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Dans la machine d’un voyage organisé japonais (suite)

Publié le 30 décembre 2009 par Ledeclic

Récit d’aventure sur l’île de Guam, dans un voyage organisé japonais. Suite de l’article précédent.

Dans la machine d’un voyage organisé japonais (suite)

« Vous ne pouvez pas vous éloigner de la plage, les gars », nous répond-on gentiment. « Vous êtes sous la responsabilité de HIS et devez rester dans le circuit normal pour votre propre sécurité, mais nous pouvons vous déposer quelque part en bus si vous le souhaitez ». Bouches bées, nous nous demandons soudain si faute de Guam, nous ne serions pas à « Guam-Tanamo ».

A ce moment précis, nous abandonnons l’idée d’explorer la jungle et décidons d’assumer pleinement notre voyage organisé. Nous demandons donc au chauffeur du bus de nous déposer près d’un distributeur d’argent. Le chauffeur nous lâche près d’un centre commercial au milieu de nulle part.  Après quelques heures à flâner dans les magasins, nous retrouvons notre chauffeur, munis des précieux billets verts. Il nous faut nous rendre à l’agence HIS afin de réserver un forfait « dauphins, masque et tuba et banana boat » pour la journée du lendemain. Notre interlocutrice, Hitomi, est une Japonaise vivant à Guam depuis huit ans. Elle appelle l’agence HIS à Tokyo pour les informer de notre soudaine décision de participer à ces activités. Une fois notre réservation confirmée, nous nous entretenons brièvement avec elle au sujet du style de vie nocturne sur l’île.

« HIS organise une soirée au Tumon Village, il y aura un barbecue à volonté et des danses traditionnelles », explique Hitomi. « Mais où vont s’amuser les habitants de l’île ? » demande-je peu enthousiaste à l’idée d’une soirée entière à observer les danses dont nous avons déjà fait l’expérience. « Vous par exemple, où sortez-vous le soir ? ».

Dans la machine d’un voyage organisé japonais (suite)
Hitomi semble gênée et lâche vaguement le nom d’un bistro. « Je ne suis pas vraiment censée vous indiquer autre chose que les activités proposées par HIS », explique-t-elle. Les chauffeurs de bus auxquels nous demanderons plus tard ne nous indiqueront que des boîtes à striptease, dont l’île regorge.

Le lendemain, nous sommes sur le ponton à midi, prêts à observer la faune aquatique du Pacifique et à chevaucher un amusant bateau jaune gonflable. Les Japonais ont déjà mis leur masque et leur tuba. Le commandant de bord, Charlie, a tout du vieux loup de mer ; Visage buriné par la mer, longs cheveux noirs, torse musclé et tatoué. Il explique les modalités du périple dans un japonais clair et précis. Charlie travaille pour la société Ocean Spirit, en affaires avec HIS. Le fameux baril de thé glacé est à bord ainsi que quelques biscuits apéritifs sur lesquels nous nous jetons faute de barbecue.

Après une heure à voguer sous une pluie torrentielle, le ciel s’éclaircit d’un coup. Mais pas l’ombre d’un dauphin. J’engage la conversation avec Hajime, un jeune étudiant en short de bain. Après quelques politesses protocolaires, il m’avoue que « c’est la première fois que [qu’il] voyage à l’étranger ». Je le regarde avec des yeux ronds : j’avais oublié que nous n’étions pas au Japon.

Dans la machine d’un voyage organisé japonais (suite)
Vient l’heure du banana boat. Nous nous mettons en rang pour attendre notre tour, puis savourons dix petites minutes sur la banane gonflable. Rien de tel pour s’en remettre que quelques bretzels secs. Ni une ni deux, nous enfilons masques, tuba et gilets de sauvetage pour barboter quelques dizaines de minutes au milieu des poissons avant de mettre le cap sur le rivage.

Nous rentrons un peu frustrés par le manque de qualité des services proposés. Mais faute de dauphins, on nous offre un T-Shirt décoré du logo Ocean Spirit que nous acceptons aimablement. Le lendemain, le bus passe nous prendre à quatre heures du matin pour nous emmener à l’aéroport. Nous quittons Guam dans les choux, comme nous y sommes arrivés. Reste dans la bouche une vague odeur hamburger et l’amertume d’avoir perçu une île acculturée par Américains et Japonais, déchirée par les vagues de colonisation, d’abord espagnole, puis américaine pour être finalement transformée en une sorte de vaste Club Med.


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