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Tunisie : faute de l'ambassadeur ou défaut d'expertise?

Publié le 08 février 2011 par Bernard Girard

Nicolas Sarkozy a donc choisi de licencier (pardon, remplacer) Pierre Ménat, l'ambassadeur de France en Tunisie, au motif qu'il aurait mal informé l'Elysée de la situation en Tunisie (il me semble avoir lu quelque part qu'il en avait plus appris sur la situation en Tunisie en bavardant avec la jeune épouse d'Eric Besson, d'origine tunisienne, qu'en lisant les dépêches du Quai d'Orsay).
Que l'Elysée ait été mal informé, c'est une évidence. Que sanctionner l'ambassadeur soit la solution ne l'est pas forcément.
Il est possible qu'il y ait eu erreur d'appréciation de l'Ambassade. Auquel cas, la sanction se justifie. Mais il peut aussi y avoir un défaut d'expertise, ce qui est tout autre chose. Il semble que l'Ambassade ait basé ses analyses sur le satisfecit que les économistes des organisations internationales donnaient au régime en place (ouverture à la mondialisation, appel aux investissements étrangers, croissance saine) et sur ses contacts au sein d'un pouvoir aveuglé par une politique de répression qui interdit évidemment d'entendre les revendications populaires. Si c'est bien le cas, c'est moins l'ambassadeur qui est en cause que le mode d'expertise retenu pour analyser la situation : économistes internationaux et contacts avec le pouvoir ne disent pas tout. Bien au contraire, ils ont été en cette affaire aveugles à ce que géographes et démographes voyaient depuis un certain temps comme le suggèrent les travaux du CIST ou ceux de l'INED (je pense notamment à ce ceux de Kamel Kateb sur la famille au Maghreb).
Et cet aveuglement est moins affaire d'individus que d'approche conceptuelle : beaucoup d'économistes exclusivement enfermés dans leurs modèles théoriques ne paraissent pas avoir compris que la croissance économique associée au développement des inégalités conduit presque inévitablement à l'instabilité politique et sociale. Dans une démocratie, ces turbulences entraînent un changement de majorité et de politique. Dans une dictature cela conduit à la révolte et donc à la répression qui lorsqu'elle réussit n'aide pas à comprendre les attentes de la population et mène à la révolution lorsqu'elle échoue.
Si c'est, comme je le crains, le mode d'expertise qui est en cause, l'Elysée risque de se retrouver mal informé apr bien d'autres ambassadeurs dans bien d'autres pays.
Sur la situation tunisienne, les travaux du CIST et ceux de Kamel Kateb, on peut voir cette chronique : Tunisie, une jeunesse se révolte

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