Magazine Culture

Édito sur les classements de fin d'année à venir

Publié le 03 décembre 2010 par Deschibresetdeslettres
Édito sur les classements de fin d'année à venir`Je ne sais pas de quoi parler, impossible de dépasser le bégaiement de quelques louanges. Heureusement nous sommes en décembre. Je peux donc me lancer dans les bilans annuels. Ne plus rien faire d'autre que du derushage, du tri et de la mise en forme de classements en tous genres. Plusieurs réflexions à ce sujet.
1) Je suis incapable de produire un discours global sur l'année écoulée. C'est à dire un texte qui tient ensemble les enjeux majeurs et les inclinations particulières de 2010. Je suis incapable de le faire et je persiste à dire qu'il ne faut pas essayer. On est dans un impossible qui est tout à la fois un symptôme, au sens de quelque chose de parlant. Autrement dit, se confirme la tendance de plus en plus évidente selon laquelle l'hyper-modernité, c'est la multiplication infinie des chemins, un jeu d'éclosions tellement décuplé qu'il en perd toute lisibilité. Ça rejoint à ce titre ma lecture du moment, "Le Réel : Traité de l’idiotie" de Clément Rosset. L'offre musicale est devenu un Réel – vide par nature – qui n'arrive même plus à se parer des significations imaginaires de son temps. Trop plein de possibles = règne de l'aléatoire = assèchement du sens. On pourrait ainsi tout aussi bien tenir une parole, la justifier, et produire la même parole contraire tout en gardant sa légitimité ; le panel de disque sortis cette année est prétexte à toutes les hypothèses mais ne converge vers aucune nécessité, tout au plus quelques remarques anecdotiques dont on pourra bien se passer. Il ne nous reste ainsi que le triste choix de l'énumération. Revenir aux éléments premiers, c'est à dire des disques, qui ne communiquent pas entre eux, ne se nourrissent pas les uns les autres, des disques qui font leur vie et s'y débrouille bien (d'autres moins). La seule chose que je m'impose, c'est une politique de quotas. Parce qu'effectivement, si je ne peux rien dire de sérieux sur rien, si je suis condamné à rester dans un relativisme quasi absolu, autant y aller jusqu'au bout, en essayant de faire apparaître dans mes listes autant de genres musicaux que possible, avec l'effort de ne pas préférer l'un sur l'autre – puisque de toute façon je n'aurais pas de raison spéciale de le faire. Et pour chaque disque cité, je renverrai également sur d'autres disques qui auraient pu être à la même place, que ça n'aurait pas changé grand chose. Comme quoi.
2) En plus d'un top 50 albums, je vais faire un flop 20. Et je sens déjà les grincements de dents en commentaires. Honnêtement, ce n'est pas de la provoc' que de dire du mal de disques adulés un peu partout. En fait, ce qui me questionne beaucoup ces temps-ci, c'est le statut de la critique négative sur Internet. Pour le dire vite : on peut tout dire, n'importe comment, sur n'importe quoi, du moment que ce soit du côté du compliment. À l'inverse, émettre des réserves, parler de son désamour, c'est très mal perçu. Alors on dit : « Tant que c'est bien argumenté, tout peut se dire ». Mais c'est globalement très faux. Parce qu'il y a aucune symétrie qui s'effectue entre les différentes tonalités de critiques. Concrètement, personne ne viendra vous dire qu'il aime aussi ce disque mais que votre argumentation est frauduleuse, ou qu'il n'aime pas ce disque et que votre gentillesse n'a aucun sens. Or, ce que cela entraîne, c'est une poussée de la critique / chronique vers l'outil promotionnel bénévole. Peu importe le contenu – là il y a une tolérance effrayante –, seule compte l'exposition, et au final, la note – si celle-ci est bonne. On pourra bien sûr trouver des contre-exemples, avec les sites qui font autorité comme Pitchfork, mais il me semble que le cœur de la blogosphère s'affaiblit par trop de courtoisie. À mon sens, bien aimer un disque n'est pas plus précieux que de ne pas en aimer un autre. Ça n'a pas plus de valeur, ça n'est pas plus respectable et surtout, ce n'est pas plus personnel ou intime. Ces deux choses se valent, fonctionnent en miroir, et à ce titre devraient être considérées avec la même décontraction. Enfin, taire le négatif et ne parler que du positif, c'est se priver d'un effet de contraste, du vertige de l'amplitude, et c'est le risque, paradoxalement, que l'éloge ne soit plus perçu que comme une politesse. Je dis ça parce souvent, je ne sais plus qui aime quoi, je n'arrive pas à savoir ce qui saisit vraiment tel ou tel blogueur, ce qui importe plus pour lui qu'un simple regard sympathique. Alors, simplifiez-moi la tâche, mettez des mauvaises notes et faites vous aussi des flops !
P.S : mes classements seront égrainés, petit à petit, de la semaine prochaine jusqu'à fin décembre.

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Deschibresetdeslettres 2070 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines