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Krisis : point initial d'expansion

Publié le 14 février 2011 par Tudry

« Pratiquement, les économistes sont marxistes, quand même ils détesteraient le marxisme. » Père Serge Boulgakov

 http://www.francesoir.fr/etranger/2008/10/04/bulgarie-un-ex-trader-de-new-york-devenu-moine.html

"Notre crise spirituelle est plus douloureuse et plus menaçante que le chaos économique."  écrivait A. Soljénytsine.

Que dirait-il alors ces jours derniers ?

Ce qu'il à souffert, n'était-ce pas destiné à mettre fin aux souffrance imposées par le captitalisme triomphant ? Que répondre à un Besancenot, satisfait d'entendre dire que des économistes américains se reportaient, fébriles, au "Capital" de Marx pour comprendre ce qui arrivait ces derniers jours ? Belle façon de dire, tout en continuant à jouer les révolutionnaires, tout ce que le libéralisme doit à Marx !

Combien de milliards pour "renflouer", non seulement, les banques et organismes financiers, mais un sytème planétaire tout entier ? Et après ? Tout dépend de son rapport à l'argent ! Non ? Quels visages ? Quelles faces ? Quels symboles sur les "faces" monétaires de nos jours ?  

Que dire d'autre : l'ère du vide ? Trous, virtuels, mais monstrueux dans les portefeuilles des banques que les Etats vont combler avec de l'argent qu'ils ne possèdent pas. « Mettre du vide dans du creux », vous appelez ça une civilisation ?

"Le monde financier représente la fantasmagorie la plus effroyable et la plus éloignée du monde créé par Dieu, celle qui ne le perfectionne pas et ne lui ajoute aucun qualité." Nicolas Berdiaev

Le veau d'or s'est cassé une patte ! L'attelle est prête, vite fait, bien fait, il faut le sauver ! Comprenez bien, sans lui, quel vide, je veux dire apparent cette fois ! Ses alliés comme ses ennemis de quoi pourraient-ils bien faire semblant de débattre si il disparaissait corps et âme, je veux dire « corps et corps » ? Sans lui il faudrait bien affronter enfin les béances que nous avons creusé !

Tous nous sommes concernés semble-t-il, c'est ce que « on » nous dit. « On » est dans le même bateau ! Oui, oui ...

« Le monde bourgeois est le monde du « on » qui sonne comme un sac d'argent posé lourdement à terre dans une chambre où quelqu'un aurait été assassiné. » (O. Clément)

Non que j'espère un renversement vers le pôle « anti-capitaliste » de certains. J'ai cessé d'espérer depuis longtemps dans les solutions et les miracles des hommes-humanistes. La crise ? La crise ? Tous les mots dont « on » use actuellement sont usés, certains l'avouent d'eux-mêmes ! Krisis, c'est, étymologiquement, la décision, ferme et définie ... Je ne vois pas de cela en ce moment ! Nous ne voyons même pas, pas encore peut-être, les souffrances induites par ces événements, que je ne qualifierais pas de crises, mais de soubresauts, de petits chaos sur la route de la kénose inversée de l'humanité, de l'unanimanité ! De cette «humanité heureuse et uniforme » qui  est, selon Léontiev « un fantôme sans beauté et sans charme ... ».

Alors, quoi ? Une autre forme d'économisme saura-t-elle apporter une solution ?

Le communisme, soviétique en particulier, aura été une tentative, une tentation de néantiser un « type » d'homme identifié. Le communisme fut une « krisis », décision ferme et définie de mettre « au monde » un nouvel homme. A partir du prolétaire (qu'il fallait également parfaire et égaliser) l'homme nouveau aurait été l'homo sovieticus, non une simple inversion du type identifié, le « bourgeois » mais son double dissymétrique en creux.

Le communisme aura ainsi, avec les « meilleures intentions du monde », tenu sous sa coupe ténébreuse des millions d'hommes et de femmes. Il aura dans un espace géographique, certes vaste mais, néanmoins limité, imposé la souffrance d'une manière concrète, brutale, « technique », éminemment rationaliste sous des dehors d'apparentes schizophrénie irrationnelle.

Le sang, les larmes, les cris arrachés mais aussi les silences contraints, les pleurs étouffés par la brutalité « bestiale », tous infondus dans le machinisme techniciste et mécaniste. Pourquoi, in fine ?

