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Déjà mort

Par Borokoff

A propos d’Indigène d’Eurasie de et avec Sharunas Bartas 3 out of 5 stars

Déjà mort

Gena, un mafieux lituanien, doit partir en Russie pour régler des affaires avec la pègre moscovite. Il a promis à sa petite amie française, Gabrielle, qu’il reviendrait dans trois jours. Mais son rendez-vous avec la mafia tourne court et Gena tue un mafieux russe puis un policier avant de prendre la fuite avec Sacha, sa maitresse russe qui est une prostituée et qu’il connait depuis des années. Ensemble, ils décident de rejoindre Paris. Débute alors leur calvaire…

« Le projet, pour ce film, est de montrer la vie d’un personnage affecté par des situations extrêmes. Des situations où c’est l’instinct qui dirige les actes, où les règles du monde civilisé n’ont plus cours. L’idée, c’est qu’un problème en entraîne un autre. La situation de Gena fait que, pour continuer, pour s’en sortir, il est condamné à faire des choses qui aggravent son cas, qui s’ajoutent à son passif. Dont il voulait justement se débarrasser. »

Qui d’autre que le réalisateur et acteur principal d’Indigène d’Eurasie pouvait résumer lui-même dans des termes si clairs et si précis, si simples, l’ambition du film ? Indigène d’Eurasie est un film noir, âpre, une plongée fascinante dans l’univers poisseux et lugubre de la mafia russe que Bartas filme en connaissance de cause, ayant étudié ses rouages pendant plus d’un an avant de tourner. On sent sa bonne connaissance du milieu, son aisance à décrire et à raconter le fonctionnement d’une société pourrie où la mafia règne en reine, réussissant à corrompre sans mal la police, gérant les trafics de prostitution et de drogue, n’hésitant pas à tuer les témoins gênants, etc…

Indigène d’Eurasie est centré autour de la figure de Gena, personnage silencieux et patibulaire au visage mutique. C’est un polar sombre, sans ouverture ni rémission possible pour son personnage principal. Indigène d’Eurasie raconte les péripéties de Gena en Europe de l’Est qui vont entrainer sa déchéance ou plutôt sa descente dans les Ténèbres. Mais dans sa chute, c’est surtout la succession de ses mauvais choix qui impressionne. Comme un suicide latent, une accumulation telle de malchance qu’on finit par se demander s’il ne le fait pas exprès. Gena, superbement interprété par Bartas lui-même, apparait tour à tour pathétique et poignant, extrêmement seul, lui qui s’en même s’en rendre compte, s’enferme dans une spirale, un engrenage où chacun de ses actes l’isole un peu plus. Loin de son destin et de la vie amoureuse dont il rêvait. Au fond, Gena est un sentimental et inconsciemment, son amour pour Gabrielle à la recherche de qui il est parti le perdra. Il y a un côté romantique indéniable chez  lui. Gena poursuivi par la poisse.

Un film aussi froid et implacable, fermé et glaçant que Requiem pour un massacre de Klimov. La mise en scène est sèche et épurée comme le jeu de Bartas. On pourra regretter dans le scénario la présence et les épisodes un peu superflus du Français au service des mafieux russes. Mais les scènes à Moscou et les personnages de mafieux russes sont décrits avec un tel réalisme (rarement, la mafia russe aura été aussi bien dépeinte au cinéma) qu’ils font froid dans le dos. Pour longtemps…

www.youtube.com/watch?v=zY-1nLQ_YHk


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