxmo Puccino pour un titre que j'ai vraiment beaucoup aimé "A la recherche" (Enfant de la ville.2009) ou sa participation au projet de Mathias Malzieu (la Mécanique du coeur, actuellement en cours d'adaptation sous forme d'un film d'animation). Il explique qu'il poursuit ces projets. Que Charles Aznavour chante avec lui sur ce dernier album (Tu es donc j'apprends) et qu'il est accompagné d'Elise Oudin Gilles, une chanteuse lyrique, le temps d'un titre (L'heure d'été). Qu'il prend part au film d'animation réalisé par le frontman de Dionysos où il prêtera sa voix à Giant Joe, le personnage qu'il incarne dans cette fable poétique).

Grand Corps malade est un artiste dont le travail et les ambitions me touchaient beaucoup. Cette rencontre m'a permis de réaliser que l'image qui se dégage de ce qu'il fait est fidèle à ce qu'il est. Une bien belle personne, en somme.

Ce billet a été prétexte pour moi à revenir sur beaucoup de titres dont il est l'auteur et que j'ai beaucoup aimés. Voilà ma pépite extraite de Troisième Temps, son album sorti ce lundi 18 octobre : Paroles réduites à l'essentiel, scandées pour égrener les temps forts d'une histoire d'amour avec subtilité. Je suis littéralement charmée.

Quelques photos du soir pour mettre des images sur les mots et leur donner un peu plus de vie:


Retour à La Une de Logo Paperblog