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Le film porno adopte la couleur noire en Afrique du Sud

Publié le 23 décembre 2010 par Africahit

JOHANNESBURG - Une longue femme danse devant la caméra, se dépouillant lentement de son tailleur: cette scène d'un film porno n'a de banal que l'apparence, car l'actrice est noire et joue dans une production noire, une première en Afrique du Sud.

Le dialogue, plus léger encore que les vêtements, résonne des sonorités particulières, les clics, du xhosa, du zoulou et du sotho, les principales langues africaines du pays que comprennent la plupart des Noirs de diverses ethnies.

"C'est une histoire de gens ordinaires, pour des gens ordinaires", dans un pays où 80% de la population est noire, indique à l'AFP le producteur, Tau Morena, qui qualifie toutefois le film "d'expérience voyeuriste".

"Mapona" ("Nu" en sotho), a rencontré un succès immédiat. Depuis sa sortie le 30 septembre, 5.000 copies sur DVD ont été vendues dans les sex-shops.

L'idée de cette production a germé lorsque les visiteurs d'un site web pornographique en zoulou, essentiellement issus de la classe moyenne émergente en Afrique du Sud, se sont plaints du manque de produits adaptés à leurs goûts.

"Il y a abondance de films pour adultes, mais la plupart sont importés", relève M. Morena. Les quelques vidéos sud-africaines présentent des acteurs pour la plupart blancs, qui s'expriment en anglais ou en afrikaans, la langue des descendants des premiers colons européens.

"La carence est sur une niche bien spécifique, celle des Noirs sud-africains. Nous n'avons pas changé la formule, nous n'avons pas réinventé la roue, nous avons juste changé l'emballage", ajoute le producteur.

L'initiative a soulevé la controverse, certains craignant qu'elle n'encourage des pratiques sexuelles dangereuses dans le pays le plus affecté au monde par la pandémie de sida, où 5,2 millions d'adultes sont porteurs du virus VIH sur 50 millions d'habitants.

Mais M. Morena se défend, affirmant que tous les acteurs ont subi des tests pour détecter le VIH ou d'autres maladies sexuellement transmissibles. En outre, chaque scène de sexe du film implique le port de préservatifs, une rareté sur la scène sud-africaine.

Pour le Dr Rebecca Hodes, de l'unité de recherche de l'Université du Cap sur le sida et la société, il s'agit avant tout d'un truc de marketing.

"Je demande à voir la preuve que l'utilisation des préservatifs dans le porno encourage des pratiques sexuelles moins risquées", lance-t-elle.

Kenneth Meshoe, dirigeant d'un parti chrétien, dénonce quant à lui la mise en scène d'Africains noirs, s'indignant de ce qu'ils pratiquent "une activité étrangère à l'Afrique" et critiquant "l'expoitation des femmes".

La pornographie est une industrie relativement récente en Afrique du Sud. Avant l'avènement de la démocratie en 1994, le régime d'apartheid exerçait une censure puritaine très sévère.

Deux ans après les premières élections multiraciales, la loi était assouplie. Très vite, les films étrangers ont envahi les étagères des sex-shops, désormais ouverts dans toutes les grandes villes.

A côté de ses voisins conservateurs, l'Afrique du Sud fait aujourd'hui figure d'avant-gardiste: les sex-shops ont pignon sur rue, des mères de famille s'offrent vibromasseurs et autres gadgets lors de réunions-ventes à domicile.

L'industrie locale du film pornographique, encore très marginale, semble décoller. Selon Patrick Meyer, directeur d'une entreprise de distribution spécialisée, une dizaine de productions sud-africaines ont été lancées sur le marché cette année, contre quatre en 2009.

Et "Mapona 2" doit être tourné dans les mois qui viennent.



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