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Le Président, sa femme et moi

Par Gjouin @GilbertJouin
Le Président, sa femme et moi
La Grande Comédie
40, rue de Clichy
75009 Paris
Tel : 01 48 74 03 65
Métro : Trinité d’Estienne d’Orves
Une pièce écrite et mise en scène par Bernard Uzan
Avec Michel Guidoni (Thomas Barowski/Antoine Girard), Jean-Marie Lamour (Le colonel Tanguy), Aurélie Nollet (Avril), Alexandra Vandernoot (Isabelle Martini-Barowski)
Ma note : 6,5/10
L’histoire : Le Président de la République, Thomas Barowski, a décidé d’utiliser un sosie afin de pouvoir être présent sur tous les fronts. Antoine Girard, un vendeur de canapés, choisi par les services secrets comme étant le Français ayant le morphotype le plus proche du Président, est réquisitionné pour raison d’Etat… Le colonel Tanguy et sa charmante adjointe Avril, ont été chargés de cornaquer Antoine dans ses missions. Mais Isabelle Martini-Barowski, l’épouse du chef de l’Etat, croise la route du sosie…
Mon avis : Le rideau s’ouvre sur un salon cossu et richement décoré de l’Elysée. Nous sommes d’emblée dans le sujet, dans le secret des dieux… Antoine Girard, simple quidam, modeste banlieusard, vient de tirer le gros lot : il est le Français qui possède le plus de ressemblances avec l’actuel Président de la République. Enlevé par les services secrets, il va être contraint d’accepter de tenir le rôle de doublure officielle du chef de l’Etat qui veut « être visible partout et présent nulle part »… Effectivement, parfaitement relooké, la ressemblance avec l’original est proprement stupéfiante.
L’idée de départ est originale. Elle ouvre sur une situation qui ne peut qu’engendrer une kyrielle de quiproquos. Cette comédie est un habile mélange entre une pièce de boulevard et un spectacle de chansonniers. Il s’inscrit dans la tradition satirique française qui consiste à brocarder joyeusement le pouvoir en place. Cette pièce aurait pu être programmée au Théâtre des Deux Anes. D’ailleurs, Michel Guidoni en a été longtemps un des pensionnaires.
Michel Guidoni, parlons-en. Il hérite là d’une merveille de rôle. Non seulement il imite plutôt bien la voix du Président et il reproduit sa gestuelle si particulière, mais il lui ressemble vraiment physiquement. Même stature, même couleur de cheveux, même morphologie. C’en est parfois troublant tant le mimétisme est parfait. Evidemment, pour le thème de cette pièce, un acteur comme Michel Guidoni, c’est de l’or en barre. Il rend le sujet crédible. Et on se dit pourquoi pas ?
Pour aussi surréaliste qu’elle soit, cette pièce est astucieusement montée. Si on en accepte le postulat, tout ce qu’elle nous montre serait plausible s’il était projeté dans la réalité. Tout, ou presque ; car il y a certaines situations qui seraient totalement irréalistes. Il n’empêche que ça tient la route.
Ça tient la route parce que Michel Guidoni est entouré de trois comédiens qui font tout pour la faire passer. Jean-Marie Lamour et Aurélie Nollet tiennent leur rôle avec une telle conviction qu’on y croirait presque. Ils sont tellement à fond dans leurs personnages qu’ils apportent une certaine crédibilité à l’histoire. Pour Alexandra Vandernoot, le challenge est plus délicat car elle doit jouer la seule personne ignorant tout du subterfuge. Autant Tanguy et Avril peuvent se cantonner dans le premier degré, autant elle doit faire preuve de beaucoup de précision pour nous laisser dans le doute. Est-elle un peu nunuche ou est-elle vraiment maligne ? En tout cas, elle se sort de ce rôle entre contrepoids avec beaucoup de charme et d’élégance.
Visiblement, le public, qui connaît le sujet de la pièce, est venu pour s’amuser. Et il s’amuse. Devant la caricature – même si comme pour toutes les caricatures, le trait est exagérément grossi -, les spectateurs rient vraiment de bon cœur. Certains reprennent même tout haut certains bons mots. On n’est pas tout à fait au théâtre. L’ambiance est bon enfant. On s’esbaudit en famille. Il est vrai que notre Sarko est une mine inépuisable pour les humoristes. Même si, parfois, Guidoni en rajoute et en fait des kilos, ça fait rire.
J’ai trouvé que le texte tenait bien la distance. Hormis le passage un peu longuet où Michel Guidoni se met à délirer autour du prénom de sa femme, Claire (fortement influencé par la scène culte du Dîner de cons avec les variations autour du prénom « Juste »), la trame est joliment menée. Il faut rendre cette justice à l’auteur… Bien sûr, c’est un festival de clichés, avec une profusion de bons mots et quelques jeux de mots un peu faciles, mais la belle énergie des comédiens sauve tout le temps le coup. J’ai aimé également ce petit morceau de bravoure parfaitement cocasse où Alexandra Vandernoot passe en revue les femmes ministres du gouvernement (monologue mis à jour depuis le remaniement, s’il vous plaît). Et puis, bien sûr, on ne peut que saluer la performance accomplie par Michel Guidoni…
J’étais assez réticent au départ, et puis, au fur et à mesure du déroulement de l’action, je me suis laissé prendre au jeu devant cette réal-fiction plutôt réussie. De toute façon, une telle pièce a son public, un vaste public amateur de cette tradition chansonnière évoquée précédemment et, rien que pour ça, elle mérite de tenir l’affiche encore un bon bout de temps. Dix-huit mois ? Jusqu’aux prochaines Présidentielles ?...

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