Pour un idéal social ! Idéal qui ne se nomme pas « économique » mais qui l'est de bout en bout. « Démonie de l'économie ». Là encore, inversion, si l'on songe au terme forgé au feu de l'Esprit par les saints Pères. « L'économisme », religion utilitariste de la modernité, religion utilitaire dont la modernité a, implaquablement besoin : « L'idée du bien universel, la religion de l'utilité générale, est la religion la plus froide, la plus prosaïque, et de surcroît la plus invraisemblable et la moins fondée. » disait avec conviction K.N Léontiev, certes, mais c'est aujourd'hui la mieux partagée.

Le capitalisme libéral entraîne et assume, lui aussi, son lot de souffrances et de défiguration. De souffrances nouvelles, comme l'avait su Léontiev :

« La domination de la classe moyenne est également une simplification et un mélange car, par son essence, elle aspire à tout réduire au type commun de ce que l'on dénomme « bourgeois »... La marche tranquille et graduelle du progrès égalitaire doit avoir vraisemblablement sur le futur immédiat des nations une action différente de celle des ces révolutions violentes qui se font au nom de ce même processus égalitaire. Mais, je prétends que, dans un avenir plus éloigné, ces actions seront similaires. Tout d'abord un mélange paisible, l'effondrement de la discipline et le déchaînement par la suite ... L'uniformité des droits et une plus grande similitude qu'auparavant de l'éducation et de la situation sociale ne détruisent pas les antagonismes d'intérêts, mais les renforcent sans doute, car les prétentions et les exigences sont semblables. On remarque également que, partout, vers la fin de l'organisation étatique, l'inégalité économique devient plus grande à mesure que se renforce l'égalité politique et civique. Il n'y a pas moins de souffrances qu'auparavant; elles sont d'un autre ordre; ce sont de nouvelles souffrances que l'on ressent plus profondément à mesure que s'installe, après la fin de la période d'épanouissement complexe de la vie sociale, ce nivellement secondaire dans les concepts, les goûts et les besoins. »

Les révolutions bourgeoises, faussement populaires, socialistes ou de « libération nationale » ont toutes ouvertes la voie à l'internationalisme ultra-libéral (on pourrait aussi dire « apatride », terme officialisé précisément par les soviétiques), à un degré ou à un autre, et à son corollaire la « mondialisation » (terme d'ores et déjà galvaudé), ce que Léontiev appelait « la panvulgarité terrestre radicale ».

Mais ce capitalisme là, aura réussit, là où le socialisme soviétique aura échoué. Il a réussit à se faire, sinon aimer, du moins largement accepter par ses victimes. Il est parvenu à infondre le bourgeoisisme dans le spectre le plus large possible des sociétés. Même si l'on connait ses défauts il apparaît comme le « seul » modèle viable, le seul rempart contre « le pire », le pilier incontournable de toute démocratie. Il a partout installé, instauré un attachement viscéral, plus même, métaphysique au confort, au bien être, à la quiétude. Une philosophie structurée mais singulièrement « souple » de la cessation de la souffrance pour le plus grand nombre fait aisément admettre le caractère inéluctable pour la minorité des « autres », et ce d'autant mieux que la cause se pose comme en étant le seul remède possible.

Le capitalisme libéral aura finalement induit une forme de communion qui, toujours, échappa aux tentatives du communisme, en tant que système de gestion « sociale » tout du moins. Communion du « plus petit dénominateur commun »; adhésion collective à un système perçu comme intrinsèquement lié à la démocratie, aux libertés individuelles (« L'individualisme tue l'individualité des hommes, des régions et des nations. » K.N Léontiev) et aux droits de l'homme et dont la chute ou la rupture viendrait menacer frontalement ces « acquis ».

Le communisme aura donc parfaitement préparé le terrain à ce pan-étatisme économique. Non la chute ou la « perversion bureaucratique » (dixit Besancenot) du communisme mais l'idéologie dans son essence et dans sa pratique. La Chine aujourd'hui, loin d'en être un contre-exemple, en est l'illustration presque parfaite.

« L'idée du bien général ne contient rien de réel. C'est l'abstraction la plus sèche; qui ne mène à rien de bon, ni même de tangible, et rien de plus. » Léontiev

Le veau d'or s'est tiré une balle dans le pied ! Mais il est à lui-même son seul « pharmacos », médecin ET remède de lui-même ! Le capitalisme financier mondial ne s'effondre pas, non, c'est un soubresaut, un hoquet ! Le veau d'or s'est tiré une balle en or dans son pied en or ! Et des deux flancs de l'idole, imprécateurs et idolâtres en appellent à leurs demi-dieux, Kaynes ou Marx !

