Magazine Politique

Christian Jacob, Pierre Lellouche & DSK [Ou Bien Des Raisons De Se Faire Du Mouron]

Publié le 20 février 2011 par Sagephilippe @philippesage


Il aura suffi qu’Anne Sinclair fasse part d’un souhait "personnel" pour que deux sous-subalternes de l’UMP en déduisent presto que son mari sera candidat aux Primaires, donc à la présidentielle 2012, et tirent sans sommations et à balles réelles sur le Directeur Général du FMI. Ce qui, au passage, donne une idée du caniveau dans lequel une certaine classe politique s’apprête à nous plonger si jamais, Dominique Strauss-Kahn décidait, effectivement, de concourir.
Christian-Jacob.jpgOr donc, dimanche 13 février, Christian Jacob (président du groupe UMP à l’Assemblée nationale et député-maire de Provins) estimait, gros sabots aidant, que DSK ne correspondait pas à « l’image de la France rurale (..) la France des terroirs et des territoires ».
Et où qu’il a dit ça, notre « paysan » ? … Sur Radio J .. Une radio de la communauté juive sise à Paris.
Ah si, la précision est d’importance, car aucun animateur ou journaliste de Radio J n’aura rebondi sur cette appréciation de Jacob. Aucun ne lui aura fait remarquer, par exemple, que ce qu’il venait de dire pourrait être, ouh-là-là, considéré comme de l’antisémitisme primaire.
En revanche, les socialistes Benoît Hamon, Pierre Moscovici et Jean-Christophe Cambadélis, en ont vu, eux, de l’antisémitisme, et du « très moisi », décelant même dans les propos de Christian Jacob une « rhétorique de l’extrême-droite d’entre-deux-guerres ». Et de citer Pétain, Maurras, Déroulède et toute la clique.
C’était oublier la question posée au député-maire qu’était :
« DSK, c’est le candidat des bobos ? » !
Alors certes – mais ça n’est pas un scoop – Jacob est un balourd de première, un parfait godillot, un politique sans envergure, mais de là à lui trouver de l’antisémitisme, même sous-jacent, faudrait quand même pas pousser Jaurès et Blum dans les orties ! … Il est évident que dans sa pauvre réponse, Jacob faisait uniquement (et maladroitement) référence au statut social de DSK, et rien d’autre.
Comme le dit si bien Didier Porte dans sa tribune-vidéo du 18 février 2011 :
« Si on n’a pas le droit de faire remarquer que DSK, natif de Neuilly-sur-Seine, est pété de thunes et qu’il n’a peut-être pas le profil idéal pour nous faire oublier le quinquennat bling-bling dont la France va sortir exsangue sans se faire taxer d’antisémitisme » où va-t-on ?
Ensuite de quoi, Porte (en pleine forme) démontrera fort drôlement que les amis de Christian Jacob, soit les membres du gouvernement et son président ne sont, pas plus que DSK, des représentants de « La France des terroirs ». Et il en tirera la conclusion (que je partage) que le sieur Jacob est moins un antisémite qu’un « gros bourrin ».
Ceci étant, attention ! Car si à chaque boulet de l’UMP balargué sur DSK, le clan socialiste hurle à l’antisémitisme, non seulement ça va être particulièrement pénible, mais surtout, se révéler contreproductif. En d’autres termes, ça finira par jouer contre DSK (s’il est candidat).
Pierre-Lellouche.jpgC’est bien ce que pensait faire Pierre Lellouche (sous-ministre en charge du commerce extérieur qui va pas bien), lundi 14 février sur Radio Classique (et i>télé), « jouer contre DSK ». Et en utilisant, peu ou prou, le même angle d’attaque que Christian Jacob. Soit en présentant DSK comme le candidat des « bobos ».
Et de le dépeindre joyeusement comme « un grand bourgeois » incarnant « la gauche ultra-caviar ».
Ajoutant qu’il était « totalement déconnecté de la souffrance des gens dans nos usines (…) complètement déconnecté de la réalité du pays » …
... Ce que pensent, itou, certains membres du Parti Socialiste, mais aussi, le tribun de gôôôôche, Jean-Luc Mélenchon, ce Mélenchon que Lellouche, lors d’une édition de Ripostes (France 5) en date du dimanche 5 avril 2009 traitait de « pov’type » regrettant que l’on ne fût plus au XIXème siècle, auquel cas, il l’aurait « convoqué en duel » et l’aurait « flingué » … Carrément !
C’est vous dire s’il rigole pas, Lellouche.
Seulement voilà, notre belliqueux (pro-américain quoi qu’il arrive, pro-Otan, pro-guerre en Afghanistan, en Irak, etc. – nous avons donc là, un belliqueux de type aveugle) dans son flingage de DSK, a également tiré une énorme balle (un missile sol-sol plutôt) dans les deux pieds de son camp. Sans doute, parce qu’il s’est laissé emporter par son élan, ou – et c’est plus probable – parce qu’il est, comme Jacob, un politique de quatrième division [1].
Il est à ce propos, assez incroyable que personne – à ma connaissance – ne l’ait relevé ! Pourtant, c’est assez croustillant !  C’est même du … caviar !
En effet, M. Lellouche en plein milieu de son portrait au vitriol se crut finaud en ajoutant que le Directeur Général du FMI « pourrait être un parfait candidat de droite ».
Tiens donc .. Mais comme c’est intéressant.
Car, si l’on reprend les arguments de M. Lellouche, « un parfait candidat de droite » mais c’est quoi ?
Eh bien c’est « un grand bourgeois totalement déconnecté de la souffrance des gens dans nos usines (…) complètement déconnecté de la réalité du pays ».
N’hésitez pas à faire tourner. Et copieux .. C’est une information (une confirmation, plutôt). Et elle est sacrément importante.
Bien entendu, comme nous sommes bien élevés, nous remercions chaleureusement Pierre Lellouche. Tellement, il donne à la « France qui souffre » des arguments en béton (armé – puisqu'il aime ça, la guerre) pour ne voter ni Sarkozy, ni DSK, en 2012.
Blague à part, ces deux séquences politiquement pauvres (entre ad personam et ad hominem) nous donnent quelques indications, assez inquiétantes, sur la campagne présidentielle qui se radine.
Si l’on y ajoute un débat prochain sur la place de l’Islam en France, débat qui – si l’on en croit l’Elysée – devrait être un des thèmes de ladite présidentielle, plus toutes les péripéties abracadabrantes et récurrentes (Woerth, Hortefeux, Michèle Alliot-Marie ..) d’un gouvernement qu’on nous avait promis irréprochable, plus … nos 42 députés (signataires de la charte) de la Droite Populaire qui poussent au train du FN [2], je ne sais pas vous, mais moi, j’ai comme l’impression que nous courons droit vers un nouveau « séisme ». Je crains même que, si le niveau ne s’élève pas, et rapidement, les décombres soient plus importants qu’en 2002.
[1] Mais avons-nous actuellement, en France, des politiques de première division ? Pas sûr …
[2] Fut un temps, où tout membre de la droite, RPR ou UDF, prônant une alliance avec le FN, ou pis, la concluant, était exclu. Ainsi, en 1998, Jean-François Mancel (du RPR) pour avoir proposé un rapprochement avec le parti de Jean-Marie Le Pen ou – entre autres - Charles Millon (de l’UDF) pour avoir pactisé avec le FN. Ce temps-là est donc, semble-t-il, révolu.
A chacun d’en tirer ses conclusions …


Retour à La Une de Logo Paperblog