éd. Gallimard, 266 p.
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Char et Camus ont tracé leurs œuvres et leur existence à l'époque d'une folle violence, tout deux dans l'exil, empruntant la terre neuve des libertés dont celle commune de l'écriture.
Dans ce cercle des résistances aux dictatures, les libres penseurs se sont croisés et se sont découverts un « arrière-pays » bien étrangement semblable. C'était en 1946. Cette première rencontre résonne comme une alliance d'après-guerre qui durera jusqu'à la fin, la mort de Camus, treize années de correspondance fraternelle. On connaissait les oeuvres largement commentées de Camus et de Char, beaucoup moins leur fraternité. Franck Planeille qui présente et annote cette édition avec l'érudition du passionné met en lumière le trait d'union intime et précieux entre ces deux esprits de la littérature.
Que se racontent dans leur sphère privée ces deux créateurs qui se vouvoient avec la distance du respect et de l'éloge mutuels ? Des choses prosaïques en somme : c'est Camus qui demande à Char de lui trouver une maison agréable et meublée du côté du Lubéron, c’est Char qui parle à son ami de ses rhumatismes ou encore qui lui écrit pour dire que son téléphone ne sonne pas… On avance dans la lointaine antichambre des grandes créations de ces artistes, celle du quotidien que l’on oublie. Et pourtant il sonne dans cette correspondance banale en apparence des métaphores incandescentes, « le Temps se fait en forme de hache », « l’âme est recuite, on vit contre un mur ». On pénètre ainsi dans l’environnement matériel et humain, l’intimité fascinante de ces figures de la littérature qui s’échangent jusqu’au bout avec une puissante générosité cette adverbe jamais aussi bien employé : fraternellement.
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