Et là, il faut bien se demander avec Victor Hugo : « L'avenir arrivera-t-il ? » N'y aura-t-il donc, à jamais, que le « sombre face à face des égoïstes et des misérables » ?

La « gouvernance » acéphale de l'hydre pan-européen aura beau verser un peu d'eau socialo-étatique dans son vin libéralo-financier son « eschaton » demeurera inchangé, « qu'importe le flacon pourvu qu'on ait l'ivresse » ! La pan-quiétude béate, satisfaite et jouisseuse est l'horizon insurpassable de l'humanité-unie ! Qu'importent les chaos sur la voie du gai bien-être généralisé, qu'importent les pertes, la bonne gestion sa sert à ça ! Et puis pour faire passer la pilule « on » a tous les « rebélleu » zappointés qui fournissent des exutoires en formes d'hagiographies marxistes-léninistes filmiques à la gloire de quelque voyou « canonisé » héros et martyr de la cause prolétarienne ... on ne change pas une équipe qui gagne ! Souvenons-nous (bien que l'heure soit à l'oubli organisé en commémoration expresse) de la « boutade » des mencheviks à propos de leurs « rivaux » : « Lénine et Cie : assassinats et extorsions » !

D'ailleurs, peut-il ne pas être question de « mort » dans ce domaine ? Les anciens grecs surnommaient Hadès, le dieu des enfers Plouton; le riche. Riche en « âmes mortes » ! Ces « âmes mortes » qui, précisément, doivent faire la richesse du héros de Gogol, dont le bourgeoisisme est la visée finale et vitale, l'horizon métaphysique.

Le socialisme, quant à lui, vise aussi a engranger des « âmes mortes », mortes mais vivantes, c'est-à-dire des unités humaines strictement matérielles, corporelles, rationnelles, lumineusement libérées de l'esprit, consciemment et volontairement libérées de leur liberté, c'est précisément le désir du Grand Inquisiteur. Très récemment, Olivier Besancenot avouait clairement : « Notre problème est simplement de revaloriser la force du nombre. » Le modèle sociétal proposé est affreusement utopique, il présuppose une adhésion, un engagement total de chaque personne ou, plutôt, individu. Le poids politiques qu'il ferait peser sur les épaules de chacun est incompatible avec la liberté personnelle, il entraine nécessairement la contrainte; voire la rééducation des réfractaires, leur contrôle par la majorité sure d'avoir la raison de son côté. Cette majorité espérée, à créer, devrait alors « contrôler, posséder, répartir la totalité des richesses » ? Comme l'écrivait judicieusement le Père Boulgakov (La Philosophie de l'économie), nôtre époque n'aime pas tant l'argent que la richesse, le pouvoir de la richesse, « elle y croit même plus qu'à la personne humaine. » La Révolution de 1917 se fit en dépit de la majorité, avec son assentiment silencieux, nos révolutionnaires actuels espèrent, quant à eux, non pas créer les conditions favorables à l'émergence de cette majorité adorée mais simplement profiter de ces conditions, construire la communication autour de ces noires conditions qui doivent mener, presque mécaniquement vers leur dessein : « une révolution implique que la majorité du peuple fasse irruption là où se trame son destin ... le problème est de susciter cette action majoritaire. » Le problème c'est de créer cette « majorité » et comment l'appâter au mieux si ce n'est avec cette promesse de la richesse.

D'un côté Mammon et sa cupidité monétaire, de l'autre Plouton et son dévorant et avaricieux appétit, mais le même économisme.

C'est le pain, le pain et le doux attrait du pouvoir que l'on promets à cette majorité pour qu'elle prenne, pour qu'elle s'agglutine et s'agglomère autour de ses fiers libérateurs auxquels elle ne rechignera pas à remettre le fardeau actuel d'une liberté trop large pour elle contre la promesse d'une liberté de la richesse partagée. Aujourd'hui nous sommes contrôlés par le moyen d'une loi extérieure que nous n'avons pas choisi, pour demain nous choisissons une liberté du contrôle de tous par chacun. Nous troquerons la possibilité de la sainteté dans l'humilité contre la certitude de l'autojustification contrôlée par tous de notre « saineté » démocratique, citoyenne et écolonomique.

Nous l'écrivions plus haut, krisis c'est « une décision ferme », et krissis c'est « l'onction » ! Encore une fois, pour certains d'entre nous, un choix s'impose. Ce temps est le meilleur des temps pour décider fermement de qui nous souhaitons recevoir l'onction pour nous et pour le monde.


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