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T'as envie d'être président, toi ?

Publié le 03 novembre 2010 par Lheretique

Il est intéressant, le billet de Philippe Cohen de ce matin, sur le site de Marianne2 : il analyse le peu d'enthousiasme des candidats putatifs à l'élection présidentielle de 2012. Pas de ceux auxquels les pronostics laissent peu de chance, mais ceux qui peuvent raisonnablement être conduits à la tête de la nation : Martine Aubry, DSK, Sarkozy lui-même si la gauche ne lui oppose pas un candidat crédible et suffisamment populaire. On pourrait évidemment rêver, et j'en fais partie, d'un candidat centriste qui ferait consensus dans l'électorat centriste, hélas, cette famille-là est complètement éclatée, et en dépit des efforts méritoires de Jean Arthuis pour la recomposer, je pense que c'est décomposée et avec pléthore de candidats qu'elle se rendra au rendez-vous de 2012, hypothéquant à coup sûr ses chances.

Il me semble toutefois que Philippe n'aborde le sujet que par un seul oeil de la lorgnette : ce n'est pas exactement que ces candidats pensent que la France soit irréformable. Non, plus exactement, c'est qu'il va surtout falloir prendre des mesures difficiles et impopulaires parce que la France est au bord du gouffre, et que la génération politique qui endossera de redresser notre pays se sacrifiera.

En ce sens, Philippe Cohen a raison de constater qu'une Christine Lagarde et un Pascal Lamy appellent à une gouvernance mondiale : ils n'ont surtout pas envie de se coltiner le sale boulot. Réflexe bien français que de refuser d'assumer ses responsabilités. Mais réflexe bien français aussi, au moins dans la sphère politique, que de promettre de raser gratis.

Sans promettre des larmes, de la sueur et du sang, je ne répéterais jamais assez combien François Bayrou me semblait le seul candidat en 2007 à avoir proposé un programme politique honnête, et de ce point de vue, combien il demeure l'un des rares aujourd'hui à dire la vérité aux Français sur ce qu'il ferait comme président.

Je note avec satisfaction que François Hollande s'engage dans la même direction, puisqu'il a d'ores et déjà annoncé qu'il assommerait la France et les Français d'impôts si jamais il était élu. Bien sûr, je ne suis idéologiquement en rien en accord avec le système de taxes que Hollande veut imposer, mais je lui reconnais le mérite de la cohérence. D'un point de vue étatiste et socialiste, il faudra au moins cela pour assainir nos comptes publics. Et je dois aussi admettre que j'agrée certaines de ses propositions, par exemple celle de laisser la maîtrise d'au moins un impôt à chaque niveau de collectivité.

Pour revenir à DSK et Martine Aubry, qui sont des réformistes, ils sont gênés aux entournures parce qu'ils n'osent pas dire clairement ce qu'ils envisagent devoir faire. Au demeurant, ils sont confrontés au même problème que Ségolène Royal en 2007 : sur une ligne réformiste, elle aussi, elle a été contrainte de voir le projet du PS se substituer au sien. Si elle a perdu l'élection, c'est surtout parce qu'elle n'a pas osé l'affrontement avec l'appareil du PS. C'eût pourtant été nécessaire pour espérer être crédible.

Quant à Nicolas Sarkozy, les Français savent désormais à quel point il brasse du vent et promet n'importe quoi. Il n'a pas de bilan à défendre et ne sera pas crédible quoi qu'il promette, d'autant qu'il a usé largement toutes les ficelles dont il pourrait se prévaloir. C'est un homme qui confond la parole et l'action, et dont la foi dans le texte est telle qu'il croit, déformation d'avocat sans doute, qu'il suffit qu'il soit figé dans le marbre pour qu'il se réalise en actes.

Philippe Cohen observe que les intellectuels sont plus prolixes que les politiques : oh, ça, pour être prolixes, ils le sont. Le problème, c'est que toujours facile d'être prolixe quand on promet la Lune, et que les propositions se déclinent sous la forme de "yaka" et de "faukon". L'histoire nous enseigne l'incompétence crasse de la plupart des intellectuels quand ils accèdent à des postes de pouvoir, même s'il a existé quelques exceptions. Si les politiques demeurent prudents, c'est peut-être qu'ils ont une conscience bien plus nette de l'ampleur de la tache...


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