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Quand l'histoire s'écrit au présent !

Publié le 17 février 2011 par Lommedesweppes
Quand l'histoire s'écrit au présent !Et sous l'oeil vigilant des autorités dominantes en place ! C'est ce risque dont veut nous faire prendre conscience l'historien Marc Ferro avec l'exemple de l'histoire de Jeanne d'Arc dans son livre "L'histoire sous surveillance" :
"Que la légitimité change de signe, de foyer et que la définissent en france successivement les juristes, l'Eglise, la nation et les mêmes personnages historiques changent de sens. Ainsi en va-t-il de Jeanne d'Arc à travers les temps. Au XV° siècle, proches des juristes, les historiens officiels ignorent pratiquement la Pucelle et dans les "Annales" de Gilles il n'est même pas fait allusion à son procès. Car le triomphe du roi ne saurait s'accompagner de l'aide d'une sainte ou d'une sorcière; le service du roi exige la laïcisation de l'héroïne, et que son rôle aussi soit diminué - le roi a "permis" à Jeanne de l'aider dans son combat; les hommes du roi ont su manigancer son affaire, comprenant le parti que le roi pourrait tirer de la venue de Jeanne dont ils ont fait un miracle. La version pieuse naït plus tard quand l'Eglise fortifie son alliance avec l'Etat, veut l'incarner. Dès lors, le procès et l'évêque Cauchon gênent les catholiques qui, souvent, réduisent le rôle de celui-ci; accabler les Anglais, en faire les responsables de la mort de Jeanne est une version plus populaire. Avec la Révolution française et la vision laïque de l'histoire, ce sont les "voix" qu'entendit Jeanne qui gênent les narrateurs: on supprime saint Michel et l'on écrit que Jeanne crut entendre des voix. Autre changement après 1904, pour conforter l'Entente cordiale avec les Anglais, on restitue son mauvais rôle à Cauchon; quitte, pour sauver l'honneur de l'Eglise, à faire intervenir un moine qui, au moment où Jeanne va mourir, lui tend la Croix. Ces versions expriment à la fois la vision des différentes instances et institutions qui dominent le discours sur l'histoire, leurs besoins successifs - et les nécessités d'un compromis."
On comprend dès lors mieux la réticence des historiens face à la volonté du président d'instaurer une Maison de l'Histoire de France à Paris. En effet, l'histoire est une science vivante, évolutive, et qui surtout doit rester indépendante des velléités du pouvoir en place de la figer ou de l'instrumentaliser à son profit.

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