Jacqueline de Romilly

Jacqueline de Romilly nous a quittés. Elle avait voué sa vie aux lettres et à l'enseignement, et mené un combat, apparemment sans espoir, en faveur de l'enseignement du grec et du latin. Elle parlait de beauté, de compréhension du monde, alors que doucement la religion française passait aux diplômes pour tous. Elle parlait de culture à un "grand corps malade" dont il n'est pas interdit de penser qu'il est la proie de l'inculture ou de la contreculture.

Elle avait raison. D'autres reprendront le flambeau (1)

Jacqueline de Romilly nous avait fait l'honneur de préfacer notre ouvrage "Apprendre à lire à la maison". Elle avait mis du cœur dans la rédaction de ces quelques mots, comme, assurément, elle en mettait dans tout ce qu'elle faisait :

"C'est une grande affaire que de découvrir les premiers éléments de ce qui vous ouvrira un pareil royaume. Et je me rappelle avec émotion, lorsque j'étais tout enfant, et avant d'entrer au lycée, ces moments où, chez moi, dans le voisinage de ma mère, j'apprenais à lire ; j'allais dire « j'apprenais à lire toute seule », mais elle était là, me répondait, me guidait. Je me revois assise par terre, avec des lettres, émerveillée des combinaisons que j'arrivais à dominer et toute fière de comprendre le principe - même si j'ignorais alors que la lecture remplirait toutes les heures de ma vie et serait la source de tant de joies - jusqu'au jour où, hélas, la vue me serait retirée. C'est le cas à présent et je n'en mesure que mieux l'importance et le prix de ce que j'ai ainsi appris. "  (2005)

(1)  Voir, dans un genre évidemment très différent "Histoire et Shakespeare en banlieue"  Augustin d'Humières – Ed. Grasset 2009