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Docteur Du Ming

Publié le 13 octobre 2010 par Mo
Docteur Du Ming

Han – Zhang © Casterman – 2008

Du Ming est un jeune interne lorsqu’il rencontre Zhang Qian, étudiante en médecine. Ils butinent dans leurs études, n’assistant qu’aux cours qui les intéressent et prennent l’habitude de se retrouver sur la terrasse du toit de leur école. Zhang voue rapidement une admiration insensée pour Du Ming et une tendresse particulière s’installe entre eux.

Le diplôme en poche, ils trouvent un poste dans des hôpitaux différents et leur amitié se délite. Ils se voient ponctuellement, Zhang entretient une correspondance à sens unique avec Du Ming. Les choses basculent le jour où Du Ming apprend que la jeune fille s’est suicidée. Il se lance dans une (en)quête personnelle dont on va progressivement découvrir les motivations.

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Etrange, mélancolique et captivant. Voilà en trois mots comment je vois ce thriller médical qui m’a prise au dépourvu. Repérés lors de ma participation au « Challenge BD » de MrZombi, les visuels proposés dans la critique de flof13 m’ont donné envie de lire ce manhua qui adapte un roman de Jinglong Han. Seule aux commandes, Jing Zhang campe un univers cohérent qui ne se dévoilera que vers la fin et ça… c’est assez jouissif.

C’est une rencontre dans un lieu insolite qui nous emmène progressivement dans les méandres de ces planches où les contrastes sont permanents. Avec une certaine poésie, les thèmes de la vie, de la mort mais surtout du suicide sont évoqués. Une dualité que l’on retrouve chez Zhang, farouche et dévergondée, ambigüe sur ses sentiments et son rapport à la mort. Quant à Du Ming, tantôt placide tantôt hautain, tantôt solitaire tantôt confident et assez touchant quand il navigue entre ses souvenirs et la réalité pour comprendre le geste de la jeune fille. Passé et présent, une nouvelle dualité de ce récit, les enchaînements sont fluides, cohérents, l’auteure ne nous perd pas et ressert lentement l’étau du thriller. L’essentiel de l’histoire se focalise autour de Du Ming et de Zhang Qian, personnages mystérieux aux réponses énigmatiques qui tantôt provoquent, tantôt appellent à l’aide. Les mots s’entrechoquent, vérités crues dites avec innocence. Culpabilité, nostalgie, regret…

… ces sentiments, Jing Zhang va s’aider des dessins pour les faire ressortir. Crayon et palette graphique proposent ici des ambiances graphiques douces, alternant gros plans et grands angles de façon harmonieuse, le dessin sait être aérien aux moments opportuns. Les jeux d’ombre et de lumière matérialisent les décors, leur donne une âme et accentuent l’ambivalence des personnages. Ces personnages effrontément beaux m’ont fascinée, inquiétants parfois, fragiles… souvent. Je n’ai pu m’empêcher de faire le parallèle avec Orange, un manhua de Benjamin, dans lequel les expériences graphiques sont assez proches de celles de Jing Zhang pour un résultat quasi identique : la douceur et la beauté des dessins (en partie des photos retouchées) contrastent fortement avec la dureté du thème (le suicide). Ici toutefois, la cohérence du récit est préservée ce qui n’était pas le cas pour Benjamin. Je n’ai pu m’empêcher non plus de penser à Undercurrent car  j’y ai retrouvé la même mélancolie, le même vague à l’âme.

Une lecture que je partage avec Mango.

Mango

PictoOK
J’ai aimé cette ambiance particulière, ce fort contraste entre la beauté des dessins et la noirceur du récit mais j’invite  les âmes sensibles à s’abstenir de cette lecture (quelques scènes difficiles à soutenir). La vie, la mort, le suicide… des sujets qui naturellement se nourrissent de fantasmes et de peurs. Sur de tels sujets, je crois qu’il faut se « le sentir ». Certains pourront trouver le récit malsain et les ambiances glauques, d’autres se perdront dans la beauté des visuels ou l’envie de percer à jour Du Ming… Je pense qu’il n’y a pas de demi-mesure pour cette lecture : ça passe ou ça casse.

D’autres avis : la chronique de Sceneario, de le Kinorama, celle de flof13 qui m’a fait découvrir cet album et celle de orient-extreme.net (attention, ça spoilie sur les deux derniers avis).

Extraits :

« – Tu as entendu parler de moi peut être ?
– …
– Qu’est-ce qu’on t’as dit ?
– On dit en médecine  clinique… Zhang Qian le fait pour 10 Kuais* » (*1 euro) (Docteur Du Ming).

« – Tu sais comment tu aimerais mourir ?
– Je me suiciderais, je pense. Pour garder l’embarras du choix » (Docteur Du Ming).

« – Ça te fait peur la mort ?
– Non, ça m’est égal de vivre, mais je n’ai pas de raison de mourir. Si j’avais une bonne raison, peut-être… Peut-être que je pourrais mourir » (Docteur Du Ming).

« La vie est un despote. Elle ne nous rend heureux que si l’on se résigne. Et finalement nous ne sommes pas heureux » (Docteur Du Ming).

Docteur du Ming

Docteur Du Ming
One Shot

Éditeur : Casterman

Collection : Hua Shu

Dessinateur : Jing ZHANG

Scénariste : Jinglong HAN

Dépôt légal : juin 2008

ISBN : 978-2-203-01557-9

Bulles bulles bulles…

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Docteur Du Ming – Han – Zhang © Casterman – 2008


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