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Eddy Mitchell et l'esprit grande prairie, John Wayne et John Ford pour un lundi en banlieue

Publié le 06 décembre 2010 par Petistspavs

Cette fois, j'ai cherché une image pour illustrer un titre musical, ce qui contredit le principe de ce calendrier de l'avent : une image, puis des choses autour.

L'image se devait être d'un western et dans le genre emblématique, j'ai choisi le superlatif : la scène finale de The searchers (La prisonnière du désert) de John Ford (1956). John Wayne a "fait le travail", comme disent les américains, il s'est sali les mains, on ne sait pas s'il est un héros positif ou négatif et tout ça on s'en moque. Il a fait ce qu'aucune bête du désert n'aurait fait, la famille traditionnelle américaine wasp  va pouvoir se reconstruire, le couple sera le bon et John Ford, à l'issue d'un de ses films majeurs, va tourner une scène majeure du cinéma, la scène qui dit tout.

Après en avoir chié pendant des années pour retrouver sa nièce capturée par des indiens, après s'être brulé au soleil du désert, gelé les couilles dans les solitudes blanches des montagnes désolées, s'être saoulé avec des mexicains et castagné avec plein de losers, John Wayne ramène la jeune femme (Nathalie Wood) chez elle. Il reste dehors sur le seuil de la maison familiale. Ils sont plusieurs à passer. Il reste dehors, il attend. Le couple idéal passe le seuil, il reste dehors, il attend. Quand tout le monde a passé le seuil, quand la famille traditionnelle est reconstituée, quand le malheur cède la place, il regarde un peu les événements, mais il devient évident que ces événements ne sont plus de son monde. Il a fait le job. Il se retourne, la solitude, le passé, son histoire personnelle sont dehors, tapis dans le désert, dans la Prairie. C'est un héros.

Capturer

Le titre musical est celui que je préfère (les radios aussi, apparemment) du nouvel album plutôt réussi de ce vieux Shmoll,L'esprit grande prairie, c'est une chanson qui traverse mon cerveau et atteint mes oreilles par les fils, connexions, impédances et bande passante (la bande passante me rappelle toujours cette chanson de Georges Brassens, Les passantes, qui me fait quelque chose) de  mon nouveau casque Koss, certains matins où je n'ai pas envie de faire partie du troupeau des bestiaux promis à l'abattoir, que mon regard se porte "de l'autre côté du fleuve", la Seine en l’occurrence, sous le pont de Choisy.

Oui, Eddy Mitchell nous raconte depuis des lustres nos petites vies à crédit et en stéréo. C'est une sorte de sociologue du rock, spécialisé dans la vie quotidienne des gens ordinaires, de la Fille du Motel aux gosses de Mulhouse, pour qui ce sera toujours le blues.

Et je me surprends prenant une pose à la Flaubert et disant au peuple médusé "Eddy, c'est moi". Quand je regarde l'autre rive du fleuve, là où les choses se passent, où l'aventure commence, plus belle, plus excitante que jamais, je me dis, de ma toute petite vie, ouais les mecs, la grande Prairie, j'ignore si j'aurai la force de l'atteindre, mais je continuerai à en demander le chemin à mon GPS.


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