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Le statut EIRL à l’épreuve

Publié le 04 février 2011 par Diateino

« Un scandale français ». C’est ainsi que l’ex-Secrétaire d’Etat chargé de l’Artisanat et des PME Hervé Novelli avait qualifié le risque omniprésent pour un entrepreneur en nom propre (commerçant, artisan, libéral) de perdre tout ce qu’il a (logement, voiture…) en cas de faillite. Alors que s’est tenu le Salon des Entrepreneurs à Paris le 2 et 3 février, retour sur une mesure qui les concerne : la création du statut EIRL. En application depuis le 1er janvier, ce projet qui vise à protéger le patrimoine personnel des entrepreneurs individuels ne semble pas susciter le même engouement que l’auto-entrepreneuriat.

Mais la problématique est-elle vraiment bien comprise ? Selon une enquête menée par l’Observatoire Permanent des Porteurs de Projets (CCI Entreprendre/Opinion Way) parue le 24 janvier, 21 % seulement des porteurs de projets pensent que leurs biens personnels sont en danger en cas de difficultés de leur future entreprise et moins de la moitié ont entendu parler de l’EIRL.  71% pourtant sont « fortement inquiets » à l’idée d’engager leurs biens personnels, au point de « freiner leur envie de se lancer » pour 58% d’entre eux. Or c’est précisément pour répondre à cette angoisse que le statut d’Entreprise Individuelle à Responsabilité Limitée a été créé. Alors, d’où viennent les réticences ?

Il faut d’abord savoir que la protection du patrimoine personnel pour les entrepreneurs en nom propre est déjà possible, tant dans le statut Entreprise Individuelle (EI), par le biais d’une déclaration d’insaisissabilité chez le notaire (loi d’août 2003), que dans le statut Entreprise Unipersonnelle à Responsabilité Limitée (EURL). La différence entre l’EIRL et l’EURL tient au fait que l’EURL désigne des sociétés et l’EIRL des entreprises individuelles, ce qui se traduit notamment par un allègement de la quantité et du coût des formalités et la liberté de choisir son régime d’imposition (Impôt sur le Revenu ou Impôt sur les Sociétés), quoi que ce soit plus compliqué en réalité (Plus de détails ici). Pour autant, « créer une entreprise individuelle ne dispense pas de devoir amasser des fonds pour la faire vivre », nous précise Chrystèle Lyon-Gabriel, expert-comptable et fondatrice du cabinet de conseil Plumalys.

Cette spécialiste, que nous avons pu contacter grâce à l’aimable participation de Thierry Goemans, DAF free-lance et spécialiste de la gestion des PME, affiche la même prudence sur la protection des biens. « Pour ma part, je suis très dubitative. Je pense que l’EIRL ne s’adresse qu’à quelques cas très particuliers comme des buralistes, des agents d’assurance… », nous confie-t-elle. L’obstacle restant la difficulté à obtenir des prêts. « La protection des biens personnels est essentiellement juridique, explique-t-elle. Dans les faits, les banquiers demanderont toujours des cautions personnelles avant de prêter des fonds ».

Cette expert-comptable et commissaire aux comptes continue donc de conseiller le statut EURL à ses clients. « Lorsqu’un nouveau dispositif se met en place, je préfère toujours attendre 2-3 ans, voir émerger quelques cas de jurisprudence, avant de le recommander. La protection apportée par l’EIRL n’a pas été démontrée. » Il faudra donc attendre  la réaction des 1,5 million d’entrepreneurs (dont des auto-entrepreneurs) supposés concernés par la mesure pour se faire une idée de son efficacité. À noter également que la protection du patrimoine n’est pas totalement assurée dans le cadre de l’EIRL puisqu’en cas de fraude ou de surévaluation des biens professionnels par exemple, les biens personnels pourront être saisis.

La fin d’un « scandale français », vraiment ?


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