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La petite robe à rayures, de Sylviane Ainardi-Peroz

Par Benard

Au-delà de l’hommage : Charlotte ou l’histoire d’une héroïne discrète et d’une vie singulière

La petite robe à rayures, de Sylviane Ainardi-Peroz, préface de René Piquet. Les Éditions du survenir, 188 pages, 15 euros.

La Petite Robe à rayures (1) est un ouvrage sensible. Bouleversant parfois. Lorsqu’en 2007 Sylviane Ainardi découvre une cinquantaine 
de lettres d’amour écrites des prisons de Vichy (2) 
par sa mère, Charlotte, à son père, Charles, tous deux décédés douze ans plus tôt, elle se met en quête 
de cette héroïne discrète, « chère petite maman » 
restée « inaccessible ».
Dès septembre 1940, Charlotte et Charles Ainardi, jeunes ouvriers, entrent en résistance contre l’occupant nazi. Agent de liaison dans la zone Sud, Charlotte est arrêtée avec son époux sur dénonciation en mars 1941. Condamnée aux travaux forcés à perpétuité, elle est successivement incarcérée à Rennes, puis à Saint-Joseph, à Lyon, à la Petite Roquette, à Paris, aux Baumettes, à Marseille, à Romainville avant d’être déportée en avril 1944 à Ravensbrück. Lui à Dachau.
À partir des lettres de prison minutieusement rédigées, des rares mots de Charlotte sur son vécu lâchés à ses filles, des témoignages de camarades de déportation puis d’un voyage en avril 2009 à Ravensbrück, où l’on recense toujours les informations concernant un certain matricule 33096, ce livre retrace l’insupportable des geôles françaises pour faits de résistance et l’horreur des camps nazis. Enfer qui laisse aux rares survivants les traumatismes indélébiles de l’impossible oubli. Ancienne députée au Parlement européen et dirigeante communiste, Sylviane Ainardi – Lola dans le texte, du nom de l’arrière-petite-fille de Charlotte – rend à travers cet ouvrage un émouvant hommage à sa mère, femme héroïque restée à l’écart des honneurs publics.
Par ce parcours de mémoire en solitaire, Sylviane Ainardi se remémore certaines discussions avec sa mère. Elle s’interroge sur les incompris entre mère et fille, sur des non-dits douloureux. « Je n’ai connu qu’une facette de cette femme, celle qui a si bien su cacher son désarroi et sa souffrance derrière un masque de volonté, de dureté parfois. Tu ne savais pas recevoir les caresses et les baisers, tu les repoussais. Pourquoi ? ». Au-delà de l’hommage, la Petite Robe à rayures prend alors un relief tout particulier par les réflexions, parfois intimes, suscitées sur le sens de la vie, sur l’engagement, sur la féminité, sur l’amour, sur les dangers du pouvoir pour ceux qui s’y accrochent à tout prix et à tout âge.
« Avec l’âge, confie Sylviane Ainardi, j’ai mesuré combien les grandes causes, aussi indispensables soient-elles, peuvent masquer de toutes petites histoires, des vies à côté de soi, moins visibles et pourtant si fortes de leur singularité. » Le livre raconte une histoire humaine singulière, de celles qui donnent du sens au bien commun de l’humanité dans un monde qui peine encore à s’extraire des fanges de la barbarie.

(1) Pour commander :[email protected]. Librairie Castela, 
place du Capitole, Toulouse, tél. : 05 61 23 24 24. Libraire J.-J. Rousseau, 175, rue de la Croix-d’Or, Chambéry, tél. : 04 79 70 18 10.

(2) Les lettres sont reproduites dans un DVD offert avec le livre.

Alain Raynal

Source : http://www.humanite.fr/26_02_2011-au-del%C3%A0-de-l%E2%80%99hommage%E2%80%89-charlotte-ou-l%E2%80%99histoire-d%E2%80%99une-h%C3%A9ro%C3%AFne-discr%C3%A8te-et-d%E2%80%99une-vie-singuli


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