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Somewhere else ?

Par Borokoff

A propos de Somewhere de Sofia Coppola 1 out of 5 stars

Somewhere else ?

En même temps qu’il doit assurer la promotion de son nouveau film à Los Angeles, un acteur américain, Johnny Marco, traverse une dépression. Mais il reçoit la visite inopinée de sa fille Cleo, 11 ans.

Somewhere partait pourtant sur de bonnes bases. Avec pour décor Los Angeles et en toile de fond une critique feutrée du faste et du cérémonial hollywoodiens, Somewhere avait la double ambition de faire à la fois le portrait d’un acteur déprimé mais surfant sur le succès et une description pour le moins ironique des us et coutumes du milieu du cinéma hollywoodien.

Dans les deux cas, Somewhere est peu convaincant pour ne pas dire un film raté. En fait, Coppola ne fouille pas assez ni son portrait de Marco ni son analyse du carcan hollywoodien. Dans le rôle de Marco, Stephen Dorff, trentenaire décoiffé et fêtard, est un choix judicieux car outre d’être un acteur très convaincant, Dorff va à l’encontre des clichés et des canons esthétiques lisses d’Hollywood.

Mais la suite est décevante. Suivant Marco au jour le jour dans sa vie d’acteur, collant à ses pas, des soirées très arrosées à l’hôtel mythique du Château Marmont sur le Sunset Boulevard, où il dort, aux plateaux de promotions télé (l’arrivée de sa fille ne casse pas cette routine), la caméra de Coppola enchaine les plans avec une pesanteur qui épouse celle du quotidien de Marco et empêche le film de décoller, là où Lost in Translation y parvenait si bien par exemple.

Les plans s’enchainent en suivant en temps réel Marco. Marco dans sa porsche, Marco à la patinoire avec sa fille, Marco en promo en Italie (encore avec sa fille). Mais on a du mal à  sentir beaucoup d’enthousiasme là dedans. Comme si la caméra de Coppola n’arrivait pas à se détacher d’une certaine banalité du quotidien de Marco qu’elle décrit. Peut-être en manque d’inspiration tout simplement. On s’ennuie ferme en tout cas dans cette manière linéaire et un peu terre à terre avec laquelle Coppola suit Marco. Il y avait beaucoup plus d’imagination, de légèreté, de poésie, d’inventivité et d’humour (cf Bill Murray) dans Lost in translation. Même la scène de remise de prix grotesque à Marco en Italie ne fait pas vraiment rire, un brin suffisante. Mais l’humour en général dans le film (scène avec la journaliste italienne qui parle à toute vitesse à Marco) fonctionne mal.

Il y a pourtant une belle matière au début du film dans le portrait et la solitude de Marco, dont on sent la dépression larvée et une certaine tristesse au début du film lorsqu’il regarde sa fille patiner. Mais ce portrait n’est pas assez fouillé. Marco est un type un peu lassé de tout, désabusé par le chic et l’opulence dans lesquels il vit, le prix des suites d’hôtel où il dort. L’arrivée de Cleo va certes faire réaliser à Marco qu’il s’est ne s’est pas occupé la chose qui lui était la plus chère au fond, sa fille, et qu’il s’est même désintéressé d’elle depuis 3 ans. Mais Coppola ne développe pas assez les liens qui unissent Marco à sa fille. Souvent, les scènes sont trop longues, trop descriptives et laissent un peu dubitatifs. Cleo à la patinoire, la double scène des deux blondes tournant autour d’une rampe, la répétition des allers et venues de Marco au volant de sa Porsch, sur les avenues ensoleillées de L.A. On a du mal à se sentir emballé ou très concernés par le film. On aurait aimé voir plus de plans d’extérieur de Los Angeles aussi.

Seules les pointes d’ironie à l’encontre du  faste et des personnages qui participent aux campagnes de promotion du film dans lequel joue Marco (une attachée de presse qui en fait trop et n’arrête pas de féliciter Marco) font sourire et ravivent un peu l’attention du spectateur après un heure plutôt laborieuse. Au détour aussi d’une musique de I’ll try anything once des Strokes aussi. Mais même les scènes censées constituer le paroxysme dans la tension dramatique et susciter l’émotion ne sonnent pas juste. Celles notamment où Marco pleure au téléphone (« I’m nothing ») et celle où Cleo pleure avec son père en s’inquiétant de ne pas savoir quand sa mère rentrera.

Une déception donc dans l’ensemble alors que la dernière scène semble esquisser les contours d’une évolution voire d’une renaissance du personnage de Marco qui captive enfin. Comme si le film, prenant de la consistance, commençait hélas au moment même où il s’achève.

www.youtube.com/watch?v=WILzxobFWfg


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