Magazine Société

Topologie internelle

Publié le 23 octobre 2010 par Tudry

Topologie internelle

La sainteté dépend non du lieu (topos) mais de la manière d'être (tropos).

Saint Jean Chrysostome

Le pays spirituel de l'homme a l'âme purifiée est au-dedans de lui.

Saint Isaac le Syrien

Que m'est la France ?

Une langue.

Cette langue dans laquelle je suis établi. C'est dans, par et avec cette langue-là que je rencontre les écrivains qui ne sont pas de ce pays. C'est également par cette langue que je retranscris en moi les Paroles du Verbe, l'Ecriture et la pensée des Pères.

Ce que j'ai, selon moi, reçu de meilleur en moi, en dehors de cette langue, me viens d'ailleurs, d'Orient, d'Italie, de Russie, d'Espagne...

En dehors de quelques grands écrivains, que m'a donné la France tel qu'il me fut donné de la connaître : une éducation « nationale et obligatoire » très très médiocre, des « idées » délétères, une musique affligeante, atroce le plus souvent...

En outre, qu'est-ce cela ? Suis-je vraiment chez moi à Vezoul, à Paris, à Niort ou a Nice ? Non, irrémédiablement, non !

Ce rejet (qui n'en est pas un), me dira-t-on n'est-il pas, précisément, fondamentalement français ? Peut-être. Peut-être bien que cette dichotomie entre le peuple et le pays « réel », « charnel », imposée par la constitution à la fois progressive et révolutionnaire de ce pays-tel-qu'il-est n'est pas étrangère à cet état, à cette sensation. Mais, toutefois, ce « rejet » n'est pas le crachat haineux perpétuel. Cet esprit là, pour le coup, m'est étranger. Comme m'est étrangère la défense inconditionnelle d'une certaine « perpétuité française », d'une certaine « idée de la France ». Cet essentialisme me paraît trop contraint par la mythification.

Sans tomber dans aucune forme de relativisme. Bien des éléments concrets de la vie d'un peuple, de sa configuration particulière peuvent être des facteurs amenant progressivement à la foi. Mais, une fois atteint cet « état », tout comme le Christ se situe au-delà de ces attachements (sans les condamner expressément) il nous faut apprendre à les recevoir à la place qui est leur.

C'est, spirituellement, que je me détache et me rattache à ce pays. Encore que. Il ne m'est donné de vivre ce « pays » qu'à travers deux éléments qui sont loin de lui être consubstantiels. Dans le désordre car les deux sont indissociables : la langue française et « mon pays réellement charnel », c'est-à-dire un petit coin de Bretagne orientale... (les deux sont unis, et indissociables, dans cet élément résurrectionel qu'est la mémoire !)

Les lieux, les places, les endroits, boueux, gris, argentés, pluvieux, les odeurs, les relents, les lieux qui font liens, avec une histoire particulière, avec les amis (qui ne le sont plus ou qui le sont encore), la famille (surtout), les terrasses de café, falaises, ravins, rochers, rivières et ruisseaux, bouts de plage, ruines de châteaux... mais surtout pas une idée, lointaine, centralisée, abstraite pour tout dire ! Les grands ensembles m'ennuie et ne me semblent présenter, à peu près aucun intérêt mais beaucoup d'ennuis ! L'Etat, ou l'Empire m'est d'autant plus proche qu'il me fiche la paix... De mon grand-père, catholique très « pratiquant » (puisque le terme est en vogue...), prisonnier de guerre (pour la France) j'attendais surtout ses histoires de sourciers (qu'il était lui-même, en toute discrétion), de jardinier génial et les secrets du cidre, de l'eau-de-vie, des champignons et des étoiles (ah les soirées d'automne et d'hiver qui permettaient d'amoureuses observations après quelques verres de  vins chauds...).

Et pourtant, c'est ici que commence l'estrangéisation.

[...]


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Tudry 471 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